Pour qui voter? Telle est la question On est loin des grands coups de sabre des batailles présidentielles où le sens du verbe et le goût des postures martiales sont de rigueur! La campagne électorale boucle sa première semaine et les candidats enfilent sans éclats le costume de président de la République. Insipides, incolores et inodores, leurs meetings se succèdent et se ressemblent. Les candidats peinent à trouver le mot qui accroche, la phrase qui mobilise. Ils n'arrivent pas à donner du mouvement, à mobiliser. Peut-on haranguer les foules avec cette phrase de M.Sellal?: «C'est par la science et le savoir que les nations se hissent et se développent et nous, en Algérie, nous devons accorder toute l'importance à ce domaine (...).» Avouons que cette «tirade» n'a pas trop de relief pour capter les électeurs. Fawzi Rebaïne tente de secouer le cocotier depuis Skikda et rappelle que «l'Algérie a enfanté beaucoup d'hommes et non pas un seul, capables de la construire et donner un meilleur avenir». Même si le sujet attire, quelque chose manque à la formulation d'un sujet aussi accrocheur que celui abordé par Louisa Hanoune quand elle déclare: «J'ai l'audace, si vous m'en déléguez, de faire revenir les réserves de change se trouvant à l'étranger.» Pas la moindre idée qui harangue les foules, pas la moindre proposition qui braque l'opinion, pas la moindre action qui fait le buzz pour rester dans le jargon des nouvelles technologies. On est loin des grandes batailles présidentielles aux grands coups de sabre où le sens du verbe et le goût des postures martiales sont de rigueur! Pourtant, les candidats ont le choix des armes qui ne demandent qu'à être actionnées. Des nouvelles technologies, des télévisions et une presse écrite pétillante et foisonnante à leur service. Comment expliquer cette indigence politique? Comment justifier cette médiocrité et ce manque de finesse stratégique? En réalité, le manque d'inventivité n'est pas uniquement la faute des candidats, mais il tient aussi à leur staff de campagne et surtout à la culture du marketing politique qui fait défaut en Algérie. Nous manquons effectivement d'un personnel médiatique exercé dans l'art de fabriquer des présidents. Des gourous de la communication capables de faire admettre à l'opinion publique le candidat fraîchement sélectionné. Nous manquons de ces magiciens qui peuvent installer une personnalité au coeur de la vie politique, non pas comme un simple produit de consommation courante, vite posé, vite oublié, mais comme une «marque» destinée à durer et à être déclinée au moment opportun. Pour cela, il faut avoir des Jacques Séguala, le créateur de «La force tranquille», le slogan qui a porté François Mitterrand à la présidence de la République française en 1981. Nous n'avons pas de Jacques Pilhan, ce conseiller surnommé 'le sorcier de l'Elysée'', qui a façonné les relations de deux présidents, François Mitterrand et Jacques Chirac, avec les Français. Nous manquons de Spin Doctors à l'image de Karl Rove, le cerveau grâce à qui George Bush a été élu gouverneur du Texas, puis président des Etats-Unis. Un stratège politique dont la religion était: attaquer l'adversaire. Ou alors pouvons-nous prétendre avoir un Chris Hughes, le fondateur de Facebook, qui a fait des réseaux sociaux un outil de propagande politique d'où a jailli le président Obama? Nous manquons de tous ces ingrédients pour fabriquer un président. Nous nous contentons donc de ce qui sera servi par les réseaux politiques traditionnels. Dans l'ombre, ils savent concocter des mélanges finement dosés et qui respectent les équilibres des... saveurs de ceux qui pensent à notre place. A chaque pays ses Séguéla et ses Spin Doctors.