L'actuel Président a signifié qu'il ne rempilera pas pour un quatrième mandat Nous manquons de gourous de la communication, capables de faire admettre à l'opinion publique un nouveau candidat fraîchement sélectionné. Les élections législatives étant bouclées, les professionnels de la politique se placent déjà sur la ligne de départ pour l'échéance de 2014. A deux années de la présidentielle, l'Algérie a-t-elle les moyens de «fabriquer» un président? La question taraude l'opinion nationale et internationale dès que l'actuel président a signifié qu'il ne rempilera pas pour un quatrième mandat. En affirmant «Tab Djenane na» (notre génération est finie, Ndlr), dans son discours du 8 mai dernier à Sétif, M.Bouteflika a compris que quand l'heure a sonné, il est inutile de vouloir bricoler le balancier de l'horloge biologique. Adieu la légitimité historique! Nous avons au moins un élément de réponse aux questionnements de l'opinion: le futur président de l'Algérie ne sera pas issu de la génération qui a participé à la guerre de Libération nationale. Mais, il est difficile de trouver qui parmi le personnel politique le plus en vue, celui qui a la stature d'un présidentiable. L'actuel secrétaire général du FLN, Abdelaziz Belkhadem? Embarrassé par le mouvement de déstabilisation au sein de son parti, M. Belkhadem est en très mauvaise posture pour cette échéance. Ali Benflis? Sa candidature en 2004 contre Bouteflika a fait des dégâts. Son retrait de l'arène politique a été perçu comme un abandon du combat, ce qui lui colle une image de looser. Technocrate avéré, on reproche à l'ancien chef de gouvernement Ahmed Benbitour un manque flagrant de réseaux et de relais. Les spéculations dans les milieux politiques vont bon train entre Mouloud Hamrouche et l'actuel Premier ministre, Ahmed Ouyahia. Ce dernier avait déjà annoncé la couleur en faisant sienne la sentence de l'ancien président français Giscard d'Estaing que «la présidence de la République est la rencontre d'un homme avec son destin». Enarque, homme de poigne, de réseaux et surtout de dossiers, M.Ouyahia, 62 ans, est à la tête du gouvernement depuis juin 2008. Il a appelé au secours face à des lobbys qui s'apprêtent à lui barrer la route vers le palais d'El Mouradia en 2014. Dans son intervention, samedi 30 mai, devant le conseil national du RND, il a affirmé que «l'argent commande en Algérie, il commence à gouverner et à devenir un argent maffieux», a-t-il lancé comme un appel au secours face à la mafia. Autre méthode, autre sature. Mouloud Hamrouche peaufine sa stratégie dans l'ombre. Il ne s'est pas manifesté depuis le début des révoltes arabes. Pas un mot lors des contestations de janvier et février 2011, il a décliné l'invitation de Abdelkader Bensalah pour le dialogue avec les personnalités politiques en juin dernier, et il ne s'est pas exprimé sur les élections législatives et la situation politique du pays. Vous voulez être entendu? Alors, taisez-vous. Ce n'est pas véritablement le silence, mais la diète. Toujours la rareté, ce ressort du désir. C'est à cette gymnastique que s'adonne Mouloud Hamrouche qui traîne le boulet de sa connivence, en 1990, avec le FIS dissous mais qui a toujours le label de l'homme qui a créé le déclic des réformes économiques et l'ouverture médiatique en Algérie. Finalement, le personnel politique ne foisonne pas en candidats présidentiables. Cela est un fait à qui on peut trouver plusieurs explications. Mais avons-nous un personnel médiatique à même de fabriquer des présidents? Des gourous de la communication capables de faire admettre à l'opinion publique un nouveau candidat fraîchement sélectionné? En effet, nous manquons de spécialistes en marketing politique qui peuvent installer une personnalité au coeur de la vie politique non pas comme un simple produit de consommation courante, vite posé vite oublié, mais comme une «marque» destinée à durer et à être déclinée au moment opportun. Pour cela, il faut avoir des Jacques Séguala, le créateur de «La force tranquille», le slogan qui a porté François Mitterrand à la présidence de la République française en 1981. Nous n'avons pas de Jacques Pilhan, ce conseiller surnommé «le sorcier de l'Elysée», qui a façonné les relations de deux présidents, François Mitterrand et Jacques Chirac, avec les Français. Nous manquons de Spin Doctors à l'image de Karl Rove, le cerveau grâce à qui George Bush a été élu gouverneur du Texas, puis président des Etats-Unis. Un stratège politique dont la religion était: attaquer l'adversaire. Ou alors pouvons-nous prétendre avoir un Chris Hughes, le fondateur de Facebook, qui a fait des réseaux sociaux un outil de propagande politique d'où a jailli, le président Obama? Nous manquons de tous ces ingrédients pour fabriquer un président. Nous nous contentons donc de ce qui sera servi par les réseaux politiques traditionnels. Dans l'ombre, ils savent concocter des mélanges finement dosés et qui respectent les équilibres des... saveurs de ceux qui pensent à notre place. A chaque pays ses Séguala et ses Spin Doctors.