Le souverain qatari est en tournée dans le Monde arabe à la recherche de nouveaux alliés Le plus jeune souverain du Monde arabe, l'émir du Qatar, Cheikh Tamim Ben Hamad Al-Thani, est depuis hier à Alger à l'invitation du président Bouteflika et cela pour une visite officielle de deux jours en Algérie. Selon un communiqué de la présidence, cette visite sera «l'occasion» pour le président de la République d'examiner avec l'émir de l'Etat du Qatar les «voies et moyens de consolider et promouvoir les relations bilatérales dans divers domaines de manière à répondre aux attentes des deux peuples frères», ajoute le communiqué. Elle «permettra également aux deux chefs d'Etat de poursuivre leur coordination et concertation et d'échanger les vues sur les différentes questions arabes, régionales et internationales d'intérêt commun», conclut le communiqué. Deux jours seront donc nécessaires pour discuter des dossiers en attente entre Doha et Alger. Cheikh Tamim Ben Hamad Al-Thani était accompagné d'une importante délégation, comprenant notamment le ministre des Affaires étrangères, Khaled Ben Mohamed Al-Attia, qui était venu en décembre dernier. Ce dernier était venu boucler le projet sidérurgique de la zone industrielle de Bellara, dans la wilaya de Jijel, en négociation depuis deux ans avec le Qatar et qui a été signé le 19 décembre 2013 entre l'entreprise publique algérienne Sider et Qatar International (coentreprise entre Qatar Steel et Qatar Mining). Le contrat a été signé de manière «officielle et définitive», avait déclaré le ministre algérien de l'Industrie, Amara Benyounès, ce jour-là. Mais la visite du souverain qatari est plus politique que commerciale. Elle est en tout cas un signal fort du réchauffement des relations entre les deux pays, malgré quelques passages à vide dans les rapports diplomatiques. Durant la révolution arabe, le Qatar n'a pas apprécié la position algérienne qui s'était mise du côté des dirigeants déchus. Alger qui avait toujours défendu le principe de la souveraineté d'un pays concernant sa politique intérieure s'est toujours démarquée des actions médiatiques et diplomatiques du Qatar concernant les pays touchés par la révolution arabe. On se souvient en 2011, durant la réunion des ministres des Affaires étrangères des pays arabes, qu'une vive altercation a eu lieu entre le ministre des Affaires étrangères algériens, Mourad Medelci et son homologue qatari, Hamad bin Jassim al-Thani. A l'époque, le chef de la diplomatie algérienne avait durant les débats sur le dossier syrien demandé au conclave de ministres arabes de «traiter le sujet syrien avec plus de sagesse et de revoir la décision de suspendre la Syrie de la Ligue arabe au risque de se retrouver dans une situation compliquée». Le ministre des Affaires étrangères qatari de l'époque, Hamad bin Jassim al-Thani, connu pour sa virulence, avait lancé d'un ton menaçant: «Arrêtez de défendre la Syrie parce que votre tour viendra et peut-être que vous aurez besoin de nous.» Mais cette sortie de route diplomatique du sulfureux HBJ, fait partie du passé. Le nouvel émir veut construire des relations diplomatiques solides. Le remplaçant de HBJ, le ministre des Affaires étrangères Khaled Ben Mohamed Al-Attia, est déjà très apprécié à Alger. Selon certaines sources, les responsables algériens ont apprécié la distance de ses propos et son sens de la diplomatie ouverte. Il n'hésite pas à discuter en français avec les responsables algériens pour les mettre à l'aise et marquer sa différence avec les diplomates du Golfe, connus pour être anglophones. Si les relations entre le président Bouteflika et la famille Al Thani ont toujours été excellentes, les relations politiques, économiques et surtout médiatiques entre Doha et Alger ont toujours été tumultueuses. En janvier 2011, Doha était soupçonné d'avoir tenté d'introduire sa révolution arabe dans les rues d'Alger. Doha était soupçonnée également de torpiller la présence algérienne dans le Forum des pays exportateurs de gaz (Fpeg). Le traitement de l'information sécuritaire en Algérie par Al Jazeera et le conflit judiciaire entre beIN Sports et l'Entv sont les derniers couacs d'une relations entre Doha et Alger. L'émir Tamim est à Alger dans le but d'exporter une nouvelle image du Qatar. Celle d'un pays jeune à la recherche d'alliés et de partenaires à long terme. On est loin de cette image de petit Emirat conquérant, qui accueillait dans ses palais huppés et dorés à Doha, les dirigeants arabes à la recherche d'une stabilité et d'une aide financière. L'émir Tamim est à Alger à la recherche d'un pays frère, d'une expertise diplomatique du président Bouteflika. Le souverain qatari est en tournée dans le Monde arabe à la recherche de nouveaux alliés. Alger est sa quatrième escale après Amman, Khartoum et Tunis. Le souverain qatari n'a pas souhaité poursuivre sa tournée au Maroc, pays allié et dépendant financièrement de l'Arabie Saoudite. L'Algérie et la Jordanie sont d'ailleurs les deux seuls pays du Monde arabe qui n'ont pas été touchés par la révolution arabe. Après un stop à Amman, Khartoum et Tunis, c'est à Alger que le dirigeant qatari vient chercher un soutien pour l'avenir de son pays. En tout cas, cette tournée de Cheikh Tamim, qui a été précédée d'une visite dimanche en Jordanie, intervient alors que son pays a été mis à l'index par ses voisins arabes du Golfe qui le soupçonnent de chercher à les déstabiliser. L'émir veut «consolider les relations fraternelles» qui lient son pays au Soudan, à l'Algérie et à la Tunisie et se concerter avec les dirigeants de ces pays sur «des questions d'intérêt commun», avait indiqué mardi l'agence officielle du Qatar QNA, sans donner plus de détails.