C'est devenu un fait à la mode : tout le monde sollicite une bipartite. Après l'Ugta et l'Unpa, c'est maintenant au tour du patronat de vouloir une rencontre avec Ouyahia et son staf. Pourquoi pas? D'un côté, le gouvernement a fait du dialogue social une priorité et une stratégie, d'un autre, maintenant que les caisses du Trésor public sont pleines et que la prochaine échéance présidentielle n'est que dans cinq ans, le gouvernement veut se donner une marge de manoeuvre en vue d'apaiser le front social qui a eu au cours de la mandature passée, des pics d'effervescence, parfois dangereux, risquant de mettre en péril la cohésion sociale. Alors que la centrale syndicale, qui a déjà arraché le principe d'une bipartite, a embouché le clairon pour donner son onction au programme du gouvernement dès son adoption par le parlement, d'autres catégories sociales demandent aussi un tête-à-tête avec l'Exécutif. C'est paraît-il la meilleure manière d'éplucher les dossiers et de trouver les solutions qui conviennent aux différents secteurs. Après les travailleurs donc, c'est la paysannerie qui postule à ce genre de rencontre avec le gouvernement. Le secrétaire général de l'Unpa a déclaré au cours d'une réunion récente avec les cadres paysans qu'il allait introduire une demande pour une bipartite. Les problèmes en suspens sont nombreux, à commencer par celui du foncier agricole, des dettes cumulées des agriculteurs, de l'accès aux crédits bancaires, aux équipements et aux intrants. D'autant plus que cette saison a été quelque peu perturbée par les intempéries ou la rouille jaune qui ont endommagé les récoltes. Pour ce qui est des patrons, c'est rien moins que le ministre de la PME/PMI, Mustapha Benbada qui vient d'affirmer sur les ondes de la Chaîne III qu'il a l'intention de saisir Ahmed Ouyahia à l'effet d'obtenir le principe d'une bipartite entre le gouvernement et le patronat. On peut supposer que Mustapha Benbada a été lui-même destinataire d'une demande en ce sens, émanant des différentes organisations patronales, au moins l'une d'elles, puisque elles sont nombreuses. Entre le Forum des chefs d'entreprises, la Cap, la Cnpa, la Cipa et autres Cgeoa, il y a urgence à saisir le gouvernement sur les pressions qui s'exercent sur les entreprises, dont il est plus qu'urgent d'assainir l'environnement. Les chantiers à défricher sont nombreux : charges fiscales et patronales, taxes douanières, simplification du registre du commerce, accès au foncier industriel ainsi qu'aux crédits bancaires, mise en place d'un marché financier pour venir en appui à l'investissement productif, mise à niveau des entreprises, règlement de la perte de change. Mais il y a aussi les contraintes nouvelles qui peuvent être posées par la ratification de l'accord d'association avec l'Union européenne ainsi que par la future et probable accession à l'Organisation mondiale du commerce. Peut-on parler de la méthode Ouyahia dans la conduite du dialogue avec les partenaires sociaux ? C'est M.Habib Yousfi, président de la Cgeoa, qui affirmait en 2000, alors que Ouyahia n'était que ministre de la Justice, que le seul chef de gouvernement qui avait été sensible au problème du patronat était Ahmed Ouyahia. A ce dernier de prouver que sa méthode est la bonne maintenant qu'il a pris les rênes de l'Exécutif, et de démontrer que ce n'est pas une réputation surfaite.