C'est un long entretien avec Vahid Halihodzic, riche en enseignements, qui a paru avant-hier dans France Fooball, retraçant l'histoire particulière du coach de l'EN avec la Coupe du monde et ses deux rendez-vous ratés. Il aborde aussi l'état d'esprit qu'il a dû inculquer à l'EN quand il l'a reprise après la débâcle marocaine. Invité à s'exprimer sur la Coupe du monde et en particulier sur celle de 1982, lors de laquelle il devait être l'avant-centre de la Yougoslavie, Vahid se remémore: «Ça restera un traumatisme pour la vie. A l'époque, j'étais le seul joueur qui n'avait pas eu la permission de quitter la Yougoslavie à 28 ans. On ne voulait pas que je parte à cause des qualifications pour la Coupe du monde où l'on était tombé dans un groupe compliqué avec l'Italie. J'ai pu signer à Nantes à 29 ans, un an après les autres (...) Miljan Miljanic le sélectionneur a changé de tactique au dernier moment et décidé de jouer sans avant-centre. Il a aligné Zlatko Vujovic, qui n'était pas un buteur, et moi, je me suis retrouvé sur le banc. J'ai dû me contenter d'entrer à trois reprises en cours de match. Il n'y avait aucune raison de modifier un système qui fonctionnait bien. Mais il y a eu des pressions politiques de la part de certains clubs qui avaient besoin de valoriser leurs joueurs.» La leçon que le Bosnien en retire, c'est une grande sensibilité à l'heure de motiver ses choix quand il ne retient pas un joueur: «Je n'ai jamais oublié ce qui s'est passé en 1982. Cela a influencé toute la carrière d'entraîneur, lorsque j'ai des décisions à annoncer, je fais très attention à ne pas blesser les gens. Moi je suis un affectif. Je n'aime pas faire de mal aux gens. Mais j'ai toujours raisonné en fonction des intérêts de l'équipe. L'équipe doit être au-dessus de tout le monde.» Elogieux envers Karim Ziani quand il s'agit d'évoquer sa mise à l'écart, Vahid déclare: «Un joueur n'est jamais prêt à entendre qu'il y a meilleur que lui. Mais j'en ai connu, qui se comportait dignement. Karim Ziani, par exemple. Il était titulaire avant que j'arrive. Mais Feghouli a déboulé et s'est imposé. Cela a provoqué un tollé en Algérie. Le public scandait son nom, il y avait des banderoles en sa faveur. Karim est resté très correct et n'a jamais émis de critiques. J'ai beaucoup apprécié son comportement responsable.» Invité à juger le niveau d'exigence de son équipe, il rajoute: «Aujourd'hui, le comportement des internationaux algériens est à la hauteur de ce que l'on voit dans les plus grandes équipes. Je suis fier de ce que nous avons accompli. J'ai essayé 75 joueurs en deux ans et demi et on a fait un boulot énorme! Notre qualification a été banalisée, alors que c'est un succès exceptionnel. Il a fallu tout reconstruire.» En ce qui concerne les chances de passer l'écueil du premier tour, Coach Vahid, fidèle à son idée, indique: «Chacun devra être à 100% (...) et il faudra de la réussite. On doit progresser de 50% dans le travail défensif. En Coupe du monde, il faut un réalisme à l'italienne en défense comme en attaque.» Concernant son avenir au sein de l'EN, le Bosnien précise: «Certains ont pris cela pour un manque de respect, alors que c'est une réflexion toute personnelle (...) Mais je n'ai rien décidé. Je suis resté fidèle à l'Algérie alors que j'ai eu des propositions très supérieures sur le plan financier, dont je n'ai jamais fait état.» Enfin, Vahid conclut en disant que son autorité ne sera pas sapée par cette affaire: «C'est un risque oui. Mais si un joueur ne respecte pas le groupe, il sera écarté. Il y a quarante millions d'Algériens qui nous regardent. Pour eux, l'Equipe nationale, c'est sacré! On n'a pas le droit de lui porter atteinte.»