Quelle formidable revanche pour Vahid Halilhodzic. Depuis juillet 2011, année de son recrutement par la FAF à la tête de l'équipe nationale algérienne, Vahid vouait sa réussite et celle des fennecs, il voulait faire la différence et repousser les frontières des «catastrophes» qui collaient à la peau des verts. Cela fait aussi partie de sa revanche. Il la voulait, espérait, construite et concrétiser. Un chantier pourtant pas facile depuis 2011. Depuis, son chemin était semé d'embûche, pas facile d'empoter le pas à un autre sectionneur. Faire face à une avalanche de critiques quant à sa méthode de travail, le bosniaque n'était qu'à deux doigts de tout laisser tomber, abandonner sa revanche, ses vœux et prendre son bâton de pèlerin pour une autre destination, d'ailleurs il avait même demandé au président de la FAF, de le libérer poliment. Un peu plus tard, la zone de turbulences s'éloignait, mais vite rattrapée par des pseudo professionnels qui ne supportaient pas cette farouche résistance du Bosniaque à défendre son poste malgré les critiques souvent acerbes. Depuis son entrée en scène, son audience auprès des supporters ne fait qu'augmenter, pas une une seule fois insulté, pas une fois il n'a été doublé dans ses choix et décisions, pas une fois la FAF ne s'est pas émmiscée dans sa stratégie. Cette confiance faisait de lui, un homme libre de toute décision en tant que patron d'une équipe à la recherche de son équilibre. Dans sa course, il n'hésite pas contre toute attente, à écarter les Ziani, chaouchi ou Boudebouz et bien d'autres considérées comme les intouchables «vedettes». Ne disait-il pas lors de sa conférence de presse du 25 mars animée en prévision de la rencontre face au Bénin, un match comptant pour la deuxième journée des qualifications pour la Coupe du monde que «les joueurs vous disent qu'ils sont fiers de jouer pour leur sélection, mais dès que cela est fait, ils exigent d'être titulaires. Pour ma part, je leur ai dit que si telle est leur motivation, qu'ils restent chez eux». Concernant la mise à l'écart de certains joueurs de la sélection à l'exemple de Bouazza et Boudebouz, le sélectionneur a tenu à couper court à cette polémique. «Il ne faut pas badiner avec la discipline. Quand un joueur fait une bêtise, il faut qu'il paie sa faute. Je ne peux pas approuver ces dépassements». Attendu à la CAN-2013 une majorité de «professionnels» voyait déjà son «dégommage» à la baratte technique particulièrement, après l'élimination au premier tour de la CAN-2013. Mais avec le soutien indéfectible du président de la FAF Mohamed Raouraoua, il tourna le dos aux commentaires et critiques des uns et des autres, ceux là qui l'accusaient de déstabiliser le groupe et de ne pas réussir à dégivrer le climat lourd qui couvait les verts. Persuadé de la mauvaise foi de ses détracteurs, il s'engage à poursuivre sa mission sans relâche, celle de démontrer le contraire. Les bons résultats qui se succédaient lui donnèrent raison. Les fennecs apprennent enfin à gagner même à l'extérieur. Le bavardage ainsi atténué donna plus de confiance aux joueurs habitués, cette fois-ci, à évoluer dans un climat de respect et de confiance. Aujourd'hui, cet homme de 62 ans, tient sa revanche et s'apprête à vivre pour la première fois de sa vie, une coupe du monde en tant que sélectionneur. «Et c'est avec l'Algérie qu'il s'embarque.» La vielle du match face aux médias, il se refusera d'avancer un quelconque pronostic. «La vérité, leur dira-t-il, c'est que vous ne m'avez pas manqué. En 29 mois, je n'ai jamais été insulté par les supporters. Ceux qui m'ont insulté, ce sont les anciens entraîneurs et journalistes. Ce que Saâdane a déclaré avant le match aller, c'est scandaleux ! C'est peut-être la dernière fois que je vous vois, c'est pour ça que je suis gentil avec vous... Dans quel état je suis ? J'ai mis du Khaled et j'ai dansé. J'habite vers Roubaix-Tourcoing, c'est presque l'Algérie là-bas. Je n'ai jamais été aussi concerné dans ma carrière que pour ce match retour. J'ai envoyé des centaines de SMS et courriels pour motiver mes joueurs. La pression est sur nous. Il faut être serein, ça risque de se jouer sur des détails.» Le jour «j» dans une soirée qualifiée de tout, le sectionneur découvre un autre stress créé par cette foule qui gonfle cette ambiance et pousse les fennecs vers la victoire. Mais cette ambiance exceptionnelle ne suffisait pas à le calmer, seul le coup de sifflet final pouvait le libérer du stress ou le condamner à souffrir. Tout au long des 90', Vahid n'était Jamais assis, souvent debout, gesticulant à tout moment comme ce personnage à la recherche d'une pièce en or massif sur un terrain de football devenu à ses yeux, le seul juge. Le but de Bougherra n'a pas suffit à le calmer. Les secondes coulaient péniblement jusqu'au verdict du terrain. L'Algérie est qualifiée et son pari est gagné. Un confrère d'une presse étrangère écrivait : «C'est sa quatrième phase finale de Coupe du monde, la seconde d'affilée après celle obtenue, il y a quatre ans lors d'un match de barrage mémorable face à l'Egypte (1-0) à Oum Durman (Soudan). «Pour Halilhodzic, c'est son baptême du feu. Il a participé au Mondial-1982 en tant que joueur avec la Yougoslavie. Ancien avant-centre fidèle à quatre clubs (Turbina Jablanica, Velez Mostar, Nantes et PSG). Il a échappé à la mort lors de la guerre en Yougoslavie. Etre entraîneur était son rêve. Il fit ses premiers pas avec le Raja Casablanca, Il remporta, «la Ligue des champions en 1997 et un an plus tard, le championnat. Il a ensuite dirigé Lille, Rennes et le PSG, ainsi que des clubs en Turquie, en Arabie saoudite et en Croatie. Il avait été moins chanceux comme sélectionneur, la fédération ivoirienne l'avait privé du voyage en Afrique du Sud en 2010, en lui notifiant cette décision par fax». Cet homme qui avait pourtant qualifié les Eléphants pour la phase finale. Mais une élimination en quarts de finale lors de la CAN-2010 face à l'Algérie (2-3), lui avait coûté sa place, lui laissant un vif sentiment d'injustice. Aujourd'hui, il est dans les nuages. Du haut, il contemple son vieux monde, ce monde qui a voulu l'abattre, l'éliminer et l'éloigner du sport, il contemple aujourd'hui, ces dirigeants de la Côte d'Ivoire qui pensaient le ridiculisait à néant à travers une décision, envoyée par Fax. Aujourd'hui, il est sur un nuage de revanche et il compte encore monter plus haut pour dominer ceux qui avaient douté de ses compétences.