«Mon mari a été enfermé pendant deux mois en région parisienne pour ne pas qu'il parle à la presse» Simone de Bollardière Un documentaire poignant rassemblant des anciens appelés en Algérie a été diffusé le 3 juin en France à Quimperlé par l'association Chlorofilm. Intitulé Retour en Algérie, ce documentaire de 52 minutes réalisé par Emmanuel Audrain, a nécessité deux années de tournage. Tout commence en 2004, avec Simone de Bollardière, veuve du général Jacques Pâris de Bollardière, seul officier supérieur à avoir dénoncé la torture pendant la Guerre d'Algérie: «Il a été enfermé pendant deux mois en région parisienne pour ne pas qu'il parle à la presse», explique Simone. Il y a dix ans, elle apprend dans le journal qu'un groupe d'anciens combattants a monté une association (4ACG, Anciens appelés en Algérie et leurs amis contre la guerre) afin de reverser leurs primes à des associations algériennes: «Ils n'imaginaient pas garder cet argent pour eux, le dépenser», déclare Simone. Elle leur écrit sans se poser de questions: «Je leur ai dit que mon mari aurait été fier. Ils m'ont invitée à Albi pour la première réunion. J'y suis allée». Simone de Bollardière découvre alors des hommes qui ne peuvent parler des atrocités qu'ils ont vues, qu'ils ont été obligés de commettre aussi, je leur ai dit: «Ce n'est pas vous les coupables.» Emmanuel Audrain commence à filmer des témoignages, puis, accompagné d'anciens appelés ils partent trois fois en Algérie. L'émotion est forte, ils retrouvent les villages qu'ils ont connus, des populations qui ont perdu leur famille. Des moments de communion entre Algériens et Français. Les locaux envoient à leur tour un message aux anciens combattants: «Ce n'est pas votre faute.» Tous font un pas de géant dans leur thérapie de groupe. Ils sont devenus amis: «C'est une fête lorsque l'on se voit, ils ont tous le sourire maintenant», assure Simone de Bollardière. Pour l'association Chlorofilm, la projection de Retour en Algérie était une évidence, Retour en Algérie nous a beaucoup touchés, il rentrait parfaitement dans notre programmation», explique Gwénola Samson, présidente de Chlorofilm. Retour en Algérie sera projeté le 3 juin à 20h30 au cinéma La Bobine. La projection sera suivie d'un échange entre le réalisateur et les spectateurs. Le réalisateur Emmanuel Audrain, qui a fait connaissance avec Simone lors d'un précédent film, assiste à l'assemblée générale de l'association en 2008: «Quand je les ai rencontrés, des nouveaux adhérents arrivaient tout juste dans l'association; ils n'arrivaient pas à parler. Ces grands costauds ne pouvaient dire que leurs prénoms. Je me suis dit qu'il fallait en faire un film pour savoir comment ils restaurent l'image d'eux-mêmes.» Ce sont des anciens appelés en Algérie, marqués, meurtris à vie par cette guerre, qui témoignent dans un documentaire. Un document important pour la sauvegarde de la mémoire et qui pourrait bien être présenté à Alger pour parler définitivement de pages tournées sur la guerre de Libération. [email protected]