Assurer un retour de la stabilité dans la région et éviter le pourrissement Un sentiment de peur, d'injustice et de frustration a gagné les habitants de la vallée du M'zab. A Ghardaïa, le calme est loin d'être de retour. Les affrontements qui ont éclaté jeudi dernier après le décès d'un jeune Mozabite se sont poursuivis hier matin, selon des sources locales. «Des affrontements opposent depuis le matin d'aujourd'hui (hier, Ndlr) les Mozabites aux éléments de la Gendarmerie nationale, soutenus par les Arabes», a indiqué le militant Kamel Eddine Fekhar. Selon notre interlocuteur, plusieurs maisons ont été incendiées. «Les gendarmes se comportent comme une véritable armée d'occupation. Ils provoquent, agressent avec des dépassements graves et pénètrent par la force dans les maisons», dénonce la même source. Cela se passe au moment où les Mozabites enterrent leur deuxième mort depuis le début du mois de Ramadhan. C'est dire que le deuil ne fait que se prolonger. Un sentiment de peur, d'injustice et de frustration a gagné les habitants de la vallée du M'zab qui se disent victimes d'un complot visant leur extermination. «On se sent colonisé. On dirait qu'on a affaire à des ennemis», explique Kamel Eddine Fekhar, contestant la version officielle concernant la cause du décès du jeune Mozabite attribuée à un accident de circulation. En effet, le wali de Ghardaïa, Abdelhakim Chater, affirmait avant-hier que le décès était causé par un accident de circulation. Une thèse confirmée par la cellule de communication de la sûreté de Ghardaïa, selon laquelle la victime a trouvé la mort en percutant accidentellement un camion en stationnement au quartier Aïn Lebeau. Mais cette version ne convainc pas les Mozabites, d'autant plus que cette version est la même que celle avancée pour le jeune décédé le premier jour du mois de Ramadhan. Pour eux, il s'agit de meurtres. «Il y a des témoins oculaires», selon Kamel Eddine Fekhar. Ce dernier estime que le wali n'a pas à parler de l'affaire, en l'absence du rapport du médecin légiste et de celui de la police. Il soutient que les autorités officielles usent de mensonges, en ce qui concerne les événement de Ghardaïa. Ce qui est, en outre, inexplicable dans les derniers événements de Ghardaïa, c'est le silence «complice?» de la classe politique. A part le TAJ, aucun autre parti n'a jugé utile de réagir au drame pourtant très inquiétant que vit le M'zab. Dans un communiqué rendu public, vendredi soir, à l'issue d'une réunion de son bureau politique, le TAJ a estimé que la situation dans la wilaya «nécessite davantage d'efforts». Parti au pouvoir présidé par Amar Ghoul, le TAJ a même osé appeler les autorités publiques à «faire face à la situation avec plus de fermeté et de rigueur et à une prise en charge rapide des préoccupations des citoyens pour assurer un retour de la stabilité dans la région et éviter le pourrissement». En attendant que le pourrissement soit évité, le wali de Ghardaïa a demandé à l'ensemble de la composante de la société ghardaouie d'être solidaires entre eux (...) et de «surpasser les malheureux événements» qui s'y sont produits. Le wali a annoncé qu'un réseau de télésurveillance sera mis en place dans les villes de Ghardaïa, parallèlement à une lutte contre la cybercriminalité qui sera entamée pour «éviter la propagation de la rumeur et de la fitna». Evoquant les efforts déployés par l'Etat en vue d'aider les victimes, il a rassuré que sur 881 habitations déclarées incendiées, plus de 80% des dossiers ont été pris en charge, de même que les 548 commerces déclarés. Estimant qu'elles ne jouent pas leur rôle de pacificateur, le FFS décide d'ester en justice les autorités locales. Selon le secrétaire fédéral du FFS dans la wilaya de Ghardaïa, Hamou Mesbah, fera recours à cette démarche dans les jours prochains. Pour le FFS, c'est la seule solution pour trouver une issue à cette grave crise, après que toutes les solutions proposés par les représentants de la communauté mozabite, aient échoué vu qu'aucune promesse des autorités n'ait été tenue. Le FFS veut que cette action en justice soit un électrochoc pour sauver la vallée du M'zab. Pour sa part, le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (Cncppdh), Me Farouk Ksentini, a appelé, hier, à Alger, à l'ouverture d'un dialogue en «toute urgence», afin de résoudre «définitivement» la crise qui secoue la wilaya de Ghardaïa, qualifiant les événements qui s'y déroulent de très «graves». Me Ksentini a estimé qu'il est «inadmissible que la situation qui prévaut à Ghardaïa perdure», appelant «toutes les parties concernées» à ouvrir un dialogue en «toute urgence». «Il est impératif que les parties concernées s'assoient autour de la même table pour trouver une solution définitive, et cela en toute urgence, car la situation est grave au plus haut degré», a-t-il souligné, expliquant que les évènements de Ghardaïa portent «atteinte» à l'unité nationale et à l'Islam. Saluant les mesures et les dispositions prises par le gouvernement afin de réinstaurer le calme et la stabilité dans cette région, le président de la Cncppdh a rappelé qu'il est du «devoir constitutionnel de l'Etat» de garantir la sécurité aux citoyens là où qu'ils soient.