Le consommateur algérien continue de croire que les fruits importés sont meilleurs que les produits nationaux qui subissent les avatars de l'importation. C'est par cette réflexion, au demeurant très plausible, que Hadj Tahar Boulenouar, porte-parole de l'Union générale des commerçants et artisans algériens (Ugcaa) a entamé son analyse du marché actuel des fruits, notamment pendant le mois sacré du Ramadhan. En effet, n'a-t-on jamais entendu un quidam dire «je n'ai pas mangé de bananes depuis une semaine!», s'est écrié Boulenouar qui a fustigé les barons de l'importation qui ont étendu, dit-il, leurs tentacules même au secteur du médicament. Intervenant à la tribune, Akli Moussouni, commerçant et néanmoins expert indépendant ayant activé auprès de l'Union européenne et récemment pour la Mauritanie, a bien voulu apporter quelques éclaircissements sur cette situation qui pénalise fortement, et le producteur, et le consommateur algériens. Il a rappelé avec regret la disparition progressive des fruits du terroir, en citant la pêche blanche des Béni-Mansour, la «m'tebag» de Laghouat, la bergamote (limon sucré), la grenade, toutes variétés confondues, l'abricot de Messad (Sud), la prune d'Aflou, l'abricot (pour cause du manque d'unités de transformation), la «prestigieuse» clémentine sans pépins qui n'a d'égale nulle part ailleurs...la liste est longue pendant que la deglet ennour est exportée frauduleusement vers des pays qui l'exportent à leur tour sous leur propre label, sans oublier sa réplique «clonée» qui commence à poindre en Californie. La concurrence étrangère est rude, comme en témoigne le secteur des boissons dans la transformation et le conditionnement des concentrés importés. Cette filière, explique cet expert, va également subir très prochainement la concurrence du marché international sachant que l'Algérie doit procéder au démantèlement tarifaire en 2017, conformément à l'accord d'association avec l'UE. Cet expert a préconisé de «mettre en place de nouvelles politiques agricoles» comme redynamisation du secteur à travers le développement du secteur d'approvisionnement de l'industrie de transformation et le dégagement d'un quota de production destiné à l'exportation dans le cadre de la diversification de l'économie hors hydrocarbures vis-à-vis de l'Europe (accord d'association) et l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Moussouni suggère, par ailleurs, une «restructuration de la gouvernance» afin de mieux «encadrer les politiques de développement de l'agriculture à travers des outils et une réglementation efficace.» Il a souligné la nécessité de l'établissement d'un «marché normalisé». Il faut savoir que ce sont 82.000 agriculteurs qui ont été recensés en Algérie pour exploiter 42.000 hectares, ce qui équivaut environ à un hectare par individu à peine. S'il ne faut pas «comparaître l'incomparable» sachons qu'un agriculteur exploite 160 hectares aux Etats-Unis alors qu'en Europe 13 ha lui reviennent l'importation des engrais (7000 DA le quintal), des intrants phytosanitaires, et autres produits nécessaires à l'exploitation agricole, en général, greffent lourdement le prix de revient de la production agricole en Algérie. Faut-il aussi parler de l'aide des pouvoirs publics qui est orientée presque exclusivement vers les produits de large consommation que ne sont pas les fruits.