Quand Bali entonne Amine Amine, les instruments font fusion. L'orchestre de Padovani suit la cadence tandis que le public bat la mesure en tapant des mains... Comme dans plus d'une centaine de pays dans le monde, Alger a célébré, avant-hier 21 juin, journée la plus longue de l'année faut-il le savoir, la musique dans la liesse et la joie. A l'initiative du Centre culturel français, deux orchestres sont venus affronter, mais surtout mesurer, leur talent en s'épousant en parfaite symbiose et harmonie. D'un côté, Jean-Marc Padovani, le saxophoniste enchanteur ayant contracté la sympathie des Algériens et revenant ainsi par trois fois dans notre pays, de l'autre, Athmane Bali et sa smala familiale charriant avec lui toute sa légendaire bonhomie et son sourire chaleureux. Où ça? A l'Agora de Riadh El Feth. Ce soir, c'est la fête. La leur, mais aussi la nôtre. Celle des artistes qui exercent en plein jour ou dans leur coin à la maison, chantonnant, fredonnant ou grattant une guitare dans un espace aménagé comme salle de répet ou dans un garage... attendant des jours meilleurs et ne perdant pas espoir que peut-être, ce sera un jour leur tour ... Aussi, c'est à tous ces gens-là que cette journée doit être consacrée, dédiée en toute spontanéité... Pas étonnant donc de voir ici et là, quelques têtes de musiciens curieux ou venant apprécier le concert. Noyé au milieu du public ou restant en retrait, on pouvait reconnaître un des artisans du groupe Triana d'Alger, Moh de Mediterranéo, le jazzman Azzedine Tebibel mais aussi Fayez du groupe Index, Samir et sans doute bien d'autres qui ne demandent qu'à s'exprimer et faire exploser leur talent... Assis, tout autour sur les marches escaliers, des familles, jeunes et moins jeunes, se sont retrouvés pour écouter le mariage des «chants du monde». Padovani qui clame son amour pour les musiques traditionnelles, réalise ici un autre rêve, autre performance musicale faisant tinter cuivre, clarinette, batterie et accordéon en correspondance avec des percussions d'un luth errant et rehaussé par le chant majestueux de ces dames du Sud. Un mariage réussi quand on sait que Padovani et Bali, n'ont pu longtemps répéter ensemble. L'intro se veut jazzy suivi de l'entrée remarquée d'Athmane Bali et toute sa famille au complet. Le Maestro Padovani accompagne le maître de céans Bali dans son voyage mélodique. L'accordéon ajoute du piment à cette sauce déjà épicée. Bali entonne Amine Amine et les instruments font fusion. L'orchestre de Padovani suit la cadence tandis que le public, le tempo en tapant des mains. Padovani quitte la scène un moment. Kaf noun koum fa ya koum. Ainsi soit-il, déclare Bali au faîte de sa sérénité. Quand le rythme s'accélère, la transe s'est emparée d'une fillette qui balance de droite à gauche tel un balancier de pendule ses longs cheveux. La frénésie s'empare également de Bali qui fait «hurler» son luth. «Bravo!», lance un spectateur suivi de sifflements de joie. Padovani rejoint la scène. Place à Asarouf. «Il faut savoir pardonner pour être pardonné. On a souvent quelque chose à se faire pardonner», confie le chantre de la musique tindi. Le saxophoniste fait écho au chant endiablé des choristes. Djanet est un morceau dédié à la région natale de Bali. Pas facile d'improviser sur une musique que l'on a découvert depuis peu. C'est l'imagination et le talent qui l'emportent. A merveille. Le concert se termine un peu trop vite sur les airs de Rokas qui veut dire «Merci mon Dieu». Si Bali a toujours voulu «faire la fête» dans son pays, Padovani est d'autant ravi, car ça doit certainement le changer des fêtes de la musique en France. «Je trouve que la fête de la musique en France devient de plus en plus institutionnalisée, un peu rigide. C'est super de la fêter ici. La musique de Bali est une musique dans laquelle on peut complètement entrer. Je ne connaissais pas de Bali, cette formation. J'ai juste écouté ses disques. Nous avons travaillé en confrontant nos deux musiques, nos orchestres. Cela s'est passé très simplement», a confié le saxophoniste Jean-Marc Padovani. Un disque comme couronnement, de ce «mariage de styles» figure au programme sans date précise cependant. C'est un peu trop tôt pour en parler. Nous, en tous les cas, on l'attend avec impatience, tout comme les autres...