Comme il fallait s'y attendre, un monde impressionnant est venu assister au spectacle. Un spectacle placé sous le signe de la fusion entre le jazz et le tindi. La salle était archicomble. Le moindre espace était « squatté » par les invités. Les travées ont été occupées et des chaises supplémentaires ont été placées. Les vigiles ont eu du mal à répondre à la demande des retardataires agglutinés devant l'entrée. Après plus de 20t minutes de haute tension, le directeur de la salle Ibn Zeydoun donne l'ordre d'ouvrir les portes. « Ma devise est de ne réprimer personne. Durant la tenue du festival, l'entrée est gratuite, cependant j'ai averti le public que celui qui se sent mal, qu'il quitte la salle », confie M. Fellahi, directeur artistique de l'Office Riadh El Feth. Il joue du oud assis C'est dans une ambiance électrique tant par la chaleur du public que par la température de la salle - la climatisation ne répondait plus aux besoins - que le spectacle commence par un mixage de deux genres musicaux le tindi et le jazz, signé par les artistes Othmane Baly et Jean-Marc Padovani. A droite de la scène, la formation familiale au complet de l'homme bleu Bali est assise à même le sol. A gauche, c'est l'équipe du jazzman français constituée d'un accordéoniste, d'un trompettiste, d'un saxophoniste, d'un contrebassiste et d'un guitariste, qui occupe l'espace. Dès que le chanteur tindi entonne Amine, Amine, Kaf noun ou encore El Damra, le public est au comble du délire. Des corps se fondant dans l'obscurité se mettent à se déhancher au gré de cette musique ensorcelante et envoûtante à la fois. Des youyous stridents fusent d'un peu partout dans la salle. Le public se montre davantage gourmand en réclamant à haute voix des titres phare du répertoire de Baly. Ce dernier leur lance : « Rassurez-vous, la plupart de mes chansons sont au programme. » L'osmose est à son paroxysme, quand la trompette donne la réplique au oud ou encore quand l'ensemble des instruments fusionnent entre eux, sous le regard complice des deux artistes. Tout le monde est attentif devant cette communion des deux orchestres. Comme l'a si bien précisé Baly, les musiques sont faites pour se rencontrer. « Il faut juste savoir mettre la pièce adéquate à côté de celle qui va avec. » Pour le compositeur et le saxophoniste Jean-Marc Padovani : « Le jazz est une musique rythmique et ethnique. » On retrouve les mêmes ambiances répétitives dans la musique de Baly. « Il y a des improvisations que je sens dans sa musique. C'est ce qui permet aux différents musiciens de jazz et de cette musique traditionnelle de se rencontrer et de se retrouver », dit-il. Il est à noter que Padovani et Baly se sont déjà produits ensemble l'année dernière lors de la journée de la musique à Riadh El Feth. Les deux artistes, détenteurs d'un talent incontesté, ont présenté avec brio le fruit d'un travail de résidence, en plus d'une partie du travail qu'ils ont joué l'année dernière. En fait, les deux musiciens ont profité de leur séjour à Alger pour commencer l'enregistrement d'un album commun qui sortira l'année prochaine. Au terme de cette soirée inoubliable, les deux compères ont prouvé que la musique n'a pas réellement de frontières. Elle est faite pour être partagée, comprise et appréciée.