Rien n`est acquis dans les relations Algéro-Marocaines car le mur de méfiance qui s`est dressé entre Alger et Rabat est tel qu`il faut éliminer tout préalable aux négociations. L`invitation du souverain chérifien Mohamed VI adressée à Bouteflika pour solliciter sa participation au sommet arabe extraordinaire consacré à la situation de la femme arabe, en octobre prochain, à Rabat, est un pas lourd de signification pour le Maroc. Alors que le diplomate chevronné qu`est Bouteflika et le jeune monarque inexpérimenté qu`est Mohamed VI avaient, croyait-on, inauguré un nouveau cycle des relations entre Alger et Rabat, en juillet 1999, la tension entre les deux voisins maghrébins n`a jamais baissé, malgré les discours empreints de bonnes intentions. Il y a eu, d`abord, les accusations directes du Président algérien de la permissivité marocaine à l`égard des groupes terroristes, dont les membres se sont exfiltrés au Maroc après l`attentat de Beni Ounif, dans la région de Béchar. Il y a eu, ensuite, les contacts infructueux entre les deux ministres de l`Intérieur, Yazid Zerhouni et Mohamed Al-Midaoui, qui devaient logiquement déboucher sur la tenue d`une commission mixte algéro-marocaine susceptible d`aplanir les divergences. Une commission qui devait se réunir en janvier dernier, à Alger, mais qui a été, à maintes reprises, reportée. Il y a eu, enfin, ces "altercations" diplomatiques lors de sommets arabes, africains ou internationaux comme au Caire, à Syrte ou à Lusaka, où le Maroc, par pays tiers, en l`occurrence le Sénégal, voulait faire éjecter les représentants du Sahara occidental, au grand dam de la diplomatie algérienne. Ce genre d`incidents entre les deux pays n`est pas rare. Si l`on y ajoute l`escalade militaire qui empoisonne la sécurité des frontières communes, le tableau est sacrément noir. Le point d`achoppement entre Alger et Rabat demeure, dans l`esprit du palais royal, la question du Sahara occidental. S`estimant fort du dernier rapport du secrétaire-général de l`ONU, Kofi Annan et des recommandations de son envoyé spécial dans la région, James Baker, la diplomatie marocaine multiplie les banderilles, quant à la prétendue " marocanité " du Sahara occidental. La dernière en date est venue du ministre marocain des Affaires étrangères, Mohamed Benaïssa qui demande aux Algériens de ne " pas rater la chance de se réunir, Algériens, Polisario et Mauritaniens autour d`une table et d`étudier la façon d`arriver à garder au Maroc ses droits légitimes, garantir sa souveraineté territoriale et répondre favorablement aux propositions de James Baker ". En langage moins diplomatiquement codé, cette déclaration peut être assimilée à une autre provocation, alors que le Président Bouteflika écrivait à Mohamed VI, à l`occasion de la fête du Trône, que " je réitère à Votre Majesté notre attachement permanent et notre détermination sincère à renforcer les liens de fraternité, à raffermir les relations de bon voisinage (…) dans la confiance et le respect mutuels ". Davantage, le roi Mohamed VI ne disait pas moins que son chef de la diplomatie, lors du récent discours de Tanger qui a réitéré l`attachement du Maroc à une solution onusienne qui exclurait l`incontournable référendum d`autodétermination. Il a, de ce pas, instruit s on Premier ministre, Abderrahmane Youssoufi, de s`occuper davantage des " ressortissants marocains dans les provinces sahraouies ou ceux qui reviennent des camps de Tindouf vers le pays de l`absolution ", Alger appréciera. Même si les lettres entre Bouteflika et Mohamed VI redonnent du tonus à une relation conflictuelle, ainsi que le rôle positif exercé par le président tunisien, Ben Ali dans le rapprochement des points de vue, la vision des deux pays est diamétralement opposée sur le dossier sahraoui. Alger comme la Rasd refuse la " troisième voie " marocaine, appuyée par le staff onusien, en conformité avec le processus historique mené, depuis 1991 et le plan de Houston, mais qui n`a pas eu l`aval du Conseil de sécurité des Nations unies qui exhorte les pays de la région à trouver d`autres solutions politiques. Selon les diplomates, une détente algéro-marocaine est possible, si les deux pays décident d`enterrer leurs divergences à l`occasion de contacts dans le cadre des discussions sur l`avenir du Sahara occidental et dont ces échanges de lettres se veulent des prémices heureuses. Mais à ce stade, rien n`est acquis car le mur de méfiance qui s`est dressé entre Alger et Rabat est tel qu`il faut éliminer tout préalable aux négociations. Ce que Rabat ne veut pas faire en liant les relations bilatérales à la question sahraouie.