L'Armée nationale populaire amorce doucement mais sûrement son rajeunissement. Voilà donc le premier vrai discours du président de la République depuis le 8 avril. Il y retrouve des accents boumediénistes. Revigoré par le vote massif qui lui donne une légitimité que personne ne songerait plus à contester, le président est apparu sûr de lui. Confiant, serein, il fait montre d'une autorité qui sied à la fonction présidentielle, chef suprême des armées, ministre de la Défense nationale. Celui qui a eu à ramer durant tout le premier mandat sous les coups de boutoir de ceux qui ne voyaient en lui qu'un trois quarts de président, doivent aujourd'hui se rendre à l'évidence que les choses ont bien changé. En saisissant l'occasion que lui offre cette date symbolique du 5 Juillet, où il a remis des médailles et des décorations à des officiers supérieurs de l'ANP, le président a prononcé une allocation structurée et solennelle qui est un vrai message à la nation. Le contexte en lui-même est solennel, puisqu'il permet de promouvoir à des grades militaires supérieurs des officiers de la génération post-indépendance. On peut se demander si cette cérémonie n'est pas le prélude à la mise à la retraite des officiers baroudeurs de l'Armée de libération nationale, qui ont libéré le pays, et auxquels le président a rendu un hommage appuyé et mérité. L'Armée nationale populaire, qui a commencé sa modernisation et sa professionnalisation, amorce aussi doucement mais sûrement son rajeunissement. Une nouvelle génération d'officiers arrive qui est prête à assumer ses missions constitutionnelles, en passant le témoin de la gestion de la chose publique aux civils, élus par le suffrage universel. Avec des mots à peine voilés, le président de la République l'invite à retourner dans les casernes. A côté donc des passages qui concernent le rôle de l'Armée nationale populaire, le président explicite également un certain nombre de concepts, comme ceux de la réconciliation nationale, de la lutte antiterroriste, des libertés publiques et de la liberté d'expression, de la position de l'Algérie dans le monde. Revenant sur les périls qui ont menacé la nation au cours de la décennie écoulée, le chef de l'Etat a donc rendu un hommage à l'ANP, qui a pu sauver la République, au moment où le pays traversait les plus sombres moments de son histoire, incarnant, «dans l'effondrement général, la volonté nationale et le refus du chaos». Concernant le terrorisme, il affirme que son éradication est une condition de la poursuite et du renforcement du processus démocratique et du développement du pays. C'est dans ce cadre qu'il faut inscrire, ajoute-t-il, la réconciliation, qui vise à éliminer les «germes des divisions néfastes et à rassembler dans l'effort national, toutes les énergies et toutes les volontés.» Le renforcement du processus démocratique et du développement du pays ont besoin autant de l'éradication du terrorisme que de la participation de tous les Algériens dans le cadre de la réconciliation nationale, affirme sans ambage le président qui assimile le terrorisme à un fléau qui a «secoué le pays, ébranlé les fondements de l'Etat, fissuré la société, piétiné nos valeurs, compromis notre développement économique et social et terni notre image dans le monde». Il était donc normal et légitime qu'un tel fléau soit combattu avec détermination, selon les principes universels auxquels l'Algérie reste attachée. D'autant plus que la poursuite de la lutte n'a pas contrarié l'élargissement de l'exercice des libertés. L'autre volet abordé par le président de la République est donc celui des libertés et du pluralisme : «En manifestant son rejet absolu du recours à la violence, puis en adhérant massivement à la politique de concorde civile, notre pays a affirmé qu'il n'existait pas de salut pour la nation que dans l'acceptation de la diversité et de la confrontation pacifique des idées». Il prend soin cependant de bien relier la défense des libertés au respect de la dignité humaine, les deux faisant partie des droits fondamentaux de l'homme. «Car les libertés proclamées par notre Constitution procèdent de l'égalité de tous et de la dignité de chacun.».