Les trois dirigeants de la majorité et de l'opposition britanniques coalisés pour «sauver le Royaume-Uni» ont décidé de se rendre hier en Ecosse afin d'essayer d'y enrayer la montée du oui à l'approche du référendum d'indépendance. Le Premier ministre conservateur David Cameron et le libéral-démocrate Nick Clegg alliés au sein du gouvernement, et leur adversaire Ed Miliband, patron du parti travailliste, ont annoncé leur déplacement dans un communiqué conjoint, tandis qu'à Edimbourg, le dirigeant séparatiste Alex Salmond affichait sa confiance en la victoire le 18 septembre. Et raillait la contre-offensive «unioniste» de dernière minute, sur l'air du trop peu, trop tard. «Il y a beaucoup de choses qui nous divisent mais il y a un sujet sur lequel nous sommes d'accord, passionnément: nous sommes mieux ensemble au sein du Royaume-Uni», ont écrit les trois dirigeants qui ont choisi de shunter la sacro-sainte séance de questions des députés au gouvernement. «Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir», a commenté par ailleurs Cameron, qui joue dans l'affaire sa crédibilité et peut-être son avenir politique. Les trois dirigeants martèleront le même message en faveur du maintien du Royaume-Uni constitué de l'Angleterre, de l'Ecosse, du Pays de Galles et de l'Irande du Nord, mais a priori dans des meetings électoraux distincts, selon leurs états-majors. L'ex-Premier ministre travailliste, Gordon Brown, avait lancé la contre-attaque dès lundi soir. Il offre la triple particularité d'être Ecossais, d'être travailliste dans une terre traditionnellement ancrée à gauche, et d'être localement le moins impopulaire (avec un indice de satisfaction de 32%) des hommes politiques siégeant au parlement central de Westminster. Si le non à l'indépendance l'emporte le 18 septembre, «nous commencerons dès le 19 le travail législatif en vue de donner jour à un Parlement écossais renforcé», a assuré lundi soir Gordon Brown. Un projet de loi conférant au parlement régional d'Holyrood des pouvoirs accrus en matière de politique financière et de santé sera prêt dès janvier 2015, a-t-il promis. Hier cependant, un nouveau sondage TNS plaçait les partisans du oui au coude à coude avec les tenants du non, avec respectivement 38 et 39% des intentions de vote. Un sondage YouGov avait pronostiqué pour la première fois dimanche la victoire des séparatistes qui entendent déchirer l'accord d'union avec l'Angleterre vieux de 307 ans. «Nous allons gagner ce référendum en faveur de l'Ecosse», a donc assuré avec une confiance démultipliée Alex Salmond. Il rêve de rééditer le raz-de-marée électoral (non-anticipé par les instituts de sondage), qui a conféré une majorité absolue à sa formation séparatiste, le Scottish National Party (SNP), aux législatives régionales de 2011. Il a balayé d'un revers de main la contre-offensive des adversaires de son projet. «Il n'y a absolument rien de neuf dans leurs propositions (...) rédigées au dernier moment au dos d'une enveloppe (...) C'est parfaitement inadéquat, c'est insuffisant», a-t-il affirmé. Il a de quoi plastronner. Quelle que soit l'issue du scrutin il sera fondé à revendiquer au mieux une victoire au pire un grand succès. Engageant une partie de poker menteur à hauts risques, David Cameron a accepté voici 18 mois l'organisation d'un référendum qu'il croyait remporter haut la main. Mais il a cru bon refuser une proposition d'Alex Salmond qui souhaitait une consultation à double détente. Avec une première question portant sur l'indépendance, et une seconde sur l'octroi de pouvoirs supplémentaires. Elizabeth II -«horrifiée» selon les chroniqueurs royaux- à la perspective d'un éclatement de son Royaume n'entend pas pour autant sortir de son devoir de réserve et de neutralité. «Je pense qu'elle serait fière d'être la reine des Ecossais», a coupé court hier Alex Salmond. Son programme prévoit que le pays des Scots indépendant conserverait la reine pour souveraine, à l'instar du Canada.