Pour la troisième nuit consécutive, des manifestations se poursuivaient dans les grandes villes américaines Avec la multiplication des bavures policières à l'encontre de Noirs américains et la convocation d'un nouveau grand jury à New York, le mouvement de protestation ne faiblissait pas avec la poursuite des manifestations. La justice new-yorkaise a annoncé vendredi soir la convocation d'un nouveau grand jury pour décider si le policier blanc qui a tué Akai Gurley, un Noir de 28 ans, «par accident» à Brooklyn le 20 novembre doit être poursuivi devant la justice ou non. Akai Gurley avait été abattu dans la cage d'escalier mal éclairée d'une HLM de Brooklyn le soir du 20 novembre par un policier débutant, Peter Liang. Le chef des forces de l'ordre new-yorkaises avait souligné dès le lendemain qu'il s'agissait d'un «coup de feu accidentel» et que la victime était totalement innocente. Selon le New York Post, le policier qui a tiré la balle fatale avait envoyé un SMS à son syndicat et était resté injoignable pendant plusieurs minutes, alors que sa victime agonisait dans les escaliers. Le jeune père de famille était décédé à son arrivée à l'hôpital. Le procureur du district de Brooklyn, Ken Thompson, a annoncé qu'il allait présenter tous les éléments en sa possession à un grand jury, c'est-à-dire une assemblée de citoyens américains chargés de décider ou non d'une inculpation sur la base des éléments de l'enquête. «Il est important d'aller au fond des choses pour voir ce qui s'est produit», a affirmé M.Thompson, sans dire à quelle échéance le grand jury rendrait sa décision. La famille d'Akai Gurley a pris la parole pour la première fois vendredi et a demandé justice. «Il n'avait rien fait de mal, c'est un homme bien, il aime sa famille, il aime sa petite fille», a dit en larmes sa mère, Sylvia Palmer. Le représentant de la famille, Kevin Powell, a lié la mort d'Akai Gurley à celles de plusieurs autres Noirs tués par la police ces dernières semaines aux Etats-Unis: «Nous estimons malheureusement que ça ressemble à une série de lynchages modernes», a-t-il affirmé. Après une cérémonie d'hommage au jeune père de famille dans l'après-midi à Brooklyn, plusieurs centaines de manifestants se sont ensuite rassemblés et ont bloqué la circulation vendredi soir à New York malgré la pluie. D'autres manifestations de protestation étaient aussi organisées à Miami, Chicago, Boston et La Nouvelle-Orléans notamment. Aux quatre coins du pays, les Américains de couleur disent leur émotion et leur colère, attisés par les images violentes de leurs pairs tués par des policiers à la peau blanche. Il s'agit de la troisième nuit consécutive de manifestations dans ces grandes villes américaines. Ces rassemblements sont pour la plupart pacifiques, de nombreux manifestants se contentant de s'allonger sur le sol, comme s'ils étaient morts. «La vie des Noirs compte», ou «Le racisme tue», disent leurs pancartes. Plus de 200 personnes avaient été arrêtées dans la nuit de jeudi à vendredi à New York, la plupart pour trouble à l'ordre public après avoir bloqué le trafic routier. Ces trois nuits de manifestations interviennent après qu'un grand jury a décidé de ne pas poursuivre un policier blanc impliqué dans la mort d'un Noir de 43 ans, Eric Garner, à Staten Island, un quartier de New York, en juillet dernier. Outre Akai Gurley et Eric Garner, trois autres affaires récentes ont vu des policiers blancs abattre des Noirs non armés. Et jeudi soir encore, un policier blanc a abattu à bout portant un homme noir qu'il tentait d'interpeller à Phoenix (Arizona). «Nous sommes confrontés à des problèmes qui sont réellement de portée nationale et qui menacent le pays tout entier», avait récemment reconnu Eric Holder, le ministre de la Justice, lui-même afro-américain. Des réformes de la police seront conduites partout où les enquêtes sur de possibles motivations racistes diront que c'est nécessaire. Une vingtaine d'enquêtes sont en cours.