En toile de fond de ce sommet qui a failli ne pas se tenir à Doha, figurent la situation en Irak et en Syrie, l'aggravation des violences au Yémen et l'effondrement des cours du pétrole. Les dirigeants des monarchies pétrolières du Golfe se réunissent hier au Qatar pour leur sommet annuel après neuf mois de querelles qui ont été mises en sourdine face à la menace des groupes jihadistes et l'influence grandissante de l'Iran. «Le simple fait que cette réunion ait lieu» et que l'ensemble des dirigeants du Golfe se retrouvent à la même table «est en soi déjà un succès», a déclaré un responsable qatari sous couvert d'anonymat. La crise qui a éclaté en mars 2014 avec le rappel des ambassadeurs saoudien, émirati et bahreïni en poste à Doha est la plus grave à laquelle a été confronté depuis sa création en 1981 le Conseil de coopération du Golfe (CCG) qui regroupe Arabie saoudite, Bahreïn, Emirats arabes unis, Koweït, Oman, Qatar. Riyadh, Abou Dhabi et Manama ont accusé Doha de déstabiliser la région par son soutien aux Frères musulmans, notamment en Egypte, et d'accorder l'asile à des opposants islamistes hostiles à leurs régimes. Une réconciliation a été scellée en novembre et s'est concrétisée par l'annonce du retour des trois ambassadeurs du Golfe à Doha. Elle a été rendue possible par une médiation koweïtienne et surtout par le repositionnement du «grand frère» saoudien qui s'est placé au milieu du jeu pour faire taire les «divergences» arabes, en particulier entre le Qatar et l'Egypte. Il y a eu clairement une volonté des pays du Golfe de dépasser leurs désaccords face aux enjeux vitaux de la région, en particulier les conflits en Irak, Syrie et Yémen, le danger représenté par les groupes jihadistes pour leur propre sécurité et les tentatives prêtées à Téhéran de profiter de la situation pour accroître son influence régionale, estiment des analystes. Pendant des mois, l'Arabie et les Emirats ont tenté d'arracher des concessions au Qatar, «l'enfant terrible» du Golfe, pour qu'il démontre, par des actes, l'arrêt de son soutien à des «groupes extrémistes». Certes, il y a eu des gestes de Doha pour favoriser «l'unité», mais pas de volte-face radicale, affirment des experts. Le sommet d'hier s'inscrit dans la mise en oeuvre d'une désescalade progressive, ajoutent-ils. Le sommet de Doha devait initialement s'étaler sur deux jours, mais le comité d'organisation a annoncé lundi soir que la réunion ne se tiendrait que sur la seule journée d'hier, sans donner d'explication. La plupart des membres du CCG font partie de la coalition internationale conduite par Washington et qui mène des frappes en Irak et en Syrie. Le Qatar abrite le centre de commandement des opérations, tandis que l'Arabie et les Emirats ont mené de multiples raids aériens contre les jihadistes du groupe Etat islamique. Les leaders du Golfe doivent discuter des moyens de mettre en oeuvre une plus grande coopération en matière de commandement militaire, d'activités navales et de force de police conjointe, a indiqué le secrétariat du CCG. Les dirigeants doivent aussi examiner les progrès réalisés dans la mise en oeuvre de plusieurs accords dans le domaine du contre-terrorisme, signés par les Etats du CCG, a ajouté le secrétariat. Un accord d'union douanière doit également être évoqué. Il est censé entrer en vigueur le mois prochain mais, selon toute vraisemblance, sa mise en oeuvre devrait être retardée. En toile de fond du sommet figure enfin la chute vertigineuse du cours du pétrole qui représente 90% des revenus publics du CCG. Le prix du brut a perdu 40% depuis juin. Cela veut dire que les pays du CCG pourraient perdre environ 300 milliards de dollars, par comparaison aux revenus de 730 milliards engrangés l'année dernière.