Dernières ligne droite pour deux caciques de la politique tunisienne Les deux candidats en lice pour ce 2e round ont enflammé les débats qui ont été marqués par un affrontement verbal, l'expression d'états d'âme, transgressant même la présentation des programmes. La campagne électorale du 2e tour entame sa dernière ligne droite. Les deux candidats en lice pour ce 2e round ont enflammé les débats qui ont été marqués par un affrontement verbal, l'expression d'états d'âme, transgressant même la présentation des programmes. Le président provisoire de la République inscrit son combat dans «la lutte entre révolutionnaires et contre-révolutionnaires», s'attribuant bien entendu le beau rôle. Néanmoins, la campagne électorale se recentre sur les franges d'un électorat indécis et sur une autre frange où le président sortant rechignait à s'aventurer, mais où il espère grappiller encore quelques voix. Evidemment, Moncef Marzouki s'est posé tout au long de son mandat présidentiel et de sa campagne du premier tour comme l'exacte antithèse de son concurrent, «Bejbouj». Il chasse aujourd'hui sur les terrains de ce dernier. En tout cas, seule une victoire passe par un large rassemblement des forces nationales. Hormis le parti Ennahda qui a des affinités particulières avec le parti de Marzouki, très peu de partis et de personnalités se sont bousculés pour soutenir le candidat Moncef Marzouki. Même si on murmure qu'Ennahda ne soutiendra pas officiellement Marzouki, la marée humaine qui n'a pu accéder à la Coupole d'El Menzeh, dimanche dernier, pour assister au meeting de Marzouki, laisse présager une éventuelle surprise aux suffrages. La raison? Ceux qui ont assisté au meeting de Marzouki à El Menzeh étaient les sympathisants et membres aussi bien du CPR, parti de Marzouki, que d'Ennahda. Rappelons que le président sortant a affirmé récemment que «sans falsification, le candidat Béji Caïd Essebsi ne gagnera pas au scrutin présidentiel». Prenons la juste mesure de cette auto-confiance de popularité! Le président provisoire de la République, apparut, lors du premier tour de l'élection présidentielle, comme le candidat de substitution d'Ennahda, qui n'a pas présenté de candidat. Le climat de coopération parlementaire, entre les deux grands partis, lors de la journée fondatrice du 4 décembre, suscite une prise de distance du parti islamiste. Sans appeler à voter Béji Caïd Essebsi, elle peut plutôt encourager l'abstention. Si on examine la situation actuelle, Ennahda montre une volonté de ne pas soutenir le président sortant. Un vote favorable risquerait de l'ériger en grand acteur, à ses dépens et avec son électorat. D'autre part, elle souhaiterait que Béji Caïd Essebsi ne bénéficie pas d'un score élevé. Actuellement, seulement six points séparent les deux candidats. Du coup, la surprise n'est pas à écarter même si Marzouki a été chassé par des jets de chaussures et des «dégage» lors de son meeting au Kef. Béji Caïd Essebsi, lui, se présente comme l'homme du rassemblement. Il cultive son image du sage. Chez le président provisoire, la frontière est parfois tenue entre la combattivité et la surenchère. Les rencontres de Beji Caïd Essebsi avec la jeunesse, mardi dernier, et sa visite de la zaouïa Chadliya, où il a été reçu, en guest-star, le lendemain, attestent qu'il est davantage dans une logique d'écoute. Pour les partisans de l'Etat civil et de la modernité, il incarne la valeur refuge, face à la crainte de l'établissement de la théocratie. Pour une partie des Tunisiens, «Caïd Essebsi rassure, quand Marzouki inquiète». Retour de la conscience, après plusieurs jours de tractations, le Front populaire appelle ses électeurs à participer massivement au deuxième tour et les exhorte à «barrer la route au candidat Moncef Marzouki à cause de son discours de division». Mais son soutien à Caïd Essebsi reste ambiguë: Le Front populaire «posera ses conditions dans le cas d'un soutien au candidat Béji Caïd Essebsi». Il semble ainsi conditionner son soutien à la nature des relations Nidaa Tounès/Ennahda. Sans donner carte blanche à Caïd Essebsi, le Front écarte, sans ménagement, la candidature de son concurrent. Dans ces conditions, vu «la neutralité» du parti Ennahda et du soutien de fait du Front populaire, la victoire de Béji Caïd Essebsi semble assurée.