Point d'officiels marocains à la marche Que cache cette pirouette? Ce n'est en fait que le prolongement d'une crise diplomatique entre Paris et Rabat. Une brouille qui a pour origine l'affaire dite de la «gifle de Neuilly». Le chef de la diplomatie marocaine met en exergue le même motif qui a conduit orédaction du journal satirique Charlie Hebdo pour légitimer son incartade. Il a justifié sa volte-face par la présence de Caricatures du prophète (Qsssl) brandies par les participants à cette manifestation. Un argument qui n'a pas offensé outre mesure le représentant du gardien des Lieux Saints de l'Islam (Nizar al-Madani, N°2 de la diplomatie saoudienne) qui a battu le pavé à Paris. Le Maroc a préféré tourner le dos à cette condamnation par la planète entière du terrorisme pour des considérations d'ordre religieux, alors que des représentants du monde musulman et non des moindres tels que la reine Rania et le roi Abdallah II de Jordanie, Mahmoud Abbas le chef de l'Autorité palestinienne, les Premiers ministres turc et tunisien ou Mohammed bin Hamad al Thani, frère de l'émir du Qatar ont publiquement affiché leur rejet de la barbarie. Pourquoi le Maroc a refusé de se joindre à eux? «La délégation marocaine a présenté dimanche à l'Elysée les sincères condoléances du Royaume du Maroc à la France, mais n'a pas pris part à la marche organisée à Paris en raison de la présence de caricatures blasphématoires du prophète», indique pour toute explication, un communiqué de l'ambassade marocaine à Paris. La même logique utilisée par les frères Kouachi, auteurs du carnage qui a ciblé la rédaction de Charlie Hebdo. La diplomatie marocaine et l'idéologie terroriste qui s'est érigée en gardienne du Saint Coran se télescopent. Une autre façon pour elle d'adouber cette barbarie dont les images ont été relayées par toutes les télévisions du monde sans qu'elle en ait pris la mesure. Ce qui aggrave davantage son cas. L'attitude du Royaume chérifien vis-à-vis d'un pays endeuillé, traumatisé, considéré comme un de ses soutiens traditionnels inconditionnels ne peut être interprétée que comme une trahison. Indélicat, inamical. Le Maroc qui s'est toujours plaint d'une hypothétique incursion de Daesh sur son territoire pour montrer ses muscles et déployer tout un arsenal de guerre pour protéger son territoire contre des ennemis imaginaires pour mener une campagne d'agressions verbales d'une violence extrême contre l'Algérie en l'occurrence, a raté une occasion en or pour justifier ses apitoiements et montrer sa compassion à un pays ami meurtri par des actes terroristes d'une sauvagerie inégalée. Au lieu d'en faire la démonstration, le chef de la diplomatie marocaine a préféré tourner les talons. Battre en retraite. Que cache cette pirouette? Ce n'est en fait que le prolongement d'une crise diplomatique entre Paris et Rabat qui n'en finit plus. Une brouille qui a pour origine l'affaire dite de la «gifle de Neuilly». La glaciation diplomatique entre les deux capitales avait connu son summum au mois de février 2014 suite à des plaintes déposées contre le chef du contre-espionnage marocain. L'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (Acat) avait saisi l'opportunité de la présence en France du patron du contre-espionnage marocain, Abdellatif Hammouchi, pour demander aux autorités d'entendre ce responsable, qu'elle accuse de «complicité de torture». Sept policiers s'étaient rendus à la résidence de l'ambassadeur du Maroc à Paris pour notifier à ce haut responsable une convocation émanant d'un juge d'instruction sans passer par les canaux diplomatiques. Le Maroc l'a ressentie comme une humiliation et ne l'a pas digérée. «Notre sentiment est qu'il n'y a pas chez notre partenaire français de volonté politique réelle de faire obstacle aux manipulations anti-marocaines émanant de milieux connus pour leur hostilité à notre encontre. C'est cette absence d'engagement et de détermination, cette frilosité, cette sorte de porosité constatée au coeur même du pouvoir vis-à-vis des pressions de certains lobbies qui portent atteinte à la sérénité de notre relation» a déclaré le ministre marocain des Affaires étrangères, Salah Eddine Mezouar, dans une récente interview accordée au magazine Jeune Afrique dans laquelle il blâme la France dans les différends qui l'opposent au Maroc. Des sautes d'humeur qui portent le sceau royal. Mohammed VI, dont le voyage à New York avait été annoncé en grande pompe pour participer à la 69e session de l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations unies, qui s'est tenue à la fin du mois de septembre, a dû être annulé sans explications, hormis celle d'avoir été contrarié sur la question du Sahara occidental. Une marque de fabrique de la diplomatie marocaine.