A la proclamation de Novembre, il était des premiers noyaux de l'ALN-FLN. Hier matin, l'horloge avait sonné ses trois coups et le moudjahid Ali Zaâmoum, 72 ans, a rejoint les cohortes de martyrs. Il était trois heures à l'hôpital Paul-Brousse, quand le vieux chêne, admis depuis quelques semaines, transféré en catastrophe sur Paris, rendit l'âme. La Kabylie a perdu un des grands témoins du combat pour la libération. Le Djurdjura n'entendra plus la douce et grave voix d'Ali Zaâmoum. Le sort a voulu que l'enfant de Novembre, ce fils de la Toussaint, s'éteigne doucement dans un hôpital parisien. Ali Zaâmoum, fils d'instituteur et frère du colonel Si Salah de la Wilaya IV, a eu une vie bien remplie. Très tôt, il s'engage dans le mouvement national en militant au PPA Mtld d'abord et dans l'organisation spéciale ensuite. A la proclamation de Novembre, Ali Zaâmoum était des premiers noyaux de l'ALN-FLN. Il a ainsi, sur l'ordre de Krim Belkacem, convoyé, le journaliste Laïchaoui jusqu'à Ighil Imoula, dans la daïra actuelle des Ouadhias, pour tirer la proclamation de Novembre. A partir de cette année sacrée, Ali Zaâmoum sillonne les monts et vaux de Kabylie, en qualité de lieutenant du chef de ce qui fut la zone de Kabylie: Krim Belkacem. Arrêté les armes à la main, et après seulement qu'il eut épuisé ses munitions, en février 1955, le moudjahid Ali Zaâmoum est tour à tour emprisonné et condamné à mort par le tribunal militaire français à Tizi Ouzou, Serkadji, El Harrach, Lambèse puis dans les prisons françaises, dont Fresnes et la Santé. Ali était considéré comme un élément dangereux. A sa libération, après le cessez-le-feu, en mars 1962, Ali Zaâmoum devient le premier préfet du département de la Grande-Kabylie, puis il se retrouve comme patron de l'usine textile de Draâ Ben Khedda qu'il finit par quitter à la suite d'un clash avec Belaïd Abdeslam, alors puissant ministre de l'Industrie. Il se retrouve par la suite à occuper de multiples postes de responsabilité au ministère du Travail. Ali Zaâmoum rencontre deux êtres de lumière en ces temps-là: Kateb Yacine et M'hamed Issiakhem. Grâce à l'appui de Zaâmoum, Kateb créa la troupe Action culturelle des travailleurs. Ce groupe présenta, entre autres: Mohamed, prends ta valise, La guerre de 2000 ans... Cette rencontre marque Ali Zaâmoum qui conserve avec les deux hommes de culture des relations très intenses. A sa retraite, Ali Zaâmoum, qui ne savait pas ce que le terme «se reposer» voulait dire, rejoignit définitivement Ighil Imoula. Là, il participa activement à la construction de la stèle de Novembre. Plus tard, il créa l'association d'aide aux démunis «Taghmats», sise à Boghni. De sensibilité gauchisante, Ali Zaâmoum a su rester équidistant des partis politiques, y compris le FLN. Il a toujours essayé d'apporter son écot pour le développement de la région. Une région qu'il avait au coeur. Les monts du Djurdjura que les pas du moudjahid ont foulés, les coeurs des déshérités qu'Ali Zaâmoum a secouru, pleureront la disparition d'un grand homme. Un grand homme qui a su rester humble parmi les humbles. La Kabylie, en particulier, et le pays viennent de perdre un être de lumière.