Après quatre années de guerre, la Syrie est devenue un pays en ruine Opposant au départ les rebelles au régime, le conflit s'est fortement complexifié avec la montée en puissance des groupes jihadistes, essentiellement de l'EI à partir de 2013. Alors que la guerre en Syrie entre dans sa cinquième année, l'insurrection contre le régime et les souffrances de la population sont éclipsées par les atrocités commises par les jihadistes du groupe Etat islamique. Le 15 mars 2011 débutait, en plein Printemps arabe, le mouvement de contestation pour des changements démocratiques dans un pays tenu d'une main de fer par Bachar al-Assad. Quatre ans plus tard, la Syrie n'entrevoit pas la fin d'un conflit dévastateur qui a fait plus de 210.000 morts et poussé à la fuite plus de 10 millions de Syriens. Le pays tout entier s'est écroulé, l'économie et les infrastructures ont été en bonne partie détruites, la faim est devenue le lot quotidien de nombreux Syriens dont plus de 12 millions ont besoin d'une aide humanitaire. Opposant au départ les rebelles au régime, le conflit s'est fortement complexifié avec la montée en puissance des groupes jihadistes, essentiellement de l'EI à partir de 2013. «Pendant les premières années de la révolution, on avait deux camps clairement identifiés», résume Karim Bitar, de l'Institut de relations internationales et stratégiques basé à Paris. «Aujourd'hui c'est un peu la guerre de tous contre tous, et on ne voit pas dans ce contexte quelle peut être la solution politique». La communauté internationale a découvert, avec horreur, les exactions des jihadistes qui se servent des réseaux sociaux pour revendiquer la décapitation d'otages, la crucifixion d' «infidèles» ou d' «espions», l'esclavage des femmes... Ils ont ainsi provoqué l'effroi avec la vidéo d'un pilote jordanien brûlé vif dans une cage parce qu'il participait à la coalition antijihadistes mise sur pied par les Etats-Unis en 2014 pour frapper l'EI. Ce mouvement, qui a proclamé un «califat» sur les territoires saisis en Syrie et en Irak, «est allé tellement loin dans l'horreur qu'il a réussi à persuader l'Occident que Daech (un acronyme de l'EI) incarnait l'ennemi absolu et que tout le reste était un moindre mal», analyse M.Bitar. Ce mouvement extrémiste a tout d'abord soigneusement évité d'affronter l'armée du régime. Ce n'est qu'en 2014, après avoir pris aux rebelles et à ses ex-alliés du Front Al-Nosra, la branche syrienne d'Al Qaîda, des régions de l'Est et du Nord, qu'il a commencé à combattre les forces syriennes. Entre-temps, des combattants étrangers sont arrivés par milliers gonfler les rangs des jihadistes, renforçant encore l'inquiétude en Occident. Ce contexte a profité au régime syrien, désormais considéré en Occident comme un partenaire potentiel dans la lutte contre l'extrémisme. En 2013, il a réussi à éviter in extremis une intervention militaire étrangère, en consentant à un accord porté par Washington et Moscou sur la suppression des stocks d'armes chimiques, après la mort de 1.400 personnes dans une attaque d'une zone rebelle près de Damas. Ces derniers mois, les voix appelant au départ de M.Assad se sont faites moins fortes. Et l'envoyé spécial de l'ONU, Staffan de Mistura, a été jusqu'à déclarer en février qu'il faisait «partie de la solution». Dans une interview diffusée début mars par une chaîne portugaise, M. Assad a lui de nouveau dépeint le soulèvement de 2011 comme un complot occidental et répété qu'il n'était pas «un dictateur qui tue son peuple». «On en vient de nouveau à considérer, comme avant les révolutions arabes, que l'autoritarisme est un moindre mal et qu'il faut faire avec», souligne M. Bitar. L'Armée syrienne libre, un temps ossature de la rébellion appuyée par l'Occident et qui avait enregistré des victoires contre le régime, est désormais réduite à une alliance de petits groupes sans moyens.