Beaucoup de choses ont été dites sur le drame du World Trade Center, mais tout a-t-il été dit? Observateurs et analystes politiques n'ont pas cessé durant ces trois dernières années de se demander le pourquoi et le comment d'une telle tuerie. Pourquoi les Etats-Unis, comment cela a pu se faire aux Etats-Unis, le pays le mieux protégé du monde? Aussi, des zones d'ombre subsistent-elles dans ces attaques contre New York et Washington, lorsque les pouvoirs publics américains, loin d'avoir tout dit sur les tenants et aboutissants de ces opérations terroristes, semblent en fait, en avoir saisi le prétexte pour reconfigurer la nouvelle carte politique mondiale afin de conforter leur hégémonie sur le monde en tant qu'unique grande puissance mondiale. De fait, le terrorisme, qu'accompagnent nuisances et violences, n'est pas apparu subitement le 11 septembre 2001 pour frapper les Etats-Unis en particulier, mais ces derniers en tant que symbole du nouveau monde tel qu'il se dessinait après l'effondrement de l'empire soviétique. En conséquence, au moment où les Etats-Unis célèbrent le troisième anniversaire de cette tragique journée du 11 septembre 2001, le questionnement demeure encore et toujours, pourquoi Washington plutôt que de saisir cette tragique occasion pour impliquer le monde, - c'est-à-dire la communauté internationale à travers les Nations unies-, dans la lutte contre le terrorisme international a préféré faire cavalier seul, choisissant ses cibles et ses priorités. Ainsi, l'ONU a-t-elle été écartée de cette guerre qui s'annonçait contre la terreur venue du fond des âges, Washington ayant décidé d'autres opportunités qui, à l'évidence, n'étaient pas celles de la communauté internationale, en concentrant ses efforts sur ce que le président George W.Bush appelait alors «l'axe du mal» qui était l'Irak, la Corée du Nord et l'Iran. Al-Qaîda, la nébuleuse islamique avait à l'époque revendiqué la responsabilité des attaques terroristes contre le World Trade Center, qui ont fait près de 3000 victimes. Al-Qaîda qui n'est ni un Etat ni un pays, mais un regroupement de gens fanatisés, nécessitait en fait une autre approche et une prise en compte plus dynamique du problème avec la contribution de l'ensemble de la communauté internationale. Loin d'avoir été le cas, la lutte contre le terrorisme s'est réduite durant plusieurs mois à un bras de fer entre Washington et ses alliés européens peu convaincus des priorités que se sont tracées les USA, lesquels se sont lancés dans une véritable croisade contre le régime de Saddam Hussein, détournant le monde du danger immédiat qu'était le terrorisme international. De fait, Oussama Ben Laden, - introuvable trois ans après l'attaque anti-américaine à New York -, narguait, dans un message diffusé le 7 octobre 2001, les Etats-Unis, en déclarant «Voilà l'Amérique frappée par Allah dans son point le plus vulnérable (...) Je jure que l'Amérique ne connaîtra plus jamais la sécurité avant que la Palestine ne la connaisse et avant que toutes les armées occidentales athées ne quittent la terre des lieux saints». Or, malgré les coups, estimés mortels, donnés à Al- Qaîda et à ses membres un peu partout dans le monde, la nébuleuse islamiste ne semble pas avoir perdu de sa pugnacité continuant à semer l'effroi et la terreur sur le monde. En réalité, la lutte contre Al-Qaîda et le terrorisme international ont été si mal menés, que de nombreux analystes demeurent sceptiques quant aux chances de venir rapidement à bout de ce chancre. Des experts estiment dans un rapport, rendu public à la fin du mois dernier par l'ONU, que «Les perspectives de voir une fin rapide du terrorisme lié à Al-Qaîda sont nulles. En utilisant des ressources minimales et en exploitant leur publicité mondiale, ils (les terroristes) ont réussi à créer l'impression d'une crise internationale». En marginalisant les Nations unies, - quand elles n'ont pas été éliminées de ce combat - , les Etats-Unis, un peu égoïstement, ont d'abord cherché à conforter leur leadership et leur suprématie sur le monde en tant que seul et unique chef de file des affaires de notre monde. Et la guerre que Washington a imposé à l'Irak, à contresens des urgences du moment, participait à la reconfiguration du monde au seul bénéfice des Etats-Unis, qui tirèrent largement profit de la disparition de la puissante rivale soviétique. C'est cette divergence dans les priorités de l'heure qui a fait que le terrorisme a pu non seulement survivre à sa défaite en Afghanistan, mais aussi retrouver peu à peu toute la puissance de sa nocivité, élargissant même ses méfaits à d'autres régions du monde. En réalité, quand il fallait s'unir et être solidaires devant ce danger insidieux, les Etats-Unis ont choisi de faire cavalier seul, lorsqu'il fallut prévenir la montée en puissance de l'islamisme de combat, Washington à préféré temporiser. Très justement, le service de presse de l'ambassade des Etats-Unis à Alger, mettait en exergue le fait que les deux pays ont été touchés par ce phénomène terroriste, indiquant «Les Algériens comprennent la menace terroriste qui pèse sur le monde, de ce fait, nos deux pays mènent un combat commun». Certes! Toutefois, si nous comprenons la menace qui pèse sur les Etats-Unis et le monde, les Américains, en revanche, ont longtemps douté de la réalité de la nuisance terroriste en Algérie et n'ont pas compris que ce même chantage a pris, durant une décennie, les Algériens en tenaille, occasionnant des milliers de victimes parmi la population civile. Car en fait, la mémoire ne saurait être sélective et au moment où le monde a une pensée pour les morts de Ground Zero à New York, il faut espérer qu'il aura également une pensée pour les milliers de morts en Algérie et ailleurs dans le monde, victimes de cette nouvelle barbarie qu'est le terrorisme.