M.Boniface critique la politique de «démocratisation» des pays arabes dans le cadre du Grand Moyen-Orient. La question de l'évolution des relations internationales au lendemain de la guerre en Irak était, hier, au coeur d'une rencontre-débat animée par Pascal Boniface, directeur de l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) en France, en marge du 9e Salon international du livre d'Alger. En fin analyste, le collaborateur de Kofi Annan au désarmement, a passé en revue, ensuite, décortiqué les objectifs géostratégiques mis en orbite par l'administration américaine, en connivence, comme l'a-t-il bien souligné, avec Israël. Sous la bannière de la lutte mondiale - et unilatérale- contre le terrorisme, l'équipe de George W.Bush, en agressant le peuple irakien, n'a fait, soutient l'orateur, qu'exacerber, encore plus, le sentiment anti-américain et accroître l'hostilité des peuples arabes en général, contre l'Occident. Un sentiment, qui ne cesse, au fil des mois, de prendre de l'ampleur alors que le discours officiel américain parle, lui, de la libération du peuple irakien de la dictature que lui avait imposée Saddam Hussein. De fil en aiguille, M.Boniface critique la politique de «démocratisation» des pays arabes dans le cadre du Grand Moyen-Orient, que le président américain entend mettre en oeuvre dans la région. Une stratégie dont les desseins impérialistes et la volonté de normaliser les pays hostiles à Israël constituent l'essentiel de cette approche. Bien que souhaitée et largement partagée, la pratique démocratique dans les pays arabes ne saurait, selon ce dernier, s'instaurer par la force militaire comme c'est le cas actuellement en Mésopotamie. «On ne peut démocratiser un régime sous des pluies de bombes» assure M.Boniface qui insiste que seul de l'intérieur on pourra atteindre cette finalité. Au sujet du «choc des civilisations», une menace distillée par l'ancien président américain Bill Clinton et reprise, avec ardeur, par George Bush junior, l'orateur tout en n'excluant pas cette éventualité à long terme, balaie, pour l'instant, d'un revers de la main le risque d'affrontement entre les civilisations arabo-musulmane et occidentale. «C'est un discours véhiculé par les mouvements extrémistes qui traversent les deux camps» a encore précisé M.Boniface aux yeux de qui le chef d'Al Qaîda, Oussama Ben Laden et Paul Wolfwitz, numéro deux du Pentagone, et chef des néoconservateurs américains, mènent, chacun à sa manière, le même combat.