img src="http://www.lexpressiondz.com/img/article_medium/photos/P150420-11.jpg" alt=""Notre lutte n'a pas encore abouti"" / Saïd Khelil est un militant de l'amazighité de la première heure. Il fait partie des animateurs des évènements du Printemps berbère de Kabylie en 1980. Il a été militant actif du MCB. A l'ouverture pluraliste dite démocratique, Saïd Khelil a fait partie des chevilles ouvrières du Front des forces socialistes (FFS). Il a eu à assurer la fonction de secrétaire national du parti avant de le quitter en 1996. Plus tard, il crée le MDC (Mouvement pour la démocratie et la citoyenneté), pour enfin se consacrer à la cause identitaire et la question démocratique... L'Expression: Quel bilan faites-vous de la lutte pour la revendication identitaire depuis les événements d'avril 1980? Saïd Khelil: De prime à bord je dirai que c'est un bilan contrasté. 35 ans après les événements tragiques du 20 avril 1980, nous avons arraché certains acquis, mais beaucoup reste encore à acquérir. Aujourd'hui la question identitaire n'est plus un tabou. Nous avons enregistré des percées mais qui restent indignes du statut que doit avoir la question identitaire car elle est étroitement liée à la démocratie, alors que le pays ne s'est pas démocratisé. La question identitaire est inéluctablement liée à la question démocratique. Ce qu'il faut souligner aujourd'hui, c'est que notre lutte n'est pas encore arrivée à terme et tamazight n'a pas encore acquis la place qui lui sied. Beaucoup reste à faire pour cela, mais nous ne perdons pas espoir. Je pense qu'on n'a pas le droit d'abdiquer et de laisser le terrain. La donne est nouvelle certes, qui arrive avec la nouvelle génération. A nous de l'accompagner et de rester à ses côtés. Il s'agit de trouver les formes et les voies d'organisation intelligentes qui permettront de poursuivre la lutte de manière efficace et qui permettra d'atteindre les objectifs. Plus que jamais, il faut s'impliquer en accompagnant ces jeunes qui expriment le désir de continuer le combat. L'Etat doit rester à l'écoute de cette génération au risque de voir cette lutte se radicaliser et prendre d'autres formes ingérables. Quels sont les acquis de la nationalisation de tamazight et ses limites? Pas grand-chose je dirai d'emblée. Le fait de rendre cette langue nationale n'a pas apporté grand-chose à la dimension de la revendication identitaire. On s'est beaucoup plus intéressé à la forme en occultant le fond de la question. Le bilan parle de lui-même dès lors que la langue amazighe est de fait nationale. En l'intégrant dans la Constitution comme langue nationale, on a juste formalisé la donne, sans la régler définitivement. Tamazight est introduite dans le système éducatif depuis 1995, mais à titre facultatif, quelle évaluation faites-vous de l'enseignement de tamazight? L'enseignement à titre facultatif est un grand handicap pour la langue amazighe ou toute autre langue. Il faut la valoriser pour l'élève en la rendant obligatoire car sur le plan psychopédagogique le problème de dominance sur le plan pédagogique est réel. C'est frustrant de voir notre langue reléguée au statut de sous-langue dans notre système éducatif. On doit y remédier pour la rendre obligatoire et élargir son enseignement sur le territoire national. En dépit des avancées réalisées, la revendication identitaire est tributaire de l'officialisation de la langue amazighe... Pensez-vous que tamazight a une chance de devenir langue officielle dans la prochaine Constitution? J'ai toujours revendiqué l'officialisation de tamazight, mais j'avoue aussi que je ne crois pas à celle-ci. Ce n'est que de la poudre aux yeux pour endormir la lutte en vue de son officialisation. Beaucoup de résistance persiste encore dans le sérail. Ce n'est qu'un effet d'annonce. L'officialisation de tamazight s'impose. On a perdu beaucoup de temps. Il est temps de régler cette question pour passer à d'autres, car le chantier est immense pour bâtir un pays démocratique et un Etat de droit... Son officialisation voudra dire que nous pourrions nous exprimer en tamazight dans les institutions de l'Etat. Cela voudra aussi dire qu'elle aura sa place dans l'Ecole algérienne, que l'Etat doit lui octroyer un budget bien propre afin de pouvoir l'enseigner de façon adéquate. Nous demandons que tamazight ait le même statut que l'arabe. On doit travailler dans la sérénité totale pour régler cette question et construire l'avenir de nos futures générations sur de bonnes bases. Nous sommes partie prenante de toute solution qui prenne en charge les revendications que nous avons toujours défendues, à savoir l'identité amazighe de l'Algérie, le statut officiel pour la langue amazighe et bien entendu un projet qui va dans le sens de la construction d'un Etat de droit valorisant la citoyenneté.