«Les forêts précèdent les hommes, les déserts les suivent.» François-René de Chateaubriand On ne compte plus les voix qui s'élèvent aujourd'hui contre la gestion actuelle de l'aménagement du territoire: la Mitidja (en berbère, l'ensoleillée) est en voie de disparaître. Les surfaces arables se réduisent chaque jour comme une peau de chagrin: chaque jour des chantiers nouveaux accaparent des espaces verts tandis que s'évanouit l'ancienne bonne idée qui consistait à replacer la capitale du pays sur les Hauts-Plateaux. En parallèle, la délinquance avance... Il faudra prendre en considération les efforts fournis dans une stratégie globale scientifiquement élaborée, pour redonner à ce pays un aspect civilisé, à réconcilier le citoyen avec la géographie de son pays qui, pendant des années, a été mal servie par une administration ubuesque et qui a été victime de toutes sortes d'agressions illustrées par l'accaparement sauvage de l'espace ou par des opérations douteuses guidées par le seul souci du prestige... La première de ces agressions est illustrée par une poussée phénoménale du béton dans cette étroite bande verte qui constitue le nord du pays et qui est habitée par l'écrasante majorité de la population qui se presse dans des villes tentaculaires où chaque espace vert est vite happé par une administration aveugle et boulimique. Les ravages causés au littoral où d'imposants immeubles encerclent des plages rachitiques, n'ont d'égal que les stupides amas de béton et de briques qui ont poussé à une vitesse vertigineuse pendant les années de la tragédie nationale sur des terrains où jadis, il n'y a pas longtemps, l'oranger rivalisait avec le pêcher et où les plantes maraîchères formaient un grand tapis vert qui donnait envie, au voyageur aérien, de revenir au plus vite... C'était il y a longtemps, avant que les spéculateurs du foncier ne s'installent: le résultat est catastrophique. Ainsi, on peut constater de visu, sans avoir une véritable culture architecturale ou urbanistique, que les hideuses façades et les formes biscornues des ensembles hâtivement (car tout s'est fait à la hâte, comme si les entrepreneurs de cette criminelle opération avaient peur d'être surpris dans leur coupable tâche...) construits, enlaidissent le paysage jusqu'à influer sur le moral de l'habitant dont le comportement, inconscient certes, ira à la dérive, c'est-à-dire vers la négligence, le laisser-aller et des attitudes négatives. Les espaces verts ou sauvages ne sont pas les seules victimes de cette agression caractérisée causée par des prédateurs et encouragée par des «élus» ignares et incultes qui ont distribué, ici et là, des permis de construire au grand dam d'une administration centrale dépassée et mise devant le fait accompli: la qualité de vie va souffrir de cet état de choses. L'urbanisation rapide et désordonnée, la démographie galopante, le chômage, l'effacement du rôle d'un Etat régulateur durant quelques années vont porter un coup fatal à cette qualité de vie dont les bords de la Méditerranée attirent le touriste. Les transports anarchiques qui vont se développer pour les déplacements d'une population plus nombreuse, l'augmentation exponentielle du nombre de voitures individuelles, la multiplication des décharges sauvages, les incinérations en plein air d'ordures ménagères, le rejet des gaz toxiques et de produits chimiques dans les cours d'eau, l'insuffisance de l'entretien du réseau AEP, la multiplication des marchés illicites, l'insuffisance de stations d'épuration des eaux usées sur des oueds transformés en cloaques, le rétrécissement des surfaces boisées, la prolifération des animaux errants, tous ces phénomènes vont influer sur la santé physique et mentale du citoyen qui finira, grâce à une prise de conscience, par stopper le cours inexorable de sa descente aux enfers.