L'oeuvre de paix des frappes saoudiennes au Yémen Les fragiles initiatives diplomatiques ont jusqu'à présent tourné court, à l'image des pourparlers de paix qui devaient se tenir le 28 mai à Genève. Le retour de la paix au Yémen apparaît plus incertain que jamais avec le «report» par l'ONU d'une conférence qui devait réunir en fin de semaine à Genève les parties du conflit, qui continuent à s'affronter violemment. La situation sur le terrain n'a pas beaucoup changé deux mois après le lancement, le 26 mars, de la campagne de frappes aériennes par une coalition sous commandement saoudien pour empêcher les rebelles chiites Houthis de prendre le contrôle de l'ensemble du pays. Même si leurs capacités militaires ont été affaiblies, les Houthis et leurs alliés, les unités de l'armée restées fidèles à l'ex-président Ali Abdallah Saleh, contrôlent toujours la capitale Sanaa et de vastes régions dans le nord, le centre et l'ouest. Les fragiles initiatives diplomatiques ont jusqu'à présent tourné court, à l'image des pourparlers de paix qui devaient se tenir le 28 mai à Genève. «Je peux confirmer que la réunion a été reportée», a déclaré un responsable de l'ONU à New York, sans donner plus d'explications ni avancer une autre date. Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, avait annoncé cette réunion, en espérant qu'elle aiderait «à relancer le processus politique au Yémen, réduire le niveau des violences et soulager le fardeau humanitaire, devenu insupportable». Mais les contacts entrepris par le nouvel émissaire de l'ONU Ismaïl Ould Cheikh Ahmed, n'ont pas aidé à réduire la méfiance entre les protagonistes. Le diplomate a été reçu de nouveau dimanche à Riyadh par le président en exil Abd Rabbo Mansour Hadi après sa visite en Iran. Les rebelles ne reconnaissent pas l'autorité de M.Hadi depuis qu'ils l'ont poussé à la démission fin janvier en confirmant leur emprise sur la capitale, conquise le 21 septembre 2014. Le camp de M.Hadi, qui a pu réunir la semaine dernière à Riyadh des représentants des principaux partis politiques yéménites, exige, pour reprendre langue avec les Houthis, leur retrait de Sanaa et des autres villes, comme le stipule la résolution 2216 du Conseil de sécurité de l'ONU. «Cette résolution doit être appliquée pour favoriser ensuite un dialogue», a résumé le porte-parole du gouvernement en exil, Rajah Badi, jugeant «difficile» d'envisager des pourparlers «dans les conditions actuelles». Le report sine die des pourparlers de Genève intervient après un premier round de dialogue, parrainée par le précédent émissaire de l'ONU, Jamal Benomar. Mais ce dernier avait dû jeter l'éponge après avoir cru à une possible percée pour épargner à ce pays pauvre les affres de la guerre. Les espoirs nés de la trêve humanitaire de cinq jours initiée par Riyadh pour venir en aide à une population qui manquait de tout, ont été vite douchés. Le cessez-le-feu n'a pas été reconduit à son expiration le 17 mai, Riyadh accusant les rebelles d'avoir profité de la pause pour se renforcer. Les Yéménites ne se font plus d'illusions sur les risques d'une longue guerre par procuration entre le royaume saoudien sunnite à l'Iran chiite, à l'instar de la guerre en Syrie qui a fait l'objet de deux conférences infructueuses à Genève. «La conférence de Genève n'a pas réglé la crise en Syrie. Il y a eu Genève 1 et Genève 2 mais la guerre se poursuit depuis quatre ans», a déploré Abdel Wahed Mohsen, un habitant de Sanaa. «Des pourparlers à Genève n'auraient fait que prolonger le conflit» armé au Yémen, a renchéri Mohamed al-Fadhli, alors que la guerre continue de faire rage dans le pays, notamment dans le sud. Plusieurs quartiers résidentiels de Taëz (sud), troisième ville du Yémen, ont été lundi le théâtre d'affrontements, semant la panique parmi les habitants, selon des témoins. Ces combats, qui ont éclaté dimanche et se sont poursuivis dans la nuit, ont fait au moins trente tués dans le camp Houthis et cinq dans les rangs des combattants pro-gouvernementaux, selon un bilan provisoire donné par un responsable local.