Tous les moyens sont bons pour accéder au sésame Pour mettre toutes les chances de leur côté, certains candidats rajoutent à ces moyens technologiques des prières et des gris-gris, comme quoi tout est licite pour décrocher le bac. Le bac est l'examen le plus important dans la vie d'un élève. Le stress est donc l'état d'esprit général de tous les candidats qui s'apprêtent à passer les épreuves fatidiques dans moins d'une semaine. L'anxiété a atteint son paroxysme chez ces jeunes élèves. La pression des parents n'est pas là pour arranger les choses. Ce qui pousse certains candidats à l'extrême pour un bac à tout prix... On vous raconte le mois de «mise au vert» des candidats qui n'est pas le même pour tout le monde... Appréciez plutôt! Pour être prêts le jour J, les candidats se sont investis, corps et âme dans les révisions. Mais pas seulement! Certains qui ont voulu mettre toutes les chances de leur côté, ne se sont pas contentés de réviser. Ils ont usé de rituels insolites les uns plus que les autres. Ce n'est un secret pour personne que les coeurs battent la chamade au fur et à mesure qu'approche l'échéance tant redoutée. Beaucoup de candidats se «réfugient» en cette période dans la religion. La prière fait «fureur» chez les candidats. D'où la blague populaire de l'imam qui vient pour faire son prêche à la veille du bac et ne trouve pas de place pour rejoindre son «minbar». Il réussit quand même à se frayer un chemin et après maints efforts, il y arrive et prend le micro: «S'il vous plaît, les candidats du bac mettez-vous derrière.» Jusque-là rien de grave, bien au contraire. Ce qui est grave par contre, ce sont certaines prières «miracles» qui s'échangent sur les réseaux sociaux. «Lisez cette prière vous allez avoir le bac», peut-on lire sur un forum de lycéens qui fait référence à une «daâwa» (prière) que l'on doit lire tous les jours avant de dormir. Cette prière est censée nous faire découvrir dans nos rêves les sujets du bac. Mais cela reste bien sûr une illusion. D'autres prières doivent être lues avant de rentrer en salle d'examen... Tout est bon à prendre... Mais plus grave encore, certains recourent à la magie noire qui croient-ils leur permettrait d'arracher le fameux sésame. C'est le cas de Fadia qui est allée voir une voyante (chouafa) pour qu'elle lui prépare une potion magique! Ce qui fut fait, monnayant la modique somme de 3500 dinars. «Ce n'est pas cher pour avoir son bac», nous dira naïvement cette jeune-fille. Le gri-gri préparé à Fadia est une potion magique aux ingrédients inconnus qu'elle doit prendre tous les soirs. Mais pour le prix qu'elle a eu à payer, Fadia a aussi eu droit à une amulette en peau de lézard qui contient un écrit magique. Cette amulette, Fadia doit l'avoir sur elle pendant les examens. Avec la potion ingurgitée, le tour est joué! Elle est prête pour le bac. Et les révisions dans tout cela? «Rabbi idjib»... Pendant que certains recourent à la magie, d'autres se tournent vers le dopage. Boissons énergisantes, calmants, vitamines. Voilà à quoi «carbure» Farid, lui qui semble être plus dopé que Lance Armstrong. Ce sont, en effet, des pratiques comparables à celles des sportifs auxquelles s'adonnent les candidats au bac pour supporter le stress et améliorer leurs perfor-mances. D'ailleurs, les pharmaciens ont depuis longtemps flairé l'aubaine: à l'approche du bac, ils garnissent leur devanture de produits supposés donner, au choix, une pêche d'enfer ou une mémoire d'éléphant aux jeunes candidats confrontés au stress des examens et sommés de maîtriser le jour J tout le programme. Le marché est juteux. Tout comme celui des boissons énergisantes qui envahissent les étals des épiciers et autres supermarchés. Elles sont devenues une véritable mode. On trouve toutes les marques et toutes les formes. Elles sont censées donner l'énergie nécessaire pour réviser et stimuler la mémoire afin de mieux retenir. Or, ces pratiques n'ont aucune efficacité scientifiquement avérée. Nos candidats au bac montrent aussi leur savoir-faire dans les nouvelles technologies. Ils ont adapté les méthodes de copiage à leur temps. Fini les anti-sèches classiques, on parle désormais de cours miniaturisés, calculatrices intelligentes et surtout de kits mains libres. Ce dernier est même la star de cette année. Apanage des demoiselles en hidjab qui peuvent le dissimuler sous leur foulard, les garçons vont pouvoir bénéficier cette année de cet «accessoire de triche» avec l'apparition sur le marché des kits mains libres micros bluetooth. Ce produit est en train de s'écouler comme des petits pains ces derniers jours en Algérie. Que ce soit sur Internet ou dans les magasins de téléphonie mobile, certains candidats au bac vont acquérir ces kits mains libres sans fil, pratiquement invisibles qui sont vendus à partir de 2000 DA. Ils espérent ainsi pouvoir communiquer avec quelqu'un de l'extérieur pour les aider à tricher. D'autres par contre, ont tout simplement choisi de numériser leurs cours sur leurs smartphones dans l'espoir de pouvoir les consulter le jour J, ce qui semble déjà très compliqué, voire impossible. Rafik, lui, a été plus intelligent. Il a combiné la méthode classique avec la technologie. Il a sélectionné les cours qu'il soupçonne de figurer dans les sujets du bac en miniature. Il les a imprimés. «Maintenant je n'ai plus qu'à cacher ces bouts de papier dans un endroit d'où je pourrais aisément les tirer pendant les examens», avoue-t-il. Mais pour tricher, Rafik ne fait pas dans le détail. Il prend en compte toutes les possibilités. Il s'est ainsi rendu sur le Net pour trouver des sites et forums qui pourraient éventuellement l'aider à améliorer sa «méthode». La tricherie s'adapte à son temps «Sur Internet j'ai trouvé un site qui propose diverses méthodes pour tricher aux examens. Je me suis régalé...», raconte-t-il avec un sourire qui en dit long sur ce qu'il a pu «piocher». Mais il refuse de nous donner plus de détails. «Je ne vais pas vous dire plus, j'ai pas envie que mes surveillants lisent votre article et me débusquent», assure-t-il. Un petit tour sur le site Internet dont nous a parlé Rafik et on se rend compte que c'est le véritable «paradis» des tricheurs. Des milliers d'astuces y sont proposées. Des vidéos et des diaporamas sont même là pour illustrer comment elles peuvent être réalisées! Rafik, le génie de la triche, n'est pas un cas isolé. Fifi va aussi recourir à la triche pendant cette semaine du baccalauréat. Elle est confortée par la «réussite» de son frère qui, dit-elle, n'a obtenu son bac que par la tricherie. Elle raconte les exploits de son frère qui a eu son bac dans «les toilettes de son centre d'examen». «Il avait caché des sujets au niveau des sanitaires du centre d'examen. Et avec ses copains, ils se sont entendus à ce qu'ils sortent aux toilettes à la même heure. Sur place, ils tiraient leurs cours et s'échangeaient les réponses. C'est parti comme ça jusqu'à la fin du bac. Et il l'a eu», relate-t-elle. Le copiage semble donc une histoire de famille pour Fifi! Comme Fifi et Rahim, des milliers d'autres élèves ont préparé leur plan spécial tricherie. Ils n'ont rien à perdre. Comme ils le disent si bien: «Wache sar li aâmrou marbah?» (que perd-il celui qui n'a jamais rien gagné?). Alors, ils tenteront le tout pour le tout, ce qui risque de perturber leurs camarades qui eux ont révisé sérieusement. Alors aux surveillants d'être vigilants et de s'adapter à leur temps. La tricherie se modernise... Elle s'est adressée à ceux qui seraient tentés par la triche Les sévères mises en garde de Benghebrit Ce sera tolérance zéro avec les tricheurs. La ministre de l'Education nationale, Nouria Benghebrit, qui ne veut pas voir le scénario de 2013 se répéter avec une fraude généralisée a instruit les surveillants à faire preuve de la plus grande sévérité. Un plan anti-fraude a été préparé par ses services. D'ailleurs, elle ne rate pas une occasion pour mettre en garde les candidats à la fraude et rappelle les sanctions appliquées depuis des années. «Le candidat paie un prix extrêmement cher» prévient-elle. «Si la fraude est avérée, les procès-verbaux vont être individualisés au niveau des classes. Il vaut mieux repasser son bac que d'être frappé de sanction entre trois et cinq ans pour le candidat scolarisé et dix années pour le candidat libre», met-elle en garde. Espérons juste que madame la ministre ait conscience de l'ingéniosité des fraudeurs en herbe...