Mise à plat. Bien étrange que cette déclaration du nouveau ministre des Transports, Boudjemaa Talai. De Mascara où il était en visite, samedi dernier, il a annoncé qu'une «réflexion» était en cours sur le transport maritime (voyageurs et marchandises) entre Oran et Annaba via Alger. En clair, l'Algérie ne profitera pas de sitôt de l'extraordinaire potentiel que représente son littoral long de 1200 km. Car parler de «réflexion» en juin 2015 alors qu'en juin 2014, son prédécesseur, Amar Ghoul, avait annoncé, en marge d'une sortie de promotions de l'Ecole nationale supérieure maritime de Bou-Ismaïl, le «lancement prochain» du transport (maritime) inter-wilayas du littoral. Il avait même ajouté qu'en plus «de la concrétisation du transport maritime urbain au niveau des grandes villes côtières, afin de désengorger la circulation routière, (il y avait) une option pour un transport maritime de plaisance, destiné à la découverte du littoral algérien». Alors qu'on attendait depuis une année ce «lancement» voilà que le nouveau ministre nous replonge dans la «réflexion». Déduction: soit le «lancement» annoncé en juin 2014 n'était pas bien «réfléchi» ou alors d'autres considérations freinent l'autoroute maritime. Des considérations pas forcément techniques puisque notre pays dispose déjà de 10 ports commerciaux et de cinq gares maritimes (Oran, Alger, Béjaïa, Skikda et Annaba). Des gares maritimes qui ont permis, pour la seule période allant du 26 juin au 15 septembre 2014, pas moins de 276 dessertes vers Marseille, Alicante et Gênes. Pour le transport des voyageurs s'entend. Qu'il vienne de Marseille ou d'Oran, un bateau de voyageurs peut accoster à Annaba. Idem pour les marchandises avec les 10 ports existants. Plus étrange encore, la Cnan et après avoir procédé, en janvier dernier, à «la réouverture de deux lignes de transport maritime de marchandises reliant des ports algériens avec ceux du Portugal et des Etats-Unis» avait annoncé, en mars dernier, la création d'une filiale «chargée du transport maritime urbain». Et puis patatras, Talai nous replonge dans la «réflexion». Mais réfléchir de quoi, on vous le demande? Il est vrai que la Cnan ne dispose que de quatre navires marchands («Saoura», «Stidia», «Sedrata» et «Kherrata»). Il est vrai aussi que l'Entmv ne possède que trois navires de transport de voyageurs («Tarik Ibn Ziad», «Tassili II» et «Djazaïr II»). Comme il est vrai que ces deux entreprises affrètent, auprès d'armateurs étrangers, des navires en période de pointe. C'est le cas notamment de l'Enmtv à chaque saison estivale. Partant de cet inventaire, la «réflexion» du ministre pourrait signifier «report» qu'oblige la rationalisation des dépenses publiques après la baisse de nos recettes pétrolières. Si tel était le cas, le plus simple est de dire la vérité aux Algériens. Cela les aiderait à prendre conscience de la situation pour mieux se retrousser les manches. Dans le même temps, il faudra utiliser toutes les capacités de notre réseau ferroviaire. Comme le ferroutage (transport de camions par train) par exemple qui est inexistant. D'autre part, les statistiques de la Sntf font ressortir que les 12 trains «grandes lignes» n'ont transporté que 860.758 voyageurs sur les 32 millions de voyageurs qui ont pris le train en 2014. De manière générale, l'Algérien n'utilise que les trains de banlieue. Le trafic routier trône à la première place avec son hécatombe et ses dépenses d'entretien. Le développement des activités du rail fait partie de la rationalisation des dépenses. Celui du transport maritime inter-wilayas aussi. Deux alternatives qui faciliteront l'instauration du péage de l'autoroute Est-Ouest prévu au début de l'année prochaine. Il s'agit d'étude comparative. Pas de réflexion. Surtout pas aussi «élastique»!