La hantise de la population a culminé au point que, lors de l'escarmouche de Sidi Bouzid, les citoyens ont eux-mêmes donné la chasse aux terroristes... Alors que la situation en Libye est de plus en plus tendue, notamment dans la zone de Derna où ont lieu des affrontements entre les hommes d'Al Qaîda et ceux de l'Etat islamique (Daesh) qui tente de progresser rapidement en direction de Benghazi, les éléments de la katiba Oqba Ibn Nafaâ font eux aussi dans la surenchère. En quarante-huit heures seulement, ils ont fomenté plusieurs attentats contre les agents de la Garde nationale tunisienne, provoquant un mort et plusieurs blessés du côté de Jendouba et, pas plus tard que lundi dernier, dans la soirée, trois nouvelles victimes à Sidi Ali Ben Aoun et à Bir El Hfey. En fait, ils ont même essayé de frapper à Sidi Bouzid où un de leurs desperados a été abattu et un autre grièvement blessé et interné dans l'hôpital de cette ville. Toute la Tunisie est en plein branle-bas de combat, en cette veille de Ramadhan, et la crainte d'une recrudescence dramatique des attentats semble avoir gagné toutes les institutions concernées ainsi que le moteur de l'économie, à savoir les infrastructures touristiques. La hantise de la population a culminé au point que lors de l'escarmouche de Sidi Bouzid les citoyens ont eux-mêmes donné la chasse aux terroristes, ce qui a engendré des blessures plus ou moins sérieuses à quatorze d'entre eux et poussé certains à réclamer le prisonnier pour un lynchage en bonne et due forme. Coincée entre une double menace au sud-est et au nord-ouest du pays, la Tunisie peine à s'organiser pour lutter contre un danger de plus en plus manifeste, Daesh ayant apparemment décidé de passer à l'offensive pour tenter de s'y implanter de manière plus conquérante. Et ce n'est pas la volonté manifeste de la population de se mobiliser contre les assaillants jihadistes qui suffira à contrecarrer cette tactique, de nature à perturber le théâtre des opérations et amoindrir de façon considérable le travail des services de sécurité. A cet égard, une prise de conscience existe quant à la nécessité d'une bonne coordination des diverses composantes des forces de sécurité et un travail est en cours pour déterminer la procédure adéquate de la riposte ainsi que la canalisation de tous les concours au combat contre le terrorisme. Même si la référence à la mort supposée de Mokhtar Belmokhtar touché par un drône américain est considérée dans certains milieux comme une explication plausible de ces derniers attentats, la tendance majoritaire est plutôt encline à considérer la recrudescence des opérations terroristes comme une caractéristique des mécanismes de pensée et d'action des groupes terroristes qui croient dur comme fer que leurs actes, qualifiés de djihad, durant le mois sacré du Ramadhan, leur offrent grandes ouvertes les portes du paradis. La crainte majeure qui ronge les Tunisiens a trait aux mosquées dont un certain nombre sont devenues des fiefs de la propagande et de l'activisme de la phalange Oqba Ibn Nafaâ, branche tunisienne d'Al Qaîda au Maghreb, notamment dans le sud du pays, au point que de plus en plus nombreux sont ceux qui réclament haut et fort une autre politique:«Ayons le courage de réveiller l'ancienne machine des renseignements de Ben Ali», demandent-ils tant ils sont persuadés que c'est le meilleur moyen de réussir la traque des terroristes et de leur soutien logistique. Cela est d'autant plus souhaité que l'annonce de la mort de Belmokhtar a ravivé les peurs d'une brusque avalanche d'attentats aveugles.