Les mois de Ramadan se suivent et se ressemblent à Bouira. Comme chaque année, les commerçants saisissent l'occasion pour remplir leurs caisses, la Direction de la culture trace un programme sur papier et les restaurants «Errahma» accueillent les démunis et autres gens de passage. «Le marché de la gare», lieu de ravitaillement pour la majorité des Bouiris, pullule de monde dès les premières heures de la journée. Le matin ce sont les va-et-vient des fournisseurs qui déchargent les légumes provenant des marchés de gros des régions avoisinantes. A la mi-journée, les femmes investissent les lieux à la recherche des ingrédients pour la chorba. Les jeunes vendeurs de «diouls» attirent l'attention par des commentaires flatteurs aux jeunes acheteuses et des remerciements à l'algéroise aux plus âgées. Profitant de cette ambiance, les «pickpockets» guettent les poches. Les jeunes ont déjà prévu une riposte en installant des guetteurs qui n'hésitent pas à user des mains pour défendre les femmes, les victimes les plus fragiles. C'est sous les yeux de la police que Kamel, un fils de la cité, a violemment corrigé un jeune qui s'est attaqué à une fille. Ces réactions sont une éducation ancrée dans la tradition des Bouiris, les vrais, qui de tout temps n'admettent pas la «hogra». «Les temps ont certes changé mais pas au point de ne pas assister une femme victime des voyous», nous dira Kamel, au milieu des cris des vendeurs de «kousbar, maâdnous...». Les commerçants permanents vantent leurs marchandises cédées à un prix spécial. La courgette très demandée pour la «dolma» est affichée à 90 DA, la carotte à 70 DA, la pomme de terre à 30 DA... les vendeurs connaissant la nature des femmes qui aiment frimer saisissent l'occasion pour monter l'exigence et faire de très bonnes recettes. A la question du changement des prix, les commerçants brandissent l'argument d'un marché de gros trop cher. Certains iront jusqu'à expliquer le phénomène par la loi du marché relative à l'offre et à la demande. Pour les plus au courant du sujet, les raisons sont à chercher chez les spéculateurs détenteurs des chambres froides qui font disparaître les produits pour ensuite les distiller au prix fort. Pour la viande dont les prix restent conformes à ceux d'avant: l'ovin, entre 700 et 750 DA, la bovine entre 550 et 650 DA le kilogramme. Ces prix qui hélas, ne sont pas à la portée des bourses moyennes, obligent beaucoup de citoyens à recourir au congelé en attendant la mise en oeuvre de la promesse d'une viande fraîche à 500 DA. Dans cette ambiance, les vendeurs de «zalabia» se frottent les mains. Ce sont les seuls qui ne risquent pas de chômer même si «zalabia rouge tounsia» est cédée à 130 DA. La locale de Boufarik à 100 DA. Pour l'animation nocturne, cette année ne diffère en rien des précédentes. Les cafés sont bondés d'adeptes de domino, de jeux de cartes...les rues arrivent difficilement à contenir le flux humain qui sort des mosquées de la ville après la prière. Comme pour perturber davantage, beaucoup utilisent leurs véhicules pour quelques mètres. Les embouteillages, les klaxons, la fumée des échappements...pourrissent la soirée. La Direction de la culture trace des programmes qui ne voient jamais le jour. Cette Direction dont l'utilité est à prouver attend que les autres bougent pour accaparer le travail. Au niveau communal, le comité des fêtes de Bouira prépare des animations pour la fin de chaque semaine. Les jeunes talents de la wilaya se chargeront de créer l'animation. L'hospitalité qui n'est pas un vain mot à Bouira se résume cette année aux deux restaurants ouverts pour distribuer des repas chauds aux démunis et aux gens de passage. Les services de sécurité veillent au grain en ce mois où le risque est plus grand, non parce que les hordes sont plus fortes mais parce que les conditions de travail plus exigeantes. Le nombre de personnes qui rejoignent la ville, le nombre de véhicules, le comportement anarchique de certains...sont les raisons qui poussent les policiers à plus de concentration et de vigilance.