Après l'OPA de Drahi sur le groupe NextRadioTV, propriétaire de la chaîne d'informations en continu BFM TV et de la radio RMC, le monde des médias et de l'audiovisuel en France est stupéfait, car après avoir fait l'acquisition de Libération et de L'Express et maintenant de BFM et RMC, le patron d'Altice (SFR-Numéricable, Virgin Mobile...) est plus que jamais sous les feux des projecteurs. Au point où le P-DG et principal actionnaire de NextRadioTV, Alain Weill défend dans un entretien accordé au Monde mardi dernier le partenariat stratégique avec Altice, le groupe de Patrick Drahi. S'exprimant sur les motivations de Patrick Drahi, qui investit dans les médias - il est déjà propriétaire de L'Express, de Libération, et projette notamment de racheter Stratégies - Alain Weill estime qu'il s'agit pour l'homme d'affaires d'une «vision industrielle». «Ses investissements dans les médias sont liés à son activité principale. Il s'agit d'augmenter le revenu par abonné pour améliorer la rentabilité du réseau. Ce n'est pas un fantasme d'influence mais une vision stratégique», explique-t-il au Monde. Patrick Weill assure par ailleurs que son groupe restera indépendant. Ce n'est pas l'avis des experts qui se sont exprimés depuis cette affaire. Julia Cagé, économiste, spécialiste de l'économie des médias, et auteur de Sauver les médias a ainsi déclaré que c'est assez inquiétant car pour la première fois, il va y avoir en France un magnat des médias possédant des entreprises de la presse écrite et de l'audiovisuel. Aux Etats-Unis, ce genre d'empire «crossmedia» n'est pas possible, car l'Autorité de régulation, la très puissante Federal Communications Commission (FCC)] ne le permettrait pas. Cela est contraire et repose la question du pluralisme. L'experte rappelle que la dernière loi sur la concentration des médias en France date de 1986, donc avant Internet et avant les chaînes d'information en continu. Une montée en puissance dans ce secteur d'autant plus inquiétante que Patrick Drahi n'est pas perçu comme un amoureux des médias. En achetant le quotidien Libération, il a fait un plan social qui a vu le départ d'un tiers des journalistes, à l'hebdomadaire L'Express, il a ouvert une clause de cession pour obtenir une réduction drastique du personnel. Il faut rappeler qu'avoir croqué SFR pour 13,36 milliards d'euros en 2013, le patron des télécoms et médias (actionnaire de Libération) aurait proposé de racheter Bouygues Telecom pour «un peu plus de 10 milliards d'euros» en juin dernier provoquant la panique des places boursières et du ministre français des Finances à l'époque. Avec ce rachat, SFR deviendrait le premier opérateur mobile français avec la moitié du marché soit plus de 23 millions d'abonnés. En alliant médias, télécoms et Internet, le nouveau magnat français des médias qui est proche d'Israël inquiète sérieusement les autres opérateurs comme Vivendi. [email protected]