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Chèque en blanc ou réelle avancée?
L'APPORT DU FCE
Publié dans L'Expression le 30 - 07 - 2015


Ali Haddad, président du FCE
«Le FCE combien de divisions?» Phrase prêtée à Staline excédé par ses conseillers l'informant que le Vatican est mécontent de l'Urss.
A tort ou à raison, le FCE fait depuis quelques mois le buzz. On met le FCE à toutes les sauces et il est effectivement présent partout jusqu'à susciter la gêne pour cette facilité avec laquelle il est reçu, la facilité avec laquelle il est écouté et naturellement, la jalousie et les craintes exprimées sur sa réelle valeur ajoutée. J'ai voulu en honnête courtier rapporter les faits. Partant du fait que toutes les initiatives sincères sont à examiner avec bienveillance, mais aussi rigueur; je propose aux lecteurs quelques faits, quelques propositions du FCE mais aussi...
Présentation du FCE
Le Forum des chefs d'entreprise (FCE) est une association à caractère économique créée en Octobre 2000 par un groupe de chefs d'entreprise, afin de contribuer à l'instauration de l'esprit d'entreprise au sein de l'économie nationale et de promouvoir les intérêts de l'entreprise algérienne. L'association est ouverte aux entreprises privées algériennes, aux entreprises étrangères de droit algérien et aux entreprises publiques. Le Forum regroupe à février 2015 environ 800 entreprises. Les sociétés membres du FCE cumulent un chiffre d'affaires global de plus de 25 milliards de dollars et emploient plus de 250.000 salariés.
De nombreuses entreprises membres sont leaders dans leur filière d'activité. Les principaux secteurs couverts (18 sur les 22 que comprend la classification nationale) sont notamment ceux des industries agroalimentaires, des matériaux de construction, des industries électriques et électroniques, des industries mécaniques, des industries pharmaceutiques, du papier et de l'emballage, du bois, des travaux publics et de la construction, de la grande distribution...72% des membres du FCE ont créé leur 1ére entreprise à partir de 1990. Près de 42% des membres du FCE sont de nouveaux chefs d'entreprise: la création de leur 1re entreprise a eu lieu à partir de 2000: 226 membres. Les membres du FCE sont à la tête de 499 entreprises.
«Le Forum des chefs d'entreprise s'est donné pour vocation essentielle de se constituer en une force de proposition et d'action au service de l'entreprise avec pour motivation principale de promouvoir une organisation crédible apte à faire valoir le point de vue des entreprises algériennes, tous statuts confondus (...) L'idée de base que le Forum tente de promouvoir, c'est que le développement des entreprises est la seule voie appropriée pour organiser une relance forte et durable de la croissance, des créations massives d'emplois et une lutte efficace contre la pauvreté. C'est la raison pour laquelle il revendique que l'entreprise soit placée au centre de toutes les politiques économiques publiques.198 membres du FCE sur les 226, réalisent un chiffre d'affaires annuel de 1059,4 milliards de DA soit l'équivalent de 14,125 milliards de dollars US. Concernant les emplois, ils sont évalués à 105.000 dont 50% dans l'Industrie (52 743), 28,0% dans le Btph avec 29.259 emplois, 16,4% dans le commerce et les services avec 17 121 emplois et enfin 5,2% dans les transports et communications avec 5 469 emplois»(...) Le FCE s'est doté d'un Observatoire de l'information économique, dans le but de proposer une large gamme de statistiques et d'études économiques pour les chefs d'entreprise membres et non-membres du FCE, ainsi que les autres parties prenantes de leur l'environnement économique».(1)
Le FCE dans le tissu industriel algérien
Voilà pour la carte de visite du FCE. Il n'est pas le seul. Selon les chiffres officiels, il existe 990.496 entreprises dont plus de 934.200 entités économiques sur le territoire national dont 16.800 pour le secteur public et le reste pour le secteur privé. Le recensement révèle que les personnes physiques sont majoritaires par rapport aux personnes morales avec un taux de 95%. De même que le secteur privé représente 98% du tissu industriel national. Le commerce et les services comptent le plus grand nombre d'entreprises en Algérie. Le commerce du détail vient en tête des activités commerciales avec un taux de 84% au moment où le secteur des services compte en première position le transport (18,8%) suivi de la restauration (14,5%), des télécommunications incluant les kiosques multiservices (10,3%), des activités juridiques et comptables (5,3%) et de la santé humaine (5,3%). L'industrie qui occupe la troisième position compte 95.445 entreprises. 24,8% d'entre elles opèrent dans les industries agroalimentaires, 23,4% dans la fabrication de produits métalliques, 11,1% dans l'habillement, 1,7% dans le travail du bois et 1,3% dans le textile. D'autre part, 9117 entreprises sont spécialisées dans le domaine de la construction.» (2)
Le tissu économique est fortement dominé par les personnes physiques (95,0%), alors que les personnes morales représentent près de 5%. Par ailleurs, le nombre d'entités industrielles recensées est de 95 445. A titre indicatif, 24,8% des entités industrielles activent dans les industries agroalimentaires (travail de grain, lait et produits laitiers, boissons etc.), 23,4% dans la fabrication de produits métalliques, 11,1% dans l'habillement, 1,7% dans le travail du bois et la fabrication d'articles en bois et en liège, 1,3% dans le textile, 1,3% dans la réparation et l'installation de machines et d'équipement.» (3)
Ces chiffres montrent que le FCE, aussi important, soit-il ne représente qu'une petite partie du vivier des entreprises du pays évalué à près d'un million. Cela n'exclut pas qu'il puisse constituer une force de proposition et pourquoi pas d'entraînement de l'ensemble du tissu industriel.
Les propositions du FCE: un Plan d'émergence
Nous reproduisons sans qu'elle ne soit exhaustive et en étant le plus fidèle possible à l'esprit du texte,les propositions du FCE. «Le Forum des chefs d'entreprise propose dans ce document un ensemble de solutions structurelles de nature à poser les bases d'un «Plan d'émergence» de notre économie. Le FCE se veut uniquement une plateforme de dialogue et de concertation, et une force de proposition (...) La mission qu'il s'est donnée est de militer pour l'intérêt général, pour la protection de notre économie, pour le développement et la prospérité de notre pays; il n'a jamais eu, et n'aura jamais, à défendre des intérêts catégoriels. «Sa ligne de conduite a consisté, de façon résolue, à recommander que notre pays mise sur l'entreprise dans la création de la vraie richesse, parce que sa conviction a toujours été que c'est là la seule issue pour l'économie nationale et, partant, pour notre société toute entière. Le FCE considère que c'est là également la seule solution pour préserver le modèle social algérien (...) Pour cela, les droits acquis doivent être préservés et l'Etat doit continuer à financer les transferts sociaux mais en ciblant de façon précise les bénéficiaires. (...).» (4)
Il y a là une contradiction: le démantèlement de l'Etat garant de la justice sociale ne nous garantit pas que la société privée peut le faire. Il est à craindre un démantèlement d'un certain nombre d'acquis sociaux qui- sans faire, dans la fuite en avant- sont consubstantiels d'une société juste où chacun est récompensé à l'aune de sa contribution réelle. «Le Forum des chefs d'entreprise propose dans ce document un ensemble de solutions structurelles de nature à poser les bases d'un 'Plan d'émergence'' de notre économie. (...)» C'est dans cet esprit que s'inscrivent les propositions contenues dans ce document. Le FCE espère alimenter ainsi un débat économique qu'il souhaite le plus large possible, parce qu'il concerne tous les acteurs économiques et sociaux sur la scène nationale. En s'impliquant de nouveau dans le débat, le FCE n'a aucune velléité politicienne et, comme toujours, ne nourrit aucunement l'ambition de jouer un rôle politique quelconque. Il tient à le redire avec force: seul le renouveau économique de notre pays constitue sa préoccupation permanente et cet enjeu mobilise toutes les énergies de nos membres qui s'engagent d'une manière agissante pour l'édification d'une réelle économie de marché, prospère et solidaire.» (4)
La suite est plus problématique car le FCE donne l'impression d'énoncer des voeux pieux.
Les objectifs visés, à l'horizon 2020, sont les suivants: L'atteinte d'un taux de croissance moyen de l'ordre de 8%. La réduction de la facture d'importation de 15 milliards de dollars (objectif de réduction de 5 milliards de dollars dès 2015). L'augmentation des exportations hors hydrocarbures de 10 milliards de dollars. L'endiguement de l'économie informelle. L'intensification de la création d'entreprises avec pour objectif la création de 60.000 entreprises/an. La création d'emplois pérennes et la réduction du chômage. Objectif: deux millions d'emplois dans l'industrie, le BTP, l'agriculture et les services. Il est permis d'escompter, sur la base d'une moyenne de huit emplois par entreprise, la création de 2 millions d'emplois répartis selon les proportions suivantes: agriculture 15% soit 300.000. Industrie 20% soit 400.000. Btph 20% soit 400.000. Services 45% soit 900.000 L'augmentation de la part de l'industrie dans le PIB pour atteindre 15%.» (4)
Comment faire pour une aussi belle affirmation? Le FCE a la solution, les subventions, l'amnistie fiscale - à l'exclusion du blanchiment- on se demande comment l'Etat pourra contrôler la provenance - et la mise à disposition du foncier: «(...) Lever le verrou du financement de l'investissement par la création d'un fonds d'investissement pour favoriser le développement des entreprises et l'expansion rapide du secteur privé, doté d'un montant équivalent à 10 milliards de $US. Un tel fonds permettrait d'utiliser un levier de 1 pour 10 et de mobiliser ainsi un volume de 100 milliards de dollars pour l'investissement. (...) Lancer un 'Grand Emprunt National'' de 2000 milliards de dinars, garanti par l'Etat, destiné au financement de projets prioritaires, notamment dans les domaines de l'économie numérique, des énergies renouvelables et du soutien aux PME innovantes.» (4)
«Dans l'immédiat, le FCE propose au titre des mesures urgentes le lancement d'une opération d'assainissement fiscal visant à réintégrer dans le champ légal les volumes financiers circulant dans les circuits informels en taxant à hauteur de 10% les montants déclarés puis déposés dans les banques. L'assainissement fiscal ne concerne pas, naturellement, les liquidités dont l'origine est criminelle. La réduction du taux de l'impôt sur le bénéfice des sociétés (IBS) pour le ramener à 15% pour les activités de production de biens et de services.» Parallèlement à la poursuite du programme étatique d'implantation de nouvelles zones industrielles, le secteur privé peut contribuer à la résorption de la pénurie en foncier industriel par le lancement d'un premier programme pilote portant sur 10 parcs industriels, de 3000 ha minimum soit au total 30.000 ha, à aménager.» (4) D'une façon plus explicite, le FCE demande à disposer de concessions de 1000 à 2000 ha par investisseur sur un total pouvant aller à 10 millions d'hectares pour assurer la sécurité alimentaire (mesure 13). Il en est de même du ciment et de l'acier pour lequel le FCE fait la proposition de produire l'essentiel de la demande. Pour terminer avec l'ouverture des télécoms, la fabrication des pièces détachées de voiture et même l'ouverture de l'espace aérien et maritime: c'est un véritable plan de gouvernement que nous propose le FCE.
Notre conviction
Il y a loin de la coupe aux lèvres! Au vu de la force de frappe réelle du FCE, on peut penser qu'il présume de ses forces et vue l'extrême modestie entrepreneuriale, managériale et productive du FCE. Ceci s'apparente à s'y méprendre, si on ne fait pas attention, à une opération de blanchiment et des entreprises douteuses peuvent polluer les bonnes intentions du FCE. La liberté du renard dans le poulailler avec de l'argent public et des ménages, on finance des projets qui dans les faits n'apportent pas de création de richesse.
Et ceux qui ne sont pas dans le FCE? Ont-ils droit au chapitre? Quid des autres organisations patronales? Est-ce au forum de sérier les chantiers et d'exprimer sa disponibilité pour les prendre en charge à la place de l'Etat? De notre point de vue, la compétition doit être ouverte transparente et créer de la vraie richesse, d'abord, en incitant les entreprises publiques ou privées à adopter un organigramme des compétences à recruter en fonction du plan de charge. Combien d'entreprises existent sans ingénieurs, sans techniciens? Peut-être que dans le cadre de la tripartite une partie raisonnable de ces propositions complétées par d'autres provenant du hors FCE pourraient être adoptées. Le FCE fait miroiter des solutions idéales mais il attend de l'Etat un désarmement total de ses prérogatives. Moins ou pas d'impôt, amnistie fiscale, foncier industriel à volonté, des financements importants et au total des promesses qui n'engagent que ceux qui y croient. C'est de cette façon que l'on pourra assurer un travail bien fait au vu des compétences, mais aussi pour pouvoir absorber une partie des dizaines de milliers de diplômés qui sortent chaque année.
On peut regretter qu'il n'est nulle part fait mention du système éducatif. Pourtant, aucune nation ne peut se développer sans un système éducatif fort qui s'appuie sur une recherche appliquée qui permet au pays de fabriquer ses propres équipements de laboratoire et pédagogique. Sait-on par exemple que les équipements pédagogiques représentent pour le système éducatif au bas mot 200 à 300 millions de dollars ceci sans compter les équipements et produits chimiques de laboratoire utilisés dans les hôpitaux, les laboratoires d'analyse des départements ministériels, notamment l'armée et le ministère de l'Intérieur. De même la fabrication d'un million d'ordinateurs à faible coût autour de 40-50 dollars permettra de donner une impulsion qualitative à notre système éducatif. Il y a là un gisement très important qui permet réellement de diminuer la dépendance de notre pays qui permettent enfin de réhabiliter l'outil de travail national.
Il est un autre domaine tout aussi fécond sinon non plus celui de la mise en place de la transition énergétique. Là encore, c'est une vision nouvelle qui nous permettra de consommer moins d'énergie en consommant mieux laissant ainsi un viatique pour les générations futures, le FCE se concentrant sur ce qu'il sait faire - pour le moment - en termes de métiers classiques, il ne se lance pas dans l'innovation dans le domaine du renouvelable des économies d'énergie, de la formation des cadres à même de prendre en charge cette utopie. Et pourtant, les métiers du développement durable c'est le carburant des entreprises de par le monde. Fabriquer des centaines de milliers de chauffe-eau solaire, de panneaux solaires, d'éoliennes, de système de refroidissement avec le solaire. C'est ça l'avenir qui nous permettra de sortir des sentiers battus. Ce que propose le FCE ne doit pas être ni exclusif ni rejeté, seul un débat global permettra de cerner les préoccupations du pays et les moyens de les concrétiser avec l'apport du FCE.
1.http://www.fce.dz/phocadownload/Dossier%20FCE.pdf
2.http://www.leconews.com/fr/actualites/nationale/services/plus-de-900-000-entreprises-en-algerie-02-08-2012-159107_296.php
3. http://www.ons.dz/img/pdf/resultats_definitifs_phase_i_re2011.pdf
4.http://www.fce.dz/phocadownload/plaidoyerfr.pdf


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