Leur action va de la collecte de fonds à la production d'armes destinées aux combattants de l'ALN. Il n'y a pas eu que de la haine entre la France et l'Algérie pendant la guerre de Libération, puisque des Français de souche, se sont engagés aux côtés de la cause nationale, au moment même où des Algériens éprouvaient des difficultés pour faire face à la machine coloniale. Francis Jeanson, Hélène Cuenat, Henri Curiel...et autres Michel Raptis, dit «Pablo» et Louis Fontaine, pour ne citer que ces noms, ont fait partie des «porteurs de valises». Des réseaux de soutien au FLN connus sous le nom de « réseaux Jeanson » du nom du philosophe Francis Jeanson, disciple de Jean-Paul Sartre. Des intellectuels de la gauche, pour la plupart des trotskistes et des communistes, avaient pour principale activité, le transport des cotisations prélevées sur les quelques 300.000 Algériens présents en France. Des militants FLN qui ont su en l'espace d'un temps record porter la résistance en plein sol français. Ces moudjahidine de la fédération de France du FLN, à l'image des Omar Boudaoud, Kaddour Ladlani, Boubekeur Belkaïd, Ali Haroun...étaient parvenus à desserrer l'étau sur leurs «frères» à l'intérieur du pays. Les réseaux Jeanson et Curiel n'étaient pas les seuls, puisque le premier réseau à se mettre en place en 1956, est celui de la section française de la quatrième internationale, dirigée par Pierre Frank et Simone Minguet. La contribution de ces intellectuels à la guerre de libération est multiforme. Elle va de la collecte de fonds à la production d'armes destinées aux combattants de l'ALN. Ainsi, l'organisation «voie communiste» animée par l'ancien trotskiste, Denis Berger et le libertaire Daniel Guerrin, avait pour mission d'aider des militants du FLN, à l'image de Ben Bella, à fuir. Pour sa part, Michel Raptis, dit Pablo, d'origine grecque, organise un véritable réseau trotskyste international d'aide au FLN. Il met ainsi en place, en collaboration avec la direction du FLN, une usine d'armes clandestine au Maroc où étaient fabriqués des mitraillettes et des mortiers. Pablo met aussi en place en 1960 aux Pays-Bas, un atelier de fabrication de fausse monnaie. Mais en raison des infiltrations des services secrets coloniaux, le réseau a été démantelé et son responsable arrêté et condamné à 15 mois de prison à Amsterdam. Par ailleurs, d'autres militants s'occupaient des activités clandestines d'impression de tracts, ainsi que des relations avec le FLN. D'autres, comme Michel Fiant, Alain Krivine, tentaient de construire Jeune résistance, un groupe qui organise des réseaux de désertion pour les appelés. L'acheminement d'importantes sommes d'argent, était parmi les principales missions des réseaux de soutien. À cela s'ajoutaient les passages de frontières, l'organisation de quelques évasions de prisons ou les fournitures/falsification de papiers. En somme, les membres des réseaux sus-cités provenaient de trois sensibilités : un courant humaniste essentiellement chrétien, un courant léniniste internationaliste et enfin, un courant de sensibilité tiers-mondiste pour lequel l'Algérie représentait une lutte emblématique. L'action de ces réseaux de soutien a été sérieusement entravée par la pression policière qui s'exerçait quotidiennement sur leurs militants. Cependant, le démantèlement du premier réseau Jeanson a été aussitôt remplacé par les groupes d'Henri Curiel. Il sera à son tour arrêté, mais remplacé par d'autres militants expérimentés, comme Georges Mattéi, Martin Verlet, Roger Rey, les frères Jéhan et Gérold de Wangen. Le procès le plus célèbre, impliquant le réseau Jeanson, s'est déroulé le 5 octobre 1960. Ces militants sont accusés selon une formule connue sous le vocable des «porteurs de valises» du FLN. Tant de militants qui se sont joints à la guerre de Libération par la seule conviction, qu'il s'agit d'une cause juste, qu'il est à tout prix impératif de soutenir. La guerre terminée, quelques-uns choisirent d'aller apporter leurs compétences professionnelles à l'Algérie indépendante. C'est le cas de Michel Raptis qui fut conseiller de l'ex-président Ahmed Ben Bella. Il travaille avec Mohammed Harbi pour élaborer les premiers décrets d'autogestion des domaines laissés vacants par les pieds-noirs réfugiés en France. D'autres, forts de leur expérience et de leur savoir-faire, se mirent au service des autres causes à travers le monde. Ce fut l'aventure de solidarité menée par Henri Curiel jusqu'à son assassinat en 1978. D'autres enfin, restèrent toujours solidaires de l'Algérie et s'activèrent à travers la vie associative pour resserrer les liens entre les forces démocratiques des deux pays.