D'importants groupes réapparaissent au nord du pays, Belmokhtar réitère son allégeance à Al Qaîda, Daesh frappe en Libye, Droudkel est une énigme... La nouvelle cartographie terroriste, qui semble s'étendre d'est en ouest après avoir été confinée au centre du pays, a de quoi amener les observateurs de la scène sécuritaire à se poser un certain nombre de questions, à défaut de s'inquiéter quant à une recrudescence de l'activité terroriste en Algérie. Le dernier épisode en date qui fait état de l'encerclement d'un groupe composé d'une trentaine d'éléments à Skikda corrobore ce genre d'assertions, d'autant plus que cet épisode de la lutte antiterroriste intervient après une série d'événements plutôt inédits depuis plus d'une quinzaine d'années. En effet, avant l'opération de Skikda, il a été enregistré le terrible attentat terroriste perpétré à Aïn Defla contre un convoi de l'ANP au deuxième jour de l'Aïd El Fitr. Comme à Skikda, les terroristes était en nombre. Bien avant cela, les forces de l'armée ont réussi à mettre hors d'état de nuire plus de 25 terroristes en une seule opération dans les monts de Bouira. L'élément nouveau, voire inquiétant est cette stratégie terroriste de regrouper autant d'éléments éparpillés sur une bande de territoire qui englobe plusieurs centaines de kilomètres. Ce redéploiement, s'il en est un, est un aspect qui pourrait être en rapport avec le développement de l'actualité sécuritaire dans les pays voisins. Sans aller jusqu'à évoquer une quelconque communication entre les terroristes des maquis algériens et ceux des autres régions, il est clair que ce retour en «nombre» des criminels n'est certainement pas un hasard, d'autant que les menaces proférées par les terroristes d'El Qaîda et de Daesh, semblent émaner d'une volonté d'intégrer l'Algérie dans la cartographie de la violence avec la Tunisie, la Libye et le Mali. Il y a certainement dans cette course à la «démonstration de force» dans le nord de l'Algérie, une part de concurrence entre les deux organisations terroristes. En effet, Daesh et El Qaîda communiquent sur leur présence en Algérie et tentent de faire accroire à leur capacité de nuisance, même si leurs actions n'ont, jusque-là, montré qu'une marge de manoeuvre très limitée en raison du quadrillage sécuritaire des maquis en Algérie. Dans cette lutte entre les deux organisations, le groupe du sinistre terroriste Mokhtar Belmokhtar pèse assez lourd sur la balance et son ancrage dans le nord du Mali constitue une menace permanente pour le sud du pays, notamment de par sa puissance financière accumulée grâce au trafic de drogue et à la contrebande. Belmokhat occulte l'autre chef d'El Qaîda dans la région, Abdelmalek Droudkel, qui semble dépassé. Ainsi, Al Mourabitoune, dirigée par Belmokhtar a confirmé son allégeance à El Qaîda dans un communiqué publié par un site Internet terroriste. La référence à Oussama Ben Laden ouvertement assumée par ce chef terroriste, le place en ennemi de la branche Daesh dans le Maghreb. Né en 2013 de la fusion du groupe de Mokhtar Belmokhtar, et une organisation locale liée à Al-Qaîda, Al Mourabitoune sonne le rassemblement de ses troupes dans la perspective d'interdire à Daesh qui infeste la Libye d'investir le Mali. Au mois de mai dernier, le même Belmokhtar avait désavoué un responsable des Al-Mourabitoune, qui proclamait l'allégeance de l'organisation à Daesh. Jusque-là les terroristes dirigés par Belmokhtar étaient derrière les trois derniers attentats du nord du Mali. Pour l'heure, les groupes qui opèrent au nord de l'Algérie se revendiquent des deux organisations qui prennent leurs ordres en Irak et en Afghanistan. Cela ne les rend pas moins dangereux, mais limite certainement leur niveau d'organisation, au sens où les chefs locaux ne sont que des exécutants d'une stratégie établie ailleurs. De là à imaginer des batailles fratricides entre ces deux organisations un peu partout dans le Maghreb, il y a un pas que beaucoup d'experts n'hésitent pas à faire, puisque pareils scénarii ont été observés en Algérie durant la décennie rouge et partout où le terrorisme islamiste a pris racine. Cela dit, les «apparitions» de groupes composés de plusieurs dizaines de terroristes est un signe que la lutte antiterroriste est d'une actualité brûlante. Les nouveaux défis sécuritaires imposent donc une vigilance de tous les instants.