«La convergence de vues entre l'Algérie et l'Italie sur la nécessité d'aboutir rapidement à la formation d'un gouvernement libyen d'union nationale, ayant de larges prérogatives lui permettant de relever les multiples défis auxquels est confronté ce pays» a été de nouveau réaffirmée lors d'un entretien téléphonique entre le ministre des Affaires maghrébines, de l'Union africaine et de la Ligue arabe, Abdelkader Messahel et le ministre italien des Affaires étrangères, Paolo Gentiloni. Ce constat intervenait quarante-huit heures avant la reprise du dialogue, l'émissaire du secrétaire général de l'ONU et chef de la Mission d'appui des Nations unies en Libye (Manul), l'Espagnol Bernadino Leon, ayant annoncé que le nouveau cycle de dialogue politique inter-libyen sera organisé les 27 et 28 août, au Maroc. Dans une lettre adressée en réponse au Congrès général national (CGN), Parlement sortant, à Tripoli, M. Leon a expliqué que le prochain cycle consistera à mener des discussions directes afin «d'accélérer le processus de dialogue et le parachèvement des suppléments de discussion et des candidats au gouvernement avant la fin du mois». Il a invité la délégation du CGN à assister à la nouvelle série de dialogue, exprimant l'espoir que ces pourparlers en soient les toutes dernières étapes. Le dialogue entamé en Algérie oeuvre à faciliter un rapprochement entre les protagonistes qui ont abouti, lors des dernières assises à Alger, à un projet d'accord instituant une période de transition conduite par un gouvernement d'union nationale. Evoquant «la situation actuelle en Libye à la lumière des derniers développements intervenus sur cette question et des efforts menés conjointement dans l'appui au processus de négociations sous l'égide des Nations unies pour aboutir à la résolution de la crise dans ce pays», les deux ministres ont convenu de poursuivre la concertation permanente entre les deux pays sur «l'ensemble des questions d'intérêt commun».En d'autres termes, ils ont sans doute évalué la somme de difficultés qui pèse sur la poursuite du dialogue et son aboutissement espéré. De fait, la dégradation de la situation dans la ville de Syrte et ses environs, où l'Etat islamique a pris les commandes au lendemain du départ volontaire des milices de Fajr Libya, appelées à défendre Tripoli contre une éventuelle offensive de Daesh ou de l'armée du général Haftar n'incite pas à l'optimisme. Qui plus est, les interférences observées dans le dialogue des factions soutenues les unes par l'Egypte et les pays du Golfe et les autres par les tribus libyennes hostiles à toute intervention extérieure rendent d'autant plus ardues les négociations en cours. L'insistance du gouvernement de Tobrouk à réclamer la levée de l'embargo sur les armes imposé à son armée par la coalition internationale, des armes officiellement destinées à combattre l'EI mais dont rien ne garantit qu'elles n'aient pas d'autres fins, reflète la nature et la complexité des enjeux qui minent le dialogue en cours. Sans doute la communauté internationale, particulièrement les pays occidentaux, fait-elle le maximum en termes de pressions et d'invites pour contraindre les factions à signer l'accord qui permettrait d'asseoir un gouvernement d'union nationale chargé de gérer une phase de transition, mais les choses ne semblent pas progresser dans cette direction, dès lors qu'à chaque rencontre des conditions sont formulées qui renvoient le consensus aux calendes grecques. Le Conseil de sécurité des Nations unies a dénoncé «l'escalade de la violence et de violations des droits humains ainsi que le ciblage des civils et des institutions civiles, et l'entrave au travail des institutions financières en Libye».Il a, en outre, fait part, dans un communiqué récent, de sa préoccupation à propos de «la détérioration de la situation en Libye et ses conséquences pour la paix dans la région», concluant par la disponibilité du comité des sanctions à punir les «prédateurs de la paix, de la stabilité et du processus du dialogue politique» en Libye. C'est sans doute ce qui a encouragé le ministre des Affaires étrangères du gouvernement de Tobrouk, de passage à Paris, à «souhaiter une intervention (internationale) le plus tôt possible parce que le danger est grandissant» mais «pas de troupes au sol, qu'elles soient arabes ou pas. En fait, il demande que des «moyens aériens soient mis à disposition des forces armées libyennes pour soutenir nos efforts au sol».«Nous ne voudrions pas voir Tripoli ou Misrata tomber. Il est temps que la communauté internationale réagisse», a-t-il indiqué en dressant un tableau des plus noirs sur la progression de Daesh en Libye: «La situation est gravissime (...) Aujourd'hui, Daesh est présent à Derna, Benghazi, Syrte et Sabratha, à l'ouest de Tripoli. Il ne s'est pas encore emparé des champs pétrolifères. Mais, il est à craindre qu'il ne parvienne à contrôler quelques puits». L'EI ne cache pas son intention de faire de la Libye une base arrière de sa progression au Maghreb, et la prochaine étape vise clairement la Tunisie voisine. D'où l'urgence d'une avancée effective des négociations menées sous l'égide de la Manul qui, à force de multiplier les points de rencontre, a quelque peu contribué à leur enlisement.