L'armée américaine est entrée, hier, dans la ville rebelle de Falloujah où des combats l'opposent aux résistants irakiens. Quatre bataillons de l'armée américaine, assistés de troupes «d'élite» de l'armée irakienne sont entrés lundi en soirée dans la ville rebelle de Falloujah, alors que la ville était pilonnée par l'aviation américaine. Hier, les combats se poursuivaient entre les résistants de Falloujah et les forces américano-irakiennes. Cette opération «Phantom Fury», pour les Américains, «Opération Aube» pour les Irakiens, a pour objectif de «libérer» la ville des rebelles selon des indications de divers porte-parole américains et du gouvernement intérimaire irakien. Selon les dépêches des agences de «violents combats se déroulaient (hier) dans le quartier nord-ouest de Jolan, où sont retranchés les rebelles. Le bruit d'explosion des obus de chars et des roquettes résonnait dans tout le secteur, alors que d'épaisses colonnes de fumée s'élevaient dans le ciel». Un tiers de la ville serait tombé aux mains des marines américains selon un porte-parole militaire américain. Ainsi, un officier supérieur américain a affirmé hier dans une déclaration à la presse que «l'offensive est menée du nord au sud. Les troupes américaines se sont heurtées au début à une résistance mais maintenant, il n'y en a presque plus. Les troupes se trouvent à moins d'un kilomètre du centre (de Falloujah)». Jolan, à en croire une déclaration d'un officier américain était sous contrôle américain, en milieu de matinée d'hier. L'assaut mené de concert par l'armée américaine et des troupes irakiennes contre le bastion sunnite est le plus important acte de guerre commis en Irak depuis la prise de Bagdad en avril 2003. Cet assaut, annoncé de longue date, a vidé la ville de Falloujah (300.000 habitants environ) de sa population qui a fui les combats et les raids ininterrompus contre les positions rebelles depuis plusieurs semaines. L'offensive contre Falloujah a commencé dans la soirée de lundi après que le Premier ministre intérimaire, Iyad Allaoui, ait donné son feu vert. Aucun bilan de cette première journée de l'opération «Phantom Fury» n'a été donné en fin de matinée. Ailleurs en Irak, la situation demeure très tendue alors que le couvre-feu a été instauré dans la capitale Bagdad. «Un couvre-feu sera imposé tous les jours à partir de mardi soir à Bagdad de 22h30 (19h30 GMT) à 04h00 (01h00 GMT)» a indiqué, hier, un responsable du bureau du Premier ministre irakien. Si à Falloujah les combats faisaient rage hier, d'autres fronts se sont ouverts, comme celui de Ramadi (100 km à l'ouest de Bagdad) l'autre bastion de la résistance. Ainsi, selon des témoins et des journalistes sur place, la guérilla a pris le contrôle, hier après-midi, du centre de Ramadi après 24 heures de combats contre les forces américaines. Après la bataille qui a commencé lundi, en même temps que celle de Falloujah, les forces américaines se sont retirées, hier, de la capitale de la province d'Al-Anbar. De fait, la chute de Falloujah ne semble pas devoir régler le problème de l'instabilité qui connaît l'Irak et la reprise de Ramadi par la guérilla montre combien la situation est complexe et pas aussi maîtrisée que l'affirment des responsables du gouvernement intérimaire irakien. Alors que l'on se battait hier, à Falloujah et Ramadi, plusieurs attentats ont eu lieu à Baâqouba, Kirkouk et à Bagdad occasionnant la mort d'au moins vingt personnes et des blessures pour des dizaines d'autres. Nonobstant ces faits d'armes, «l'Armée islamique en Irak» avertit et menace tout en appelant dans un communiqué ses combattants à attaquer une vingtaine d'objectifs dans une liste rendue publique sur un site Internet. Dans ce communiqué il est mentionné les sites à attaquer, comme le palais présidentiel, le ministère des Finances, le siège de la lutte antiterroriste, un certain nombre de bases militaires, l'aéroport, les ambassades et les hôtels les plus importants d'Irak. Il ne fait pas de doute que ces menaces et appels sont à l'origine du couvre-feu instauré dans la capitale. Dans un autre communiqué, «l'Armée islamique en Irak» indique: «Votre ennemi veut vous déchirer et vous diviser (...) Votre ennemi est faible et terrifié (...) Votre ennemi est arrogant. Frappez-le avec toute la fermeté. Faites-lui goûter l'humiliation et la mort amère.» Par ailleurs, le Parti islamique irakien (sunnite) menaçait, hier, de quitter le gouvernement en cas de poursuite de l'offensive contre Falloujah. «Nous demandons au gouvernement de suspendre l'offensive contre Falloujah, de revenir à la table des négociations et d'opter pour l'option pacifique dans cette crise au lieu de l'action militaire» a déclaré un porte-parole de ce parti qui poursuit: «Nous avons sollicité une rencontre (hier) avec le Premier ministre Iyad Allaoui pour lui faire part de notre position et à la lumière de cette réunion, nous déciderons de rester au gouvernement ou de nous retirer.» Un retrait des sunnites du gouvernement à quelques semaines des élections générales de janvier prochain risque d'avoir un impact négatif sur ce scrutin que le gouvernement intérimaire tient à organiser malgré la dégradation de la situation sécuritaire.