Deux conférences de presse en l'espace de 15 jours, cela n'était pas arrivé depuis longtemps. La Gendarmerie nationale inaugure un nouveau style. Le gendarme auxiliaire, auteur de l'agression sur un citoyen de Souk El-Thenine, sera présenté à la justice civile ; l'enquête sera menée par des éléments de la Sûreté nationale. Telles sont les mesures prises par le commandement de la Gendarmerie nationale de Béjaïa à la suite de l'incident dont a été victime un citoyen dans la soirée de mercredi dernier à Souk El-Thenine (40km de Béjaïa). C'est en tout cas ce qu'a annoncé M. Sabri, lieutenant-colonel lors du point de presse tenu le lendemain jeudi. «Ces mesures, contraires aux procédures habituelles visent, selon le conférencier, une véritable transparence et franchise dans le traitement de ce dossier.» Visiblement peiné par cet incident, M. Sabri donne l'impression d'un homme déterminé à faire toute la lumière sur cette agression qui a défrayé la chronique locale et qui a donné lieu à un gigantesque rassemblement des citoyens mercredi soir devant le siège de la sûreté de la daïra de Souk El-Thenine exigeant du commissaire la livraison de l'agresseur. Le conférencier revient ensuite et en détails sur les circonstances de l'incident. Ainsi l'auteur de l'agression est présenté comme «un gendarme auxiliaire exerçant dans l'escadron de Bouhatem dans la wilaya de Mila. Il est originaire de Semaoune et présente, depuis un certain temps, des troubles psychiques. Le matin de l'incident, il devait se rendez-chez son médecin traitant à l'hôpital militaire Didouche-Mourad à Constantine pour une expertise médicale en vue d'une réforme du service militaire». Et comme pour étayer ses dires, le lieutenant-colonel étale sur la table des certificats médicaux et un ordre de mission difficilement lisible. «Profitant d'un moment d'inattention de ses chefs hiérarchiques, poursuit le conférencier, il s'empare de son arme et de sa tenue de combat qu'il dissimule dans un cabas avant de quitter la caserne. Arrivé à Souk El-Thenine dans l'après-midi du même jour, il met sa tenue qu'il couvre d'un habit traditionnel (kachabia) avant de se diriger vers un moniteur d'auto-école pour exiger de lui les clés du véhicule à bord duquel il se trouvait. Le propriétaire refuse et arrive même à maîtriser son agresseur qui réussit toutefois à lui assener au niveau du ventre à l'aide d'une arme blanche. La résistance de la victime a permis aux voisins d'intervenir pour arrêter l'agresseur et le conduire à la sûreté de daïra croyant qu'il s'agissait d'un terroriste». Après vérification de son identité, ajoute l'orateur, il s'est avéré qu'il est originaire de Semaoune daïra d'Amizour. Selon M.Sabri, l'enquête préliminaire révèle que l'agresseur voulait accaparer un moyen de transport pour se rendre chez lui à Semaoune, ce qui est pour notre interlocuteur, le mobile du délit. Il est à noter que, outre la traduction du mis en cause en justice, les responsabilités seront également déterminées pour les négligences commises par les chefs hiérarchiques, conclut le conférencier. Si le lieutenant-colonel parle de«négligences graves des chefs hiérarchiques», il n'en demeure pas moins que beaucoup de zones d'ombre persistent, car comment expliquer qu'un soldat souffrant de troubles psychiques soit laissé sans surveillance et en possession d'un ordre de mission. De nombreuses autres questions restent sans réponse et c'est d'ailleurs ce que beaucoup exploiteront pour envenimer davantage la situation. Notons enfin que c'est la deuxième fois que le commandement de la Gendarmerie fait appel à la presse en l'espace de 15 jours. Lors du premier point de presse, le même conférencier avait fait état d'un certain nombre de méfaits survenus à Béjaïa depuis que ce corps militaire avait été mis en quarantaine par la population. Six personnes assassinées, dix autres blessées, 40.000 DA rackettés par les terroristes, la découverte de neuf cadavres relevant de la criminalité à tout cela s'ajoutent 9 cas de vol de sable et 225 accidents de la circulation ayant causé la mort de 53 personnes. Il avait alors sollicité l'aide de la population.