La Russie et les Etats-Unis vont continuer à se parler pour trouver une issue au dossier syrien au lendemain d'une rencontre où Barack Obama et Vladimir Poutine ont étalé leurs divergences sur Bachar al-Assad. Lundi soir, à l'issue d'un entretien d'environ 90 minutes qui avait débuté par une poignée de main glaciale, le président russe a évoqué un entretien «constructif, étonnamment ouvert» avec son homologue américain et parlé d'une possible coopération. Le chef de l'Etat russe a assuré que le «travail commun» entre les Etats-Unis et la Russie devait être renforcé, disant réfléchir à la «mise en place de mécanismes appropriés». Son chef de la diplomatie Sergueï Lavrov a ensuite évoqué dans une interview à la télévision russe «des discussions entre les ministères de la Défense, entre les ministères des Affaires étrangères» afin de «rendre notre objectif commun (...), la destruction de l'Etat islamique, plus réalisable». «Le dialogue avec les Américains va se poursuivre de manière intensive dans les plus brefs délais», a renchéri le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, tout en précisant que Washington avait refusé de rejoindre le centre d'échange de renseignements militaires mis en place à Baghdad par l'Irak, la Russie, l'Iran et la Syrie pour combattre l'EI. Si le président russe n'a pas exclu des frappes de son aviation, il a écarté l'envoi de troupes au sol pour lutter contre les jihadistes de l'EI, mettant plutôt en avant sa volonté «d'aider davantage l'armée syrienne». Au lendemain de cette rencontre Obama-Poutine, les divergences demeurent nombreuses entre Russes et Occidentaux sur les moyens de mettre un terme à une guerre qui a déjà fait plus de 240.000 morts. Dans une interview au Wall Street Journal, le Premier ministre anglais David Cameron s'est ainsi dit ouvert à une collaboration avec la Russie pour vaincre l'EI tout en répétant que soutenir le président syrien Bachar al-Assad, comme le fait Moscou, «ne pourrait mener à la paix et à la stabilité dans la région». Preuve des tensions persistantes avec les Occidentaux, le chef du Kremlin n'avait pas résisté à la tentation de tacler Barack Obama et François Hollande: «J'ai le plus grand respect pour mes homologues américain et français mais ils ne sont pas des ressortissants syriens et ne doivent donc pas être impliqués dans le choix des dirigeants d'un autre pays». En écho aux propos du président russe, un responsable américain a décrit une «volonté partagée» de trouver des réponses face à la guerre en Syrie qui a provoqué une crise migratoire sans précédent, mais constaté un réel désaccord sur l'issue d'un éventuel processus de transition politique. Quelques heures plus tôt, les deux hommes avaient affiché leurs désaccords au grand jour à la tribune de l'ONU, s'accusant mutuellement d'avoir contribué aux tensions dans la région. Dans un discours centré sur la force de la diplomatie, exemples de l'Iran et de Cuba à l'appui, M. Obama a clairement indiqué qu'il fallait se préparer à tourner la page Assad: «Après tant de sang versé et de carnages, il ne peut y avoir un retour au statu quo d'avant la guerre». Et dans une référence claire à Moscou, il a dénoncé la logique consistant à soutenir un «tyran» qui massacre des enfants innocents» sous prétexte que l'alternative «serait pire». Pour M. Poutine, à l'inverse, le dirigeant syrien représente un gouvernement légitime avec lequel refuser de coopérer serait une «énorme erreur».«Nous devons reconnaître que personne d'autre que les forces armées du président (syrien) ne combat réellement l'Etat islamique», a lancé le chef du Kremlin qui faisait son grand retour à l'Assemblée générale de l'ONU après dix ans d'absence. La Russie a proposé lundi au Conseil de sécurité une résolution soutenant une coalition politique et militaire. Celle-ci devrait inclure également l'Iran et le régime syrien, a précisé devant des journalistes l'ambassadeur russe aux Nations unies, Vitali Tchourkine.