Poutine - Obama: «Je t'aime, moi non plus» Vladimir Poutine s'est imposé à l'ONU comme un acteur incontournable pour trouver une sortie de crise en Syrie, son homologue américain Barack Obama admettant qu'il fallait dorénavant coopérer avec Moscou. Pour son premier discours depuis dix ans à la tribune de l'Assemblée générale des Nations unies, le chef du Kremlin, allié du président syrien Bachar al-Assad, a proposé lundi une «large coalition antiterroriste» qui permettrait de terrasser les jihadistes de l'Etat islamique (EI). Il a évoqué une alliance internationale qui ressemblerait à «celle contre Hitler» durant la Seconde Guerre mondiale. Puis, à l'issue d'un entretien d'une heure et demie lundi soir avec le président Obama au siège de l'ONU à New York, Vladimir Poutine s'est montré presque magnanime, qualifiant cette première rencontre officielle depuis plus de deux ans de «constructive et étonnamment ouverte». «Selon moi, il existe une base de coopération sur nos problèmes communs», a-t-il dit devant la presse. A la tribune de l'ONU quelques heures plus tôt, Barack Obama lui avait entrouvert la porte. Le président américain avait reconnu que «les Etats-Unis (étaient) prêts à travailler avec tous les pays, y compris la Russie et l'Iran», alliés indéfectibles du régime de Damas, dans l'espoir de trouver une porte de sortie à la guerre qui a détruit le pays et fait plus de 240.000 morts en quatre ans et demi. Une forme d'aveu de Washington du rôle essentiel de Moscou au Moyen-Orient pour régler le casse-tête syrien. Un responsable de l'administration américaine a lui aussi parlé d'une rencontre «constructive» entre les deux présidents, admettant qu'il y avait des deux côtés «un désir commun de réfléchir aux moyens de pouvoir traiter ce qui se passe en Syrie». «Je crois que les Russes ont compris l'importance d'avoir une solution politique», a fait valoir ce responsable américain, tout en soulignant que les deux puissances étaient «en profond désaccord sur le rôle que jouera le président syrien dans le règlement de la guerre civile». De fait, aux yeux des Russes, M.Assad est un rempart contre les jihadistes de l'EI. Pour les Américains, il est au contraire un «tyran» qui continue de souffler sur les braises du conflit confessionnel qui a ravagé son pays. Pour Washington, le chef de l'Etat syrien devra partir dans le cadre d'une transition politique, même si le calendrier de sa sortie est négociable. Mais à l'ONU, c'est le président russe qui a remporté la mise et fait avancer ses pions. Il a proposé une résolution au Conseil de sécurité pour la mise sur pied d'une coalition politique et militaire internationale «élargie», qui inclurait Damas et Téhéran, pour combattre l'EI. Une manière pour Moscou de critiquer la coalition d'une soixantaine de pays, notamment européens et arabes, pilotée depuis un an par les Etats-Unis et qui a effectué des milliers de frappes en Syrie et en Irak. «Nos militaires ont compté qu'en une journée, l'Amérique réalise 43 frappes. Mais avec quel résultat?», s'est interrogé M.Poutine. Détaillant sa propre stratégie militaire, le chef du Kremlin n'a pas «exclu» la possibilité de frappes russes contre l'EI en Syrie, mais il a écarté l'envoi de troupes combattantes au sol. Il a en revanche dit envisager un renforcement de son soutien militaire à Damas. Les Russes consolident leur présence dans le port syrien de Tartous et construisent une base aérienne près de Lattaquié, dans le nord-ouest du pays. Les satellites américains observent une augmentation de l'activité militaire russe: chars, avions, hélicoptères et jusqu'à 2000 soldats selon la presse russe. Quant aux livraisons d'armes et d'équipements de défense à Damas, elles s'intensifient.