Nos réserves actuelles sont sur le déclin «Al Bahrou ouraakoum oua al adou amamakoume», «La mer est derrière vous et l'ennemi est en face de vous» Tarik Ibn Zyad l'Algérien lors de la conquête de l'Espagne JST10 Sonatrach: 1200 communicants et exposants. Des conférences, des tables rondes, plusieurs dizaines de communications et posters. Toutes ayant un objectif: faire le point sur les métiers de l'art. Le thème de cette année a, en gros, trait aux innovations technologiques. On peut remarquer avec plaisir, l'étroite symbiose entre l'université et l'industrie. Ce qui est un gage pour le futur. Les 10es Journées scientifiques et techniques de Sonatrach ont été mises à profit pour débattre des enjeux et relever les challenges auxquels Sonatrach devra faire face. Ces 10es journées marquent le 20e anniversaire de ces journées débutées en 1994, à un moment où on était bien seul. Il fallait montrer au monde, par l'organisation des Journées scientifiques que l'Algérie était debout qu'elle pouvait parler science malgré la terreur... Dans son allocution, le P-DG de Sonatrach le docteur Amine Mazouzi, a expliqué la feuille de route: «L'entreprise demeure engagée par ses missions traditionnelles. C'est dans ce sens que M.Mazouzi a estimé que le groupe Sonatrach est conscient que son «rôle est de soutenir la croissance économique du pays en accroissant de manière économique et significative nos réserves en hydrocarbures pour augmenter les niveaux de production et répondre à la demande nationale et internationale en énergie.» Le P-DG de Sonatrach relève les challenges que représente le «nouveau contexte doublement contraignant, caractérisé d'une part par une baisse des prix du pétrole et, d'autre part, par des ressources en hydrocarbures nécessitant des investissements de plus en plus importants, car plus complexes à développer et à exploiter». Des défis qui marquent de leur empreinte la stratégie du groupe, où «l'efficience et l'optimisation des pratiques et des processus (...), deviennent un axe essentiel». Ce que j'ai dit J'ai dans la conférence du lundi parlé des enjeux géopolitiques, expliqué pédagogiquement ce qui nous attend, les causes possibles de guerre. Des guerres pour l'énergie qui ont démarré depuis vingt ans, des guerres pour l'eau. Des recoupages des Etats, de l'imminence des changements climatiques avec les conséquences comme les réfugiés climatiques, la faim, la soif, le désert, les maladies. Bref un décor d'apocalypse qui va impacter essentiellement les pays vulnérables. J'ai parlé rapidement de la COP 21 pour dire qu'il n'y a malheureusement rien à attendre de concret. Chacun remettant aux calendes grecques ses engagements alors que la maison brûle comme le disait, en son temps, le président Jacques Chirac: «La maison brûle et on regarde ailleurs.» J'ai ajouté, que «Le fait est que la dépendance chronique de l'Algérie à la ressource hydrocarbure en fait une cible dans les guerres énergétiques à venir.» Il estime que l'Algérie est menacée par une conjoncture minée par une suroffre artificielle et créée de toutes pièces. Bien plus que la crise économique, nous devons sans tarder mettre en place les outils à même d'éviter une réédition du scénario du contrechoc pétrolier de 1986. Le constat Nos réserves actuelles sont sur le déclin, à moins de découvertes majeures, vingt ans tout au plus de production. J'ai fait un plaidoyer sur la nécessité de mettre en place cette transition vers le développement durable. Tous les pays développés et certains pays en développement ont des modèles énergétiques qui permettent de prévoir à l'avance la consommation d'énergie en fonction de données actuelles et de l'évolution de plusieurs paramètres comme la population, les réserves en énergie fossiles, les potentialités en énergie renouvelables, l'évolution des changements climatiques, mais aussi et surtout les habitudes et la façon de consommer pour évaluer le taux de gaspillage de l'énergie. Les prix dérisoires de l'énergie sous toutes ses formes mais aussi les prix de l'eau font qu'il est pratiquement impossible de continuer à ce rythme de consommation débridée. Sait-on par exemple que le gaz naturel que nous payons est facturé 20 fois moins cher que son prix à l'international, que le prix du gasoil est facturé 7 fois moins cher que celui de nos voisins, que le prix de l'eau à 5 DA est dérisoire, que le même mètre cube est facturé 20 fois plus ailleurs? L'Algérie est l'un des rares pays où le prix de l'essence est très bas. La vérité graduelle des prix bien expliquée aux citoyens sera admise d'autant que les classes à faible pouvoir d'achat paieront proportionnellement à leurs revenus. Il est anormal que le soutien des prix profite à tout le monde. Même le FMI recommande de cibler les catégories à aider. Pour une transition énergétique en Algérie Que faire, avant qu'il ne soit trop tard? La transition énergétique vers le développement durable est une nécessité. Consommer mieux en consommant moins économiser, recycler payer le juste prix pour l'énergie, l'eau; les matières premières importés est une nécessité. C'est aussi une justice. Faire en sorte que les classes à faible pouvoir d'achat soient épargnées. Cependant et dans tous les cas, l'Etat ne pourra pas continuer à mettre à disposition de l'énergie même à ceux qui peuvent payer. Il nous faudra penser à rationaliser la consommation pour faire en sorte que l' énergie soit durable... pour les futures générations. Les économies d'énergie ne peuvent être opérationnelles que si un juste prix est pratiqué. La transition énergétique est une vision nouvelle qui nécessite la chasse au gaspillage et le payement d'un juste prix en fonction des tranches de revenus de chacun. Cette transition énergétique vers le développement durable nous permettra aussi de tenir compte de plusieurs paramètres, la protection de l'environnement, la rationalité dans la consommation et un recours important aux énergies renouvelables d'une façon globale et d'une façon individuelle à la fois. Nous devons nous prendre en charge et être des citoyens responsables. Nos parents arrivaient à stocker l'eau de pluie. Nos parents faisaient des provisions de bois en été. Ce sont des milliers de tonnes de bois qui pourrissent et que l'on ne ramasse pas; pour en faire un combustible, voire un isolant dans les habitations comme c'est le cas du liège.. Ce sont autant de réflexes qui existent dans les autres pays et que nous avons perdus. Nous menons un train de vie qui ne correspond pas à la rationalité. Notre autonomie nous permettra de faire durer ce qui nous reste en réserves d'hydrocarbures plus longtemps, ce qui nous permettra d'assurer l'avenir des générations futures. Dans les modèles énergétiques proposés par les élèves ingénieurs pour 2030,l'accent est mis sur toutes les énergies fossiles et renouvelables (solaire, éolien, hydraulique) mais aussi sur la géothermie qui n'est pas exploitée. Dans le même ordre, les coûts de revient de l'énergie devraient être optimisés entre les pertes sur le réseau et la perte de chaleur par les cheminées des centrales; il y a des marges à récupérer peut être 1 à 2 TWH, c'est-à-dire au moins 5% de l'énergie; en clair, c'est l'équivalent d'une centrale électrique de 1000MW que l'on peut économiser en allant vers la cogénération en changeant le mode de production, notamment des turbines à gaz... Par ailleurs, nous avons 250 sources d'énergie géothermique qui peuvent contribuer valablement à remplacer les énergies fossiles (pétrole et gaz naturel), notamment dans le chauffage urbain, industriel mais aussi agricole. Nous arriverons, ainsi, à un bouquet énergétique où outre les énergies fossiles, le développement des énergies renouvelables, nous mettrons en oeuvre le plus grand gisement de l'Algérie, celui des économies d'énergie, le gaz de schiste est une énergie comme une autre. Il faut savoir qu'elle ne sera pas génératrice de rente. L'exploitation de cette richesse se fera quand la technologie sera mature et respectueuse de l'environnement. Le gaz de schiste aura toute sa place si on sait s'y faire, si on prend les précautions nécessaires par la mise en place d'une réglementation drastique, si on forme les compétences dans ce domaine et si enfin, on développe une veille technologique - en demandant à Sonatrach de former dès maintenant les futurs cadres à même de maîtriser valablement cette technique à même de suivre les meilleures méthodes d'exploitation. Un plan Marshall pour les énergies renouvelables Il nous faut aussi un véritable plan Marshall en sachant bien que le modèle énergétique est plus large car il englobe d'abord, un modèle de consommation à différents horizons 2030, 2050.A titre d'exemple, nous serons 55 millions d'habitants, nous consommerons peut-être 2000 kWh par habitant. Par an cela ferait 125 TWh, soit trois fois la puissance installée actuelle en électricité. C'est dire la quantité de panneaux solaires et d'éoliennes à mettre en place. Ceci ne concerne que l'électricité, il y a aussi les carburants, mais surtout le plus grand gisement qui est celui des économies d'énergie évalué à 20%. On peut économiser l'équivalent de 8 -10 millions de tonnes de pétrole par des gestes éco-citoyens. La stratégie énergétique est une cause nationale qui transcende les partis Cette stratégie est de mon point de vue un sous-ensemble d'une problématique globale qui est celle de passer d'un modèle de consommation où tout est gratuit et où personne n'est responsable vers un modèle de consommation vertueux où chaque calorie épargnée grâce à des économies est une calorie disponible pour l'exportation ou pour les générations futures. Il ne faut pas oublier que notre banque est notre sous-sol. De ce fait, cette transition énergétique devrait avoir le consensus du plus grand nombre. Car au moment de l'application, ce sont les citoyens avec un comportement ecocitoyen qui feront que cette stratégie réussira. De plus, nous sommes convaincus que la transition énergétique est l'affaire de tous les départements ministériels, c'est l'école où l'apprentissage de l'écocitoyenneté se fera, c'est la formation professionnelle et l'enseignement supérieur qui auront à former les milliers de techniciens et d'ingénieurs, dont la formation qui a disparu devrait en toute logique être réhabilitée. C'est aussi les affaires religieuses où les prêches porteraient sur les dégâts du gaspillage, c'est évidemment l'environnement, l'éco-tourisme mais aussi le commerce qui devrait contribuer avec l'industrie et l'énergie à l'interdiction des appareils électroménagers et véhicules énergivores en électricité ou en carburant. C'est enfin l'information qui devrait convaincre les chaînes publiques et privées de l'importance de cette cause nationale en faisant preuve de pédagogie. Nous avons une fenêtre de quatre à cinq ans, au plus, pour pouvoir mettre en oeuvre une politique volontariste basée sur un mix, mais surtout une sobriété énergétique. l'exemple du carburant perdu dans les embouteillages «de l'ordre de 500.000 dollars/jour à Alger, soit l'équivalent de 120.000 tonnes de carburant, d'où la nécessité d'une politique des transports mais aussi d'utilisation de sirghaz et GNC», est à méditer l'industrie du recyclage qui constitue un trésor et une alternative économique. «Un calcul montre que le gain généré par le recyclage peut atteindre 800 millions d'euros, si toutes les décharges étaient exploitées rationnellement Le recyclage des déchets ménagers permettrait la récupération d'une grande partie du un million de tonnes de plastiques, un million de tonnes de papier et plusieurs milliers de tonnes de verre et de métaux. A cela s'ajoutent les milliers d'emplois qui seront créés par la chaîne de recyclage. Intervenant lors de la table ronde que j'ai présidée et organisée dans le cadre des Journées scientifiques et techniques de Sonatrach intitulées «Le monde de l'énergie, atouts et défis de l'Algérie», Le Pr Rabah Kerbachi, de l'Ecole polytechnique d'Alger, a souligné, hier à Oran, que «l'Afrique n'est pas responsable de la situation du réchauffement de la planète car, elle émet très peu de gaz à effet de serre», il a estimé que tous les pays doivent participer à l'effort mondial contre le réchauffement climatique. Comme solution intermédiaire sur la route vers les énergies propres, Le Dr Mahfoud Belhamel, ancien directeur général, suggère d'aller vers le gaz naturel, l'énergie la moins polluante parmi les énergies fossiles. Dans ce cadre, l'orateur a proposé la mise en place d'installations hybrides (gaz/solaire), qui est une solution de transition avant d'aller vers le tout-solaire. «On peut également aller vers les autres énergies propres comme la géothermie et le vent». Place pour l'Algérie dans l'Opep L'attitude de l'Arabie saoudite au sein de l'Opep n'a rien à voir avec le texte fondateur de l'Opep? à savoir la défense des intérêts des pays producteurs. Nous assistons à une politique de bradage. La situation actuelle est bien complaisante comparativement aux positions passées nées du dialogue entre le regretté roi Fayçal et le président Houari Boumediene, et qui avait abouti au premier choc pétrolier de 1973. En effet, la dégringolade des cours du brut ne semble pas affecter la stratégie de l'Opep, les cours restent accrochés très en deçà de la barre des 50 dollars, car plombés par une surabondance de l'offre; le cartel ne bouge pas d'un iota pour en réduire l'impact. Bien au contraire. Loin de respecter les quotas de production fixés à 30 millions de barils/ jour, l'offre Opep continue d'augmenter. La production septembre a atteint une moyenne 31,68 de millions de barils par jour, contre 31,57 millions de bpj un mois auparavant. Plus que jamais l'utilité de l'Opep, est à prouver. De ce fait, dans une institution où - mis à part les rentiers du Golfe - personne n'est écouté, la sortie de l'Opep est à étudier sérieusement. L'avenir: l'entrepreneuriat des jeunes et le développement durable Belle initiative d'Ooredoo sponsor officiel de Injaz El Djazair. Des prix à des élèves ingénieurs à GEC (Green Shall Prevail) de l'Enstp (Ecole nationale supérieure des Travaux publics) dont le projet consiste à utiliser des engrais à 100% naturels, à caractère écologique, produits à base de déchets urbains exclusivement végétaux et emballés dans du carton recyclé, destiné au jardinage biologique, l'horticulture et à l'agriculture. Le 2e Prix du meilleur impact social a été attribué à Replay de l'Ecole nationale polytechnique (ENP). Le principe du projet primé consiste en l'organisation de jeux de société avec trois avantages, à savoir la publicité car il offre une plate-forme pour les partenaires, son autre sous-produit consiste en le recueil de grandes quantités de déchets recyclables. Le troisième Prix ou Prix du Meilleur Produit de l'année a été remis à Green Phoenix de l'Ecole des hautes études commerciales-Ehec. L'idée traduite en projet consiste en la collecte, le tri et le compactage de PET et d'aluminium, permettant de convertir les unités introduites en bons de réductions. Dans ce cadre, il est possible de mettre en oeuvre cette utopie du développement durable en incitant les jeunes à créer des «start up dans ce domaine», Nous aurons des Ansej du développement durable et chaque année le salon d'exposition devrait primer les plus porteuses des start up et les aider à démarrer... Plus largement, l'avenir ce sera ce que nous voulons qu'il soit. Point de fatalité, du travail, de la sueur, de l'intelligence. L'Algérie ne doit pas lier son avenir aux convulsions erratiques d'un baril de pétrole. Il nous faut sortir intelligemment de la rente en allant vers le développement durable. Il faut nous départir de la mentalité du «beylek» en passant de la situation actuelle où personne n'est concerné à la situation où chacun assume sa part de responsabilité, si on veut qu'il y ait un avenir pour ce pays. Elle devrait faire l'objet d'un consensus qui transcende les clivages, car les faits sont têtus, les mêmes causes produisant les mêmes effets. Nous devons prendre les devants dès maintenant. Nous sommes tous comptables devant l'Histoire et les générations futures. Ces dernières nous seront reconnaissantes d'avoir pensé à elles en leur laissant une Algérie de l'intelligence qui tourne le dos définitivement à la rente.