L'échange d'amabilités auquel se livrent certains ministres, témoigne de la grogne qui gagne, peu à peu, l'Exécutif. Plus solidaire que moi, tu meurs ! Tandis qu'on ne cesse, au niveau de la sphère décisionnelle, celui du gouvernement plus précisément, de s'enorgueillir d'une harmonie gouvernementale présentée, par plus d'un, comme étant le parangon d'une véritable démocratie, l'actualité de la scène politique donne, quant à elle, une autre impression. Celle que rien ne va plus entre les membres de l'équipe Ouyahia. Les multiples coups de bec et l'échange d'amabilités auxquels se livrent, presque sans retenue, différents ministres depuis quelques jours, témoignent d'un malaise dont l'ampleur paraît grossir à mesure que s'approche, de près ou de loin, un rendez-vous politique majeur: celui d'un remaniement gouvernemental dont certains, parmi les «croqueurs» de la vie publique, annoncent l'imminence. Car, pragmatisme politique oblige, chacun des ministres, notamment ceux présentés par certains analystes comme d'éventuels partants, opèrent leur propre forcing duquel ils espèrent une clémence présidentielle: tant celle qui les maintient à leur poste que celle leur ouvrant la voie à d'autres fonctions institutionnelles. Le pic de cette ébullition institutionnelle a été atteint lors de la présentation à l'APN, par Abdelatif Benachenhou, de la «tumultueuse» loi de finances 2005. Déjà, critiquée par les députés, bien qu'elle soit, après amendements, adoptée par les deux chambres du Parlement, la loi «Benachenhou» n'a pas été pour autant du goût de certains ministres dont la réaction la plus ronchonne a été celle fulminée tout récemment par la ministre de la Culture. En effet, rebondissant sur l'affaire du pillage du Parc national du Tassili par cinq Allemands et tout le brouhaha médiatique qui s'en est suivi, Khalida Toumi, s'en est prise, avec hargne, au ministre des Finances auquel elle reproche son opposition à l'augmentation du budget de la culture, le maintenant ainsi à son expression quasi symbolique. Une opposition qui explique, selon la ministre, l'incapacité de ses services à protéger les richesses archéologiques du Grand Sud. Samedi dernier, c'était au tour du ministre de l'Environ-nement d'ouvrir le feu. Interrogé sur les incidences de l'affaire des pillards allemands et les critiques à peine voilées de Mme Toumi, dont son département a fait l'objet, Cherif Rahmani, sans la nommer, charge sa collègue du gouvernement et disculpe superbement son secteur des conséquences de cette affaire puisque: «nous avons apporté 12 millions de dollars pour la protection du Parc national du Tassili» a-t-il rétorqué. Par ailleurs, la manière peu réfléchie, voire aléatoire, avec laquelle a été géré le dossier des «touristes» germaniques par les différents membres du gouvernement, accrédite cette hypothèse tant l'affaire a mis à nu la vulnérabilité et les limites de cette cohésion gouvernementale qu'on chante, à chaque fois, avec tambour et trompette. L'on sait que derrière l'apparition officieuse d'un tel marasme, se profilent des intérêts et des enjeux politiques de taille qui mettent souvent aux prises les différents partis politiques, FLN, RND, MSP qui composent le gouvernement, notamment ceux de la coalition présidentielle dont l'harmonie n'est pas sa première vocation. Certes, ce n'est pas la première fois qu'on assiste à une telle situation. Le passé récent marqué par la succession en une période très courte, d'une kyrielle de gouvernements. Mais que cela arrive au moment où l'Algérie au retour de la paix et le rétablissement institutionnel aidant, a besoin beaucoup plus de stabilité et de constance dans le fonctionnement des institutions que de ruer dans des aventures politiques qui ne serviront en rien l'intérêt suprême de la nation, sur lequel, au demeurant, s'arc-boute le programme de ce même gouvernement qui est, en fait, l'appendice de la politique de Bouteflika.