Pour Ramtane Lamamra, l'Algérie «a un réseau d'amitiés et coordonne son action tant au niveau de la diplomatie que de ses services de sécurité». Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a soumis au Conseil de sécurité la proposition d'un nouvel émissaire des Nations unies pour la Libye, le diplomate allemand Martin, en remplacement de Bernardino Leon. Ancien ambassadeur allemand en Irak et en Egypte, M.Kobler dirige la mission de l'ONU au Congo (Monusco) depuis 2013. Ce diplomate du ministère allemand des Affaires étrangères a rejoint l'ONU en 2010, comme émissaire-adjoint pour l'Afghanistan puis comme émissaire spécial en Irak, de 2011 à 2013. Le Conseil de sécurité de l'ONU avait jusqu'à hier soir pour éventuellement s'opposer à cette nomination, mais tout indique qu'elle sera formellement confirmée dans les jours qui viennent. Cette décision résulte des derniers évènements qui ont contrecarré les certitudes du responsable sortant de la Minusma quant à la signature de l'accord pour la formation d'un gouvernement d'union nationale par les deux factions rivales de Tobrouk et de Tripoli. Après avoir multiplié les exigences, côté Tripoli, et surenchéri en rejetant un texte pourtant déjà accepté, côté Tobrouk, chacune de ces deux factions se renvoie la balle en accusant la partie adverse d'être responsable de l'échec de la médiation onusienne menée depuis un an malgré des coups portés de part et d'autre par les deux gouvernements et leurs forces armées réciproques. Le Conseil de sécurité, suivi par plusieurs pays occidentaux et notamment les Etats-Unis et la France, a déjà menacé de sanctionner ceux qui bloqueraient le processus de paix ou saperaient une transition politique en Libye. En vain. Au sein de la médiation onusienne, mais aussi dans le cadre du Groupe des pays voisins qu'elle conduit sous l'égide de l'Union africaine, l'Algérie n'a eu de cesse de multiplier les initiatives, recevant les représentants des tribus, les chefs de milices et autres groupes armés à l'exclusion des groupes terroristes, pour tenter de concilier les points de vue et baliser ainsi la voie à un accord inclusif et durable. Sans doute, et cela a été réaffirmé par le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, dans un entretien accordé au quotidien Le Monde voici trois jours, «cela ne signifie pas que l'Algérie n'a pas d'autres moyens d'action» dès lors qu'elle «a un réseau d'amitiés et coordonne son action tant au niveau de la diplomatie que de ses services de sécurité». Des contacts soutenus avec les diverses factions qui se disputent le pouvoir en Libye permettent de conserver un certain espoir de rétablir la dynamique de la négociation en vue de parvenir à cet accord espéré non seulement par les pays voisins de la Libye, par la sous-région maghrébine, par la communauté internationale mais aussi et surtout par le peuple libyen lui-même à travers ses différentes composantes. C'est à cette aune qu'il convient d'apprécier l'appel lancé mercredi par le Conseil des sages et des notables de Mesrata qui invite les villes et les tribus à «instaurer la paix et à combattre la criminalité», ouvrant la voie de «la réconciliation et de l'entente entre les parties libyennes». Cet appel a une importance indéniable dans le contexte actuel où les tensions sont à leur paroxysme, surtout après l'attaque de l'hélicoptère transportant un dirigeant des milices de Fadjr Libya, Hussein Abou Dayya, à El Maya, non loin de la ville de Zawia qui a perdu aussi le chef de la milice locale, Souheib al Rammah. Cette attaque compromet gravement la sécurité et la protection des axes routiers dont celui desservant l'ouest de la capitale Tripoli en butte à «des actes criminels». Le fait est que des faucons existent dans les deux camps antagonistes et s'efforcent de parasiter, voire de faire avorter, le processus de négociations pour des questions d'intérêt personnel, mais le drame affecte principalement le peuple libyen dont la grande majorité attend avec impatience une solution politique car elle souffre des conséquences de ces affrontements. C'est la raison pour laquelle l'Algérie entend poursuivre son travail de médiation dans le cadre onusien afin de parvenir au consensus nécessaire pour que le temps de la paix et de la réconciliation arrive au plus vite. En aucun cas, le statu quo ne saurait convenir pour le peuple libyen, au premier chef, ni pour les pays voisins de la Libye dont l'Algérie et la Tunisie au premier plan, ni pour la région méditerranéenne qui fait face, dans sa partie européenne, à un grave problème de réfugiés, ni pour toute la communauté internationale qui mesure enfin les implications d'une dérive politico-sécuritaire aux retombées plus que néfastes.