Zohra Drif - Bitat-Khalida Toumi - Abdelhamid Aberkane «Notre démarche est citoyenne. Elle n'est pas une initiative politique», a précisé Louisa Hanoune chargée par ces personnalités de répondre aux questions des journalistes. Dix-neuf personnalités nationales dont des militants politiques, des militants des droits de l'homme, d'anciens cadres de l'Etat, des ministres et des hommes et femmes de culture ont rendu publique hier une lettre au président de la République dans laquelle elles demandent à être reçues par celui-ci. Se présentant comme «un groupe de citoyens et de citoyennes attachés à leur pays et à leur patrie et que seul leur patriotisme les fait agir», ces personnalités, parmi lesquelles Abdelkader Guerroudj, ancien condamné à mort, Zohra Drif-Bitat, Lakhdar Bouregâa, Abdelhamid Aberkane, Khalida Toumi, Nourredine Benissad et Rachid Boudjedra, ont demandé à Abdelaziz Bouteflika «de bien vouloir les recevoir» afin de partager avec elles leurs inquiétudes quant à l'avenir du pays. «Nous sommes un groupe de citoyens et de citoyennes très attachés à leurs pays, à leur patrie, mais très inquiets des développements récents dont les conséquences peuvent être désastreuses. Ce ne sont que notre viatique de patriotisme et notre crainte légitime pour l'avenir de notre pays qui motivent notre action,» a précisé d'emblée la moudjahida Zohra Drif-Bitat. Louisa Hanoune, qui était également de la partie et que le groupe a chargé de répondre aux questions des journalistes, a déclaré de prime abord que la démarche entreprise est foncièrement citoyenne et n'a absolument rien à voir avec le parti. «Notre démarche est citoyenne. Elle n'est pas une initiative politique. Les portes sont fermées ces derniers temps. Beaucoup de décisions se prennent au nom du président et nous ne savons pas s'il est au courant. C'est donc contraints et forcés que nous rendons publique notre lettre. Le recours à la presse pour faire parvenir notre demande d'audience au président est dicté par notre crainte légitime qu'elle ne vous parvienne jamais par les canaux institutionnels officiels,» a-t-elle indiqué. En effet, selon la lettre déposée au niveau du cabinet du président de la République et rendue publique hier, il est écrit, en plus du fait que la présidence soit fermée et que les décisions politiques soient monopolisées par des cercles «occultes», que l'Algérie vit «un renoncement à la souveraineté nationale», «une déliquescence de ses institutions», «un règne de l'obscur, l'illégal et l'illégitime», une dégradation de la situation économique et sociale et «un abandon des cadres algériens qui sont livrés à l'arbitraire, aux sanctions partiales en violation des lois et règlements de la République et des procédures légales». Interrogé par L'Expression sur les propositions éventuelles que le groupe compte présenter au chef de l'Etat, Louisa Hanoune s'est montrée très engagée mais très mesurée également. «Nous n'avons aucun projet politique et nous ne comptons pas nous positionner en alternative. Nous ne demandons rien. Nous voulons simplement voir le président en tant que citoyens et citoyennes lui faire un état des lieux, car, tel que nous le connaissons, Bouteflika ne peut pas cautionner ce qui est en train de se faire. Bouteflika est responsable de la nation et de la pérennité de l'Etat. Il ne peut pas laisser faire. Nous n'avons pas la prétention de lui présenter des solutions. D'ailleurs, nous sommes issus d'horizons politiques différents et nous n'avons pas la même vision des solutions qui peuvent être apportées. Nous allons juste lui présenter la situation telle qu'elle est et lui demander d'intervenir pour mettre un terme aux dérives en cours,» a-t-elle expliqué. Et d'ajouter: «La situation est très grave. Le pays est menacé dans son intégrité. Aujourd'hui, il y a trois possibilités: soit monter au maquis soit sortir dans la rue soit dialoguer. Nous sommes contre les deux premières options et nous optons pour le dialogue.» Concernant l'aboutissement ou non de cette démarche, Louisa Hanoune ainsi que ceux parmi les signataires qui étaient présents, notamment Khalida Toumi, Lakhdar Bouregaâ, Rachid Boudjedra, Zohra Drif-Bitat et Abdelkader Guerroudj, se sont dits très optimistes. Toutefois, si jamais le chef de l'Etat ne se résout pas à les recevoir, ce sera là une bonne raison de continuer et de ne jamais abandonner la démarche. «Si le président nous reçoit et nous écoute tant mieux! S'il ne nous reçoit pas ou s'il nous reçoit, nous ne comptons pas abandonner notre démarche», a fait savoir Louisa Hanoune.