Larbi Ould Khelifa a été débordé de tous les côtés «Cette loi poussera les Algériens à sortir dans la rue.» La séance du vote de la loi de finances 2016 est des plus houleuses jamais observée à l'APN depuis des lustres. L'histoire retiendra que le forcing effectué par l'Exécutif grâce aux députés de la majorité, qui «ne représente en fait que 7% de voix exprimées lors des législatives de 2012», a été pour le moins très difficile. la LF 2016 a été adoptée par la totalité des députés de la majorité (ceux du FLN, RND, ceux qui ont rejoint le TAJ et indépendants), en l'absence des députés de l'opposition qui se sont retirés de l'hémicycle. Le vote a été boycotté par les parlementaires du FFS, du PT, de l'Alliance de l'Algérie verte (AAV) et du FJD. Les parlementaires en colère ont interrogé en vain la conscience des députés du FLN, qui ont fait un revirement spectaculaire, après avoir dénoncé plusieurs dispositions de ce projet de loi. Les articles les plus contestés, abrogés par la Commission des finances, la veille ont été réintroduits sur proposition du ministre à la plénière, tels quels dans le PLF 2016. Il s'agit de l'article 66 stipulant la réouverture du capital des entreprises publiques. Cet article par lequel le gouvernement essaye «de contourner ou de vider de sa substance la règle des 51/49%, stipulant que «les entreprises publiques économiques y compris, qui réalisent des opérations d'ouverture de capital en direction de l'actionnariat national résidant doivent conserver au moins 34% du total des actions ou des parts sociales. A l'expiration d'une période de cinq ans, l'actionnaire national peut lever auprès du Conseil des participations de l' Etat une option d'achat des actions détenues par l'entreprise économique». Le refus d'accorder un point d'ordre demandé par le président du groupe parlementaire du PT, a soulevé un énorme tollé à l'intérieur de l'arène parlementaire. Le président de l' APN a beau se ressaisir en daignant soumettre au vote la mise au point du PT, l'ensemble des députés de l'opposition, indignés notamment ceux du PT et de l'Alliance de l'Algérie verte (AAV) n'ont pas hésité à envahir la tribune de l'Assemblée, en perturbant ainsi le déroulement du vote des amendements du rapport complémentaire du projet de loi de finances 2016. Dans le sillage d'une [débandade généralisée, les députés en sont venus aux mains. Même les ministres présents, à l'image de Abderrahmane Benkhalfa et Ould Ali El-Hadi et les absents comme Abdessalem Bouchouareb ont en pris pour leur grade. Dans un vif échange d'hostilités, les députés du PT reprochent au ministre de la Jeunesse et des Sports, d'avoir déclaré publiquement: «Je suis un bandit et je fais partie d'un gouvernement de bandits.» «Une déclaration grave «enregistrée», semble-t-il par le PT. Le président de l' APN, Ould Khelifa n'a pas manqué de défendre le ministre: «C'est un bandit d'honneur!», réplique-t-il. Les élus munis de pancartes sur lesquelles on pouvait lire «Ne touchez-pas à l'argent du peuple», «Non à la privatisation de l' Etat», scandaient haut et fort «Algérie sociale démocratique», «Les traîtres dégagez», «Oligarques et ministres dégagez»... etc. En somme, les députés font ce qu'ils peuvent pour dénoncer «l'abandon du caractère social de la politique du gouvernement à travers ce texte de loi». Dans leurs interventions, les députés de l'opposition ont relevé «la part belle accordée aux tenants de l'argent sale et les sanctions infligées à la majorité des Algériens par le relèvement des taxes et impôts sur les produits énergétiques, le carburant et même les couches pour adultes à travers des dispositions vivement contestées de ce texte de loi». En plus des actions de protestation, émaillées par des bagarres, altercations verbales, menées à l'intérieur et à l'extérieur de l'hémicycle, les partis d'opposition ont publié un communiqué commun dans lequel ils dénoncent l'implication des hommes d'affaires et de l'argent sale» dans l'élaboration du projet de loi de finances. Selon eux, le bureau de l'APN et la commission de finances et du budget ont perpétré un faux barrage contre les propositions d'amendements des députés de l'opposition. Le projet en question «consacre la privatisation de l'Etat après celle du pouvoir», ajoutant que «le PLF 2016 annule le caractère social de l'Etat et appauvrit le citoyen». Le député de l'Alliance verte affirme que les députés de la majorité et le gouvernement font gagner 9 millions de dollars au FCE à travers les avantages fiscaux accordés dans le cadre de ce projet de loi. Sur le vote du maintien de l'article 71, rejeté, abrogé par la commission des finances, avant sa réintroduction de nuit par la commission, «en commettant au passage de graves dépassements et violation du Règlement intérieur de l'Assemblée, voire de la Constitution», les députés contestataires quittent l'hémicycle. Certains députés de l'opposition ont qualifié ce projet de loi de «crime contre l' Algérie». A travers cette loi, «le gouvernement pousse les Algériens à sortir dans la rue». Les députés de l'opposition dénoncent «les agissements de gangsters». Après avoir chahuté la séance et occupé la tribune, les députés de l'opposition quittent l'hémicycle et improvisent une manifestation à l'extérieur, où un dispositif de sécurité impressionnant a été dépêché au boulevard Zighoud Youcef.