«Le Front Polisario a été informé officiellement que le Maroc refusait d'entrer en négociations directes», a déclaré le représentant du Front auprès de l'ONU. Le chef de la diplomatie algérienne avait vu juste. Les propos du souverain marocain «résonnent comme un pari sur le pire», avait déclaré le 8 novembre Ramtane Lamamra après l'allocution prononcée, deux jours auparavant, par Mohammed VI à l'occasion de la célébration du 40ème anniversaire de l'invasion du Sahara occidental par le Maroc. Le monarque alaouite avait pris la parole, à El Ayoun, un des hauts lieux de la résistance sahraouie, pour déverser des propos particulièrement hystériques vis-à-vis de l'Algérie tout en scellant le sort du peuple sahraoui. Hormis son projet de large autonomie, Mohammed VI ne veut rien entendre d'autre. «Comme je l'ai affirmé dans le Discours de la Marche verte de l'année dernière, cette Initiative est le maximum que le Maroc peut offrir», avait affirmé, le 6 novembre dernier, notre «ami» le roi. Il vient d'en apporter la preuve en refusant de s'asseoir à la même table que les Sahraouis pour trouver une solution au conflit du Sahara occidental. «Le Front Polisario a été informé officiellement que le Maroc refusait d'entrer en négociations directes», annoncées début novembre dernier par le secrétaire général de l'ONU, M. Ban Ki-moon, a déclaré Ahmed Boukhari, le représentant du Front Polisario auprès de l'ONU cité par l'APS. L'espoir de voir la question sahraouie par des voies pacifiques se réduit. Le Maroc vient de prendre l'option pour le pire annoncée par M.Lamamra. Elle est attestée par l'interdiction réitérée au représentant personnel de l'ONU de se rendre au Sahara occidental. «Le Maroc a réaffirmé à l'envoyé spécial du secrétaire général de l'ONU, M. Christopher Ross, qu'il ne remettrait plus les pieds au Sahara occidental», a révélé le diplomate sahraoui. «Il n'a rien à faire ici bien sûr. C'est hors de question qu'il se réunisse avec qui il veut à Laâyoune», avait proclamé, il y a un mois à peine, le ministre marocain des Affaires étrangères Salaheddine Mezouar dans un entretien accordé à l'agence de presse espagnole EFE. Ce qui annihile de fait tous les efforts fournis par l'envoyé spécial de l'Organisation des Nations unies pour relancer des pourparlers directs entre les deux parties en conflit. Une autre manière plus sournoise de le pousser pour qu'il jette l'éponge. Un défi lancé à la face du secrétaire général de l'Organisation des Nations unies qui avait appelé de tous ses voeux de «véritables négociations» directes. «J'appelle instamment toutes les parties dans la région et au sein de la communauté internationale la plus large de tirer profit des efforts intensifs (menés) par mon envoyé personnel (Christopher Ross) pour faciliter le lancement de vraies négociations dans les prochains mois», avait déclaré Ban Ki-moon, le 4 décembre 2015, à partir de New York. «Sous ma direction, mon envoyé spécial Christopher Ross a intensifié ses efforts pour faciliter l'entrée des (deux) parties (Front Polisario et le Maroc) dans des négociations sans conditions préalables et de bonne foi afin de parvenir à une solution politique mutuellement acceptable, permettant l'autodétermination du peuple du Sahara occidental» avait rappelé le SG de l'ONU tout en soulignant l'échec du processus de négociations mené sous son égide depuis 2007. Un appel pulvérisé par le Maroc qui a décidé de défier l'Organisation des Nations unies. Christopher Ross qui s'est adressé hier au Conseil de sécurité a certainement pris acte de ce nouveau croc-en-jambe du Makhzen. Comment réagira-t-il? Pour le Front Polisario il n'y a plus lieu de tergiverser. «Nous nous attendons à ce que Ross soit transparent et clair dans son briefing au Conseil de sécurité afin de permettre à ses membres de disposer de tous les éléments nécessaires permettant de constituer une idée concrète sur les dangers qui pèsent sur le processus de paix», a indiqué Ahmed Boukhari qui espère «un message fort de la part du Conseil de sécurité pour sauver le processus de paix qui est en danger et exercer les pressions nécessaires pour que le Maroc coopère d'une manière sincère et concrète avec M. Ross». L'ONU lavera-t-elle l'affront? Gageons que M.Ban ne gardera pas longtemps le silence.