M. Azzeddine Mihoubi, ministre de la Culture et le poète Omar Boudjerda Quand la poésie remplit sa fonction primordiale, elle est populaire, car elle privilégie le libre sentiment du vivant et le valorise. Samedi 28 novembre 2015, à 14h30, M. Azzeddine Mihoubi, ministre de la Culture a ouvert, à la Bibliothèque nationale d'Alger-El Hamma, le 5ème Colloque interarabe de la littérature populaire. Sous l'égide du ministère de la Culture et conjointement organisée par l'Association algérienne pour la littérature populaire, présidée par M.Toufik Ouamane, lui-même poète, et la Bibliothèque nationale d'Alger dont le directeur général est M. Yasser Arafat Gana, cette très agréable manifestation poétique autour du thème «littérature populaire» (Al-Adab ach-chabî), a réuni des poètes venus de plusieurs régions d'Algérie, ainsi que de douze pays arabes: Palestine, Egypte, Libye, Tunisie, Mauritanie, Maroc, Jordanie, Emirats arabes unis, Arabie saoudite, Liban, Syrie, Irak. De joyeux youyous pour la littérature populaire Tous ces poètes sont venus pour des échanges d'études, d'écriture et d'expérience dans ce vaste domaine de l'expression orale poétique, à la fois, inspirée par l'homme et la nature où qu'ils se trouvent et ancrée dans ces deux éléments inséparables de la vie tout court. Cette poésie fait leur éloge tout en analysant, avec le coeur et la raison, tout ce qui leur donne vie, tout ce qu'ils donnent, eux, également à la vie. La Terre Maternelle, l'Homme, la Femme, le Couple, la Société composent la puissance, l'ardeur et la tendresse de l'Existence. Ils consacrent le fait du sacré. En Algérie, nous observons ces aèdes qui vont, de marché en marché hebdomadaire, faire les récits des aventures merveilleuses des contes et légendes, et toujours de l'Histoire d'un peuple, le nôtre et celui qui ressemble au nôtre. Ce sont souvent des chants, mais le Verbe est haut et fort à la dimension du message à délivrer. Quiconque n'y croit pas, il finira bien un jour par comprendre que la poésie populaire appartient au peuple et le caractérise; elle a un rôle éducatif, récréatif, éminemment formateur de la personne humaine. Cette poésie des hameaux, des campagnes, des Hautes Plaines, du Sahara est perçue comme un art spirituel lénifiant contre les vicissitudes de la vie; elle revigore l'humain, l'aide à aimer et à être aimé. Être juste et bon. Être unique et multiple. Être Petit et Grand. Croire et Discuter. Savoir et Comprendre... À cet effet, il n'est rien de plus efficace que l'amour de son prochain, que de lui parler, de coeur à coeur, la langue du quotidien, les mots et expressions les plus simples et les plus beaux. Rappelez-vous Hiziya, ces qaçâid et ce chîr que l'on entend ici et là, parfois dans nos quartiers, dans nos vergers, dans nos champs, dans nos montagnes, dans nos oasis,... sur nos chemins de la vie. Il n'est point de vraie Maison, dit-on chez nous, qui n'ait pas un authentique poète... Cette première séance du samedi 28 novembre 2015, dans la Salle Rouge (El Qâat el Hamrâ') de la Bibliothèque Nationale d'Alger, a été ouverte par un discours, sobre mais dont le pouvoir est long, du ministre de la Culture. Il a rappelé - il est poète - les qualités infinies de la «poésie populaire» et son importance dans la culture générale populaire algérienne et dans d'autres pays. Des intervenants, dont M.M.Toufik Ouamane et M.Yasser Arafat Gana, ont pris la parole chacun en ce qui le concerne directement pour cadrer les activités de ce 5ème Colloque. Il a été suivi de la remise d'un juste souvenir de remerciement à M.le ministre de la Culture pour ses intenses activités en faveur de la Poésie populaire. Puis il a été procédé à la remise de signes de reconnaissance et d'encouragement aux cinq lauréats honorés: Omar Boudjerda (Algérie), Mourad Kadiri (Maroc), Belkacem Abdellatif (Tunisie), Salah Gherouda Ryani (Libye) et Tarek Abou Naga (Egypte). À chacun d'eux a été décerné «le Bouclier de l'Association algérienne de la littérature populaire». Ensuite, tour à tour, de nombreux auteurs invités ont déclamé des poèmes, dits «genre populaire», avec passion, ferveur, animation et... humour, - un échantillon magnifique fort divertissant en ces temps moroses, et l'on connaît bien l'allure sémillante de la satire poétique, évidemment!... À maintes reprises, la Salle a vibré d'applaudissements et de youyous aussi. Mais au vrai, nous avons été quelques-uns à applaudir plus fort encore, et tout particulièrement fiers - c'est normal - de notre poète Omar Boudjerda, venu de Soûr El Ghouzlâne, et qui plus est, en cette session, le représentant de l'Algérie. Il est honoré par M. le ministre de la Culture accompagné par M. le président de l'Association algérienne pour la littérature populaire... Les travaux à proprement parler, objets de ce 5ème Colloque, se sont poursuivis et enrichis par des spécialistes, académiciens et chercheurs, de la littérature populaire, jusqu'au lundi 30 novembre. Le poète Lion du Mont Dirah Omar Boudjerda a donc été honoré et a reçu «Le Bouclier de l'Association algérienne de la littérature populaire». Par ainsi, il a révélé, s'il en a été besoin, l'existence de nombreux poètes de la région de Soûr El Ghouzlâne et, au-delà, vers les vaste territoires comprenant Sidi Aïssa, Bou-Saada, Biskra, M'sila, Batna,... et de même comprenant Aïn Bessem, Bouira, Sétif, Djouâb, Berrouaghia, Boghari,... Mais qui ne le sait déjà? Des noms? Qui ne pourrait citer, entre cent et plus, Khelifi Ahmed?... Omar Boudjerda est essentiellement de Soûr El Ghouzlâne, baigné de son soleil et pétri de son argile, comme les enfants d'Ahl es-Soûr. Il a l'âge de l'indépendance de l'Algérie. Il est né le 20 mai 1962 dans une famille de militants de la lutte de Libération nationale et qui compte trois chouhadâ. Le Mont Dirah en est témoin. Il témoigne de l'héroïsme de ceux qui ont combattu l'armée coloniale; il n'oublie ni les noms des chouhadâ ni des moudjâhidîne en vie ou décédés tel que récemment mon ami d'enfance, le défunt el hâdj Mohammed Saïki qui a fondé un «Musée de l'ALN» à Soûr El Ghouzlâne. Omar Boudjerda, né à peine quarante jours avant l'indépendance, est devenu aujourd'hui un poète lion, issu de l'espèce Lion du Mont Dirah, aussi fort qu'un lion de légende et un Lion qui veille sur la Gazelle, - un nom collectif d'une tribu fantastique composée de gazelles et qui évoque le Rempart des Gazelles, notre Soûr El Ghouzlâne, l'antique Auzia de tous les temps que Dieu a faits. Et un Lion fort et au verbe doux, en notre région, ne peut être que Omar Boudjerda, - ainsi que nos autres poètes. Oui, je vous l'accorde. Très jeune, après l'école primaire et le lycée, notre poète, avant de l'être, s'est passionné en autodidacte consciencieux de l'histoire et civilisation de sa région et de son pays. Il s'est attaché à mieux connaître «l'histoire des villes antiques». Au cours de ses recherches, il découvre une littérature populaire qui le séduit. C'est celle qui court de lèvres en lèvres, qui construit des phrases qu'elle coule dans des formes spécialement inventées pour structurer un genre qu'on appelle poème lequel s'adresse à tous ceux qui ont un coeur palpitant et une parfaite raison d'aller vers l'autre, de vivre avec lui. C'est là que le poète Omar Boudjerda a puisé l'énergie de son bond de lion, là aussi qu'il a trouvé sa source d'inspiration et forgé son expression poétique. Et le voilà bientôt poète riche d'une belle expérience dans la pratique de la poésie populaire. Il fréquente des poètes de la région. Il écrit et dit, en toute bonne occasion, des poèmes ardents. Il participe à de nombreuses rencontres et à de récitals de poésie. Il est récompensé, honoré et diplômé à Soûr El Ghouzlâne, Tissemsilt, Tipaza, Alger,... Ses activités se diversifient en faveur de la diffusion de la poésie populaire dans la région et sur tout le territoire national. Il organise, et souvent il y participe, des manifestations culturelles où la poésie populaire tient une grande place: semaine culturelle dans la wilaya de Bouira, notamment dans le cadre de l'Algérie capitale de la culture arabe (année 2007). Notre poète a également été chargé de responsabilités, par exemple, il a été: Secrétaire général de l'Organisation du Festival d'Auzia (trois fois consécutives), entre autres manifestations nationales, régionales ou de la ville de Soûr El Ghouzlâne. Il est aussi membre de l'Union Nationale des Ecrivains à la section de la Wilaya de Bouira, membre exécutif créateur de la Ligue de la littérature populaire d'Alger, ainsi que membre dans différentes associations culturelles au niveau national. Dans Le Temps de lire, j'ai présenté deux ouvrages de Omar Boudjerda: «Sour El Ghouzlâne, Les lions du Dirah, 1912» et «Sour El Ghouzlâne, Histoire et Civilisation». Actuellement, Omar Boudjerda prépare un recueil de textes dans le genre «Poésie populaire». Je reproduis ici ces vers tout en sachant que, extraits de leur contexte poétique, ils ne prétendent pas, à l'évidence, illustrer le talent de ce poète de Soûr El Ghouzlâne: «Sâ'loû aynî. -... Wa qadmoû lanâ l'Djazâir ouzzat laqtâr / El Djazâir kâmla mâha wa ghnâhâ. - El matloûb' n'çoûnha wa namchî nâr / Wa nagdî l'maçbâh ellî ichacha bahâhâ. - Andjahhaz ettourba wa nwattî lawâr / Wa naghras ennouqla ellî ech-chahîd nawâhâ.» - «Interrogez mon oeil. -... [Nos combattants et nos chouhadâ] nous ont fait présent de l'Algérie, la gloire des contrées / De l'Algérie entière avec ses richesses et ses trésors. - Il est demandé que je la soigne, que je m'attache à la préserver / Et que j'allume une lampe qui expose sa splendeur. - Que je prépare la terre et que j'en nivelle les inégalités / Et que je plante la bouture que le Chahîd avait en projet.»