Décidément rien ne va plus entre le Liban et l'Arabie saoudite. Pour cause, le groupe saoudien Arabsat a décidé de stopper la diffusion de la chaîne libanaise al-Manar, appartenant au Hizbollah. Arabsat avait déjà eu le mois dernier un litige avec la chaîne al Mayadeen, qui est également proche du Hizbollah. L'affaire est tellement sensible que l'opérateur satellitaire Arabsat, qui émettait de Jouret el-Ballout, dans le Metn près de Beyrouth au Liban, a déménagé ses centres de diffusion vers la Jordanie, pour ne pas subir la colère des autorités libanaises. La raison de ce clash est une attaque verbale d'un invité lors d'un talk-show en avril dernier, qui avait insulté la famille régnante saoudienne, spécialement le roi d'Arabie saoudite. Le présentateur du talk-show avait souligné, en direct, conformément aux règles en usage au Liban, que l'opinion de l'invité n'engageait pas la chaîne. Selon la presse libanaise, Arabsat ne s'était pas plainte au moment même de l'affaire, ni elle a eu recours, comme cela aurait dû être l'usage, à la justice ou à la Ligue arabe, la compagnie satellitaire opérant sous l'égide de cette institution panarabe a décidé d'arrêter la diffusion de la chaîne porte-parole du Hezbollah. L'arrêt de la diffusion d'al-Manar par Arabsat a provoqué un tollé auprès du Hezbollah qui a accusé, par le biais de ses députés et responsables, notamment son secrétaire général adjoint, Naïm Kassem, «la compagnie satellitaire arabe de prendre une décision politique, et de vouloir punir al-Manar et le parti du Hizbollah pour ses positions, concernant notamment l'occupation israélienne de la Palestine et sa guerre contre les takfiristes». L'affaire a en tout cas provoqué une réunion urgente des membres de la commission parlementaire des Télécommunications, présidée par le député Hassan Fadlallah. Cette réunion qui avait l'allure d'un Conseil de guerre a regroupé plusieurs députés, les ministres de l'Information et des Télécommunications, respectivement Ramzi Jreige et Boutros Harb, mais aussi le président du Conseil national de l'audiovisuel (CNA) Abdelhadi Mahfouz, le directeur général d'Ogero Abdel Mounhem Youssef, des délégués des chaînes de télévison libanaises Ibrahim Halabi pour la New TV, Roy Hachem et Jean Aziz pour la OTV, Pierre Daher pour la Lbci, Kassem Soueid pour la NBN et Ibrahim Farhat d'al-Manar. Dans un point de presse M.Fadlallah a mis l'accent sur «le pluralisme et la liberté d'expression au Liban», soulignant que «les délégués des chaînes présents à la réunion ont tous rapporté qu'à un moment ou un autre et pour diverses raisons, Arabsat a décidé d'arrêter de diffuser temporairement leurs émissions». M.Fadlallah a également indiqué que «le Premier ministre devrait se charger du dossier pour en parler avec les dirigeants d'Arabsat et de la Ligue arabe». Quoi qu'il en soit, la situation est compliquée entre le Liban et l'Arabie saoudite, entre le gouvernement sunnite de Ryadh et le gouvernement à majorité chiite à Beyrouth. La guerre en Syrie et l'influence que peut avoir la chaîne El Manar pro-chiite dans le Monde arabe en est le parfait exemple. Du temps de la deuxième guerre du Liban entre le Hizbollah et Israël, l'Etat hébreu n'a pas pu, malgré ses moyens technologiques, de stopper la chaîne El Manar. Les Saoudiens sont finalement arrivés. Il reste que la plus grande influence de la chaîne est exercée à partir du satellite Nilesat. [email protected]