Les troubles au Burundi inquiètent de plus en plus les autorités de l'Union africaine, qui sont décidées à agir pour prévenir un nouveau génocide L'Union africaine a annoncé qu'elle allait envoyer une mission de 5 000 hommes au Burundi pour tenter de stopper les violences dans ce pays, menaçant Bujumbura de se déployer même sans son accord. Le Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l'UA, réuni vendredi soir à Addis-Abeba, a décidé «d'autoriser le déploiement d'une Mission africaine de prévention et de protection au Burundi (Maprobu), pour une période initiale de six mois, renouvelable», et a demandé «au gouvernement du Burundi de confirmer dans les 96 heures suivant l'adoption de ce communiqué qu'il accepte le déploiement de la Maprobu et de coopérer avec elle». Le Conseil a prévenu que si Bujumbura s'oppose à l'envoi de cette mission, l'UA prendra des «mesures supplémentaires» pour en assurer le déploiement. Il est cependant peu probable que les autorités burundaises, qui ne cessent de dénoncer l'immixtion de la communauté internationale dans la crise politique où est plongé le pays depuis huit mois, acceptent un déploiement étranger sur leur sol. Mais le CPS a insisté sur sa «détermination à prendre toutes les mesures appropriées contre toutes parties ou acteurs, quel qu'ils soient, qui empêcheraient la mise en oeuvre de cette présente décision». La Mission africaine comptera à ses débuts jusqu'à 5000 hommes, soldats et policiers, ainsi qu'une composante civile, et intégrera les observateurs des droits de l'homme et experts militaires déjà déployés au Burundi. Elle aura pour objectif d'éviter «la détérioration de la situation sécuritaire», de contribuer «à la protection des populations civiles en danger immédiat», d'aider à créer les «conditions nécessaires» à la réussite d'un dialogue inter-burundais, et de faciliter «la mise en oeuvre de tout accord» auquel parviendraient les différentes parties. Le «dialogue» est au point mort au Burundi. Le gouvernement refuse qu'il se tienne hors du pays comme le réclament ses opposants, qui vivent aujourd'hui essentiellement en exil. Aucun détail n'a été fourni sur les pays qui pourraient participer à cette mission. Mais le CPS a demandé à l'UA d'entamer rapidement des discussions avec ses 54 Etats membres et avec les «pays de la région» impliqués dans la Force est-africaine en attente (EASF), pour qu'ils fournissent ́ ́les troupes et les policiers nécessaires ́ ́. Cette Force, une composante régionale de la Force africaine en attente (FAA), n'a encore jamais été déployée. Dix pays fournissent des troupes à l'EASF: le Burundi, les Comores, Djibouti, l'Ethiopie, le Kenya, l'Ouganda, le Rwanda, les Seychelles, la Somalie et le Soudan. La décision du CPS intervient une semaine après l'attaque le 11 décembre de trois camps militaires à Bujumbura et en province, les affrontements les plus intenses au Burundi depuis une tentative de coup d'Etat militaire en mai. Les affrontements et les opérations de ratissage qui ont suivi ont fait officiellement 87 morts, mais des ONG et l'ONU évoquent un bilan «bien plus élevé», dénonçant des exécutions extra-judiciaires. Le Burundi est plongé dans une profonde crise politique depuis la candidature fin avril du président Pierre Nkurunziza à un troisième mandat, jugé par ses adversaires contraire à la Constitution et à l'Accord d'Arusha ayant permis la fin de la guerre civile (1993-2006) entre l'armée dominée alors par la minorité tutsi et des rébellions hutu. La mise en échec d'un coup d'Etat en mai, la répression brutale de six semaines de manifestations quasi quotidiennes à Bujumbura à la mi-juin et la réélection de M.Nkurunziza lors d'un scrutin controversé à la mi-juillet n'ont pas empêché l'intensification des violences, désormais armées.