Si cette avancée est saluée par Me Mokhtar Bensaïd, président de la Ladh, cela ne l'empêche pas de critiquer certaines de ses autres dispositions. Les textes de loi, c'est bien beau. Mais leur bonne application, c'est encore mieux. C'est, en résumé, la conclusion à laquelle ont, quasi unanimement, abouti les participants, conférenciers et public, ce dernier par la voix des intervenants dans les débats qui ont suivi les communications données à la table ronde qui s'est tenue, hier, à l'hôtel Hilton d'Alger, sous le thème accrocheur des «priorités en matière de renforcement de l'efficacité du système judiciaire en Algérie». Surtout que la rencontre organisée par la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (Cncppdh), en partenariat avec le bureau Mena de l'organisation Penal Reform International, a essentiellement porté sur les garanties dont doit bénéficier toute personne arrêtée lors de son arrestation et avant son jugement. En clair, durant sa garde à vue ou quand elle est remise en liberté provisoire ou placée en détention préventive. Et surtout que notre pays va connaître d'importants changements en la matière avec l'entrée en vigueur de «l'ordonnance 15-02 du 23 juillet 2015 modifiant et complétant l'ordonnance n°66-155 du 8 juin 1966 portant Code de procédure pénale». Dont il est attendu, selon le message du président de la Cncpphd adressé aux participants à la table ronde d'hier, par «les nouvelles mesures en matière de détention préventive, de liberté provisoire et de garde à vue» qu'elle introduit dans ledit code, qu'elle redore «l'image de la justice algérienne (aujourd'hui) ternie par l'abus constaté dans le recours à la détention préventive». Si cette avancée est saluée par Me Mokhtar Bensaïd, président de la Ladh (Ligue algérienne des droits de l'homme), cela ne l'empêche pas de critiquer certaines de ses autres dispositions. Notamment, celle relative «à la protection des témoins» qui dans certains cas, a-t-il précisé, «fonctionnera comme une claire entrave au sacro-saint principe de la présomption d'innocence dont bénéficie tout prévenu». Et, partant, «comme une atteinte aux droits reconnus de la défense». Se voulant plus explicite, il a ajouté que cette dernière «ne peut pas accepter, au prétexte de la sécurité du témoin à charge, de voir celui-ci témoigner en gardant l'anonymat...». Et de poursuivre: «Cette situation aberrante aurait pu être évitée si les pouvoirs publics s'étaient donné la peine, avant de procéder aux modifications susmentionnées dans le Code de procédure pénale, de consulter toutes les parties concernées; des avocats aux services de sécurité...» Pour en revenir aux travaux de la table ronde d'hier, ils ont été marqués, dans sa matinée, par la présentation de trois communications sur, précisément, la garde à vue, la liberté provisoire et la détention préventive. Et ce, par trois experts algériens qui ont tenté d'apporter tous les éclairages nécessaires les concernant: le professeur Lazhari Bouzid, membre de la Commission des droits de l'homme de l'ONU, à partir des textes juridiques établis par des organisations compétentes relevant de l'organisation onusienne; le professeur Abdelmadjid Zaâlani, membre de la Cncppdh et vice-président de la Commission arabe des droits de l'homme, à partir de la Charte arabe des droits de l'homme, et la professeure Maya Salhi, membre de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples, en se référant à la Charte africaine y afférente. Tout en situant l'établissement des textes en question dans leurs cadres historique et géographique respectifs, ils ont mis en exergue les avancées enregistrées à travers le monde en matière de garanties juridiques à assurer à toute personne arrêtée; les plus importantes ayant trait au respect de sa liberté individuelle et de son intégrité physique; lequel respect passe, ont-ils souligné, par l'obligation qui est faite au service ayant procédé à son arrestation de lui indiquer immédiatement et les raisons l'ayant motivée et ses droits; parmi ces derniers, celui de bénéficier de l'assistance d'un avocat, de contacter sa famille et d'être présenté, à l'expiration du délai réglementaire de garde à vue, rapidement devant un magistrat dûment habilité à statuer, dans l'attente de son jugement, sur sa situation: sa mise en liberté provisoire ou sa détention préventive, à savoir. A signaler que la rencontre d'hier est perçue par Abdelwahab Merdjana, secrétaire général de la Cncppdh, comme «le couronnement d'une série de rencontres régionales organisées, ces derniers mois, à travers le pays pour expliquer la portée des modifications, en matière de dispositions relatives aux garanties à assurer à toute personne arrêtée, apportées au Code de procédure dans le long chemin menant à une justice plus humaine». Mais également comme «une occasion de faire connaître aux pays arabes l'expérience algérienne en matière de réforme judiciaire...».