Tayeb Louh a rappelé, ce jeudi, le caractère exceptionnel de la détention préventive en déclarant notamment que le code de procédure pénale sera revu à cet effet. Le code de procédure pénale dans son article 123 stipule que « la détention préventive est une mesure exceptionnelle ». Et de poursuivre dans l'alinéa deux : « Si toutefois les obligations du contrôle judiciaire sont insuffisantes, la détention préventive peut être ordonnée ou maintenue ». Dans une déclaration à la presse en marge de la séance plénière à l'Assemblée populaire nationale (APN) consacrée aux questions orales, le ministre de la Justice, garde des Sceaux, est revenu sur l'épineux dossier de la détention préventive affirmant que son département allait revoir le code de procédure pénale, particulièrement les aspects qui concernent les libertés individuelles, soit la détention provisoire ou la détention préventive, en privilégiant la présomption d'innocence. Une détention préventive longtemps décriée par les hommes de loi algériens et la dernière déclaration du président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, semble sans appel. Même s'il reconnaît que l'Algérie a fait d'importants progrès en matière de droits de l'homme, il estime que la détention préventive a donné lieu à « une industrie de mandats de dépôt ». Il a expliqué, le 17 novembre dernier à la radio nationale, que la détention préventive est « abusivement appliquée » par les magistrats algériens. « Les textes sur la détention préventive sont d'une réalité éblouissante, mais ne sont pas appliqués. On applique le contraire de ce que disent les textes, c'est incroyable, terrible et inadmissible », a-t-il dit. Le cas le plus édifiant de ce dossier reste celui de l'ex-directeur général de la Générale des concessions agricoles (GCA) de la région sud-est décédé dernièrement en prison à Ouargla où il était en détention depuis plus de six ans en attente d'un procès. Son avocat avait regretté que son mandant ne soit pas remis en liberté conditionnelle par les trois magistrats de la chambre d'accusation. Le cas de Chérif Medjouel n'est pas unique dans les annales de la justice algérienne puisque des dizaines de cadres sont détenus dans des dossiers liés à des affaires présumées de corruption, dont celles de Khalifa et Sonatrach et attendent leur procès depuis plusieurs années. Rappelons que dans les affaires criminelles, la détention provisoire peut aller jusqu'à 24 mois. Quand il s'agit d'une affaire liée au terrorisme, elle peut durer jusqu'à 44 mois, mais en dehors de ces cas, la détention ne doit pas dépasser les 16 mois. Pourtant, Tayeb Louh n'est pas le premier ministre de la Justice à se prononcer sur cette question puisqu'en 2011, Tayeb Belaïz alors à la tête de ce département avait affirmé lui aussi que la détention préventive est une mesure exceptionnelle relevant du pouvoir discrétionnaire du juge, notamment du juge d'instruction. Pour M. Louh, la décision « revient au juge lorsque l'enquête est achevée et que l'affaire est soumise au tribunal ». L'autre révision phare qui touchera le code de procédure pénale est celle de la protection des témoins, notamment en justice pénale. Le ministre reconnaîtra les limites du présent code qui « ne contient pas de garanties pour le témoin dans les affaires pénales ». Des garanties qualifiées de « nécessaires » surtout lorsqu'on connaît la difficulté qu'éprouvent les témoins et les pressions et intimidations subies par la famille ou les amis d'un accusé. Par ailleurs, M. Louh a annoncé un troisième amendement concernant la mise en mouvement de l'action publique qui sera accordé à la police judiciaire et son traitement de concert avec cette dernière pour évaluer l'impact de la dissuasion générale et particulière sur les phénomènes de la délinquance et de la criminalité.