La cérémonie de signature sera une réponse claire et directe L'un des messages du chef de l'Etat en signant cette loi de finances sera évidemment sa présence physique et la photo de famille du gouvernement. Les demandes s'entassent, s'empilent et la pression sur le président de la République s'accentue au point d'installer un climat tendu. C'est dans ce contexte politique particulier que Bouteflika choisit de répondre à sa manière aujourd'hui. Par l'image et devant les caméras des télévisions, il tiendra un dernier Conseil des minis-tres de cette année 2015 et signera ensuite la loi de finances 2016, avant de s'adonner à la traditionnelle photo de famille avec son Exécutif réuni, toujours devant les caméras de télévision. Une preuve physique qu'il est à la barre et qu'il tient le gouvernail. Durant toute cette année qui vient de s'écouler, le forcing de l'opposition n'a pas baissé d'un cran, jusqu'à mettre parfois le moral national en berne. Le 6 novembre dernier, 19 personnalités, dont certaines très proches du président ont tenu une conférence de presse pour annoncer qu'elles avaient fait une demande d'audience au président Bouteflika. Ce groupe réduit aujourd'hui à 15 personnalités, a rajouté une couche à la cacophonie généralisée. Le point culminant de ce «délire politique national», a été atteint lors des débats sur le projet de la loi de finances 2016. Une requête signée par 92 parlementaires, 90 députés et deux sénateurs, a été remise au directeur de cabinet de la présidence de la République, Ahmed Ouyahia. Ne désespérant pas de faire barrage à ce texte de loi très controversé, les signataires, ont demandé au président de surseoir à la signature de la loi en question. Encore un niet catégorique du chef de l'Etat. A ces tirs groupés, Bouteflika choisit un «j'y suis, j'y reste» et signifie clairement qu'il était élu et qu'il assumera ce «sacrifice» suggérant par la même à ce beau monde d'attendre les échéances électorales fixées par la loi et de se consacrer au rendez-vous de la République, dont celui de la révision de la Constitution. Une escale, estime-t-il, capitale pour nourrir le pluralisme de joutes nobles autour de programmes alternatifs. La cérémonie de signature sera donc une réponse claire et directe aux détracteurs de cette loi de finances qui demandaient ni plus ni moins son annulation. En la paraphant, le président de la République confirmera la souveraineté des choix des deux chambres du Parlement. Et le Conseil des ministres apportera une batterie d'autres réponses aux questionnements de la scène politique. Adopté le 30 novembre dernier par les députés dans une ambiance de pugilat, le projet de loi de finances 2016 a été entériné par les sénateurs dans un hémicycle tendu. L'ouverture franche aux investissements pour diversifier l'économie fait toujours peur à une bonne partie de la classe politique. L'article 66 autorise ainsi l'ouverture des capitaux des entreprises publiques aux investisseurs privés et l'article 59 permet aux investisseurs privés de recourir, avec l'aval du gouvernement, aux financements étrangers. Ce sont ces deux articles qui ont été «violemment» contestés par les parlementaires qui y voient, en filigrane, une remise en cause de la protection des intérêts économiques nationaux. L'autre pomme de discorde dans cette même loi a été l'article 76, dont la disposition permet aux entreprises algériennes de céder leurs actifs via la Bourse d'Alger. Mais, ils estiment que le droit de préemption n'est pas imposé à ces cessions. Aussi, et n'importe quel investisseur étranger peut s'approprier la totalité des actions, s'il passe par la Bourse. Pourtant, de nombreux experts et économistes n'y voient pas de grands changements à même de susciter une partielle réaction des députés. Dans la LF 2016, «une révolution, et je pèse mes mots, est faite en ouvrant le droit de la promotion industrielle aux privés pour aménager et gérer des zones industrielles sur des terrains qui leur appartiennent», a souligné le ministre de l'Industrie et des Mines, Abdessalem Bouchouareb dans un entretien accordé, dimanche dernier, au journal L'Expression. «Nous construisons progressivement un marché du foncier industriel. A partir de juin 2016, nous ne parlerons plus de ce problème. A court terme, ces mesures sont en train de produire un formidable effet de confiance que nous allons confirmer en continuant à réformer. C'est comme ça que nous fabriquons l'avenir», a expliqué le ministre de l'Industrie. Un éventail d'autres décisions, viendront confirmer le cap pris par les autorités du pays. Des décisions qui ne seront pas simplement économiques. Le processus enclenché dans le courant du dernier trimestre de 2015 et qui va dans le sens d'appuyer la primauté du politique sur le militaire, se poursuivra et prendra même des prolongements stratégiques à travers la nouvelle Constitution, dont l'avènement s'est désormais précisé. Une nouvelle donne qui invitera toute la classe politique confondue à la déontologie démocratique et disqualifier toutes les polémiques stériles et les guéguerres d'arrière-gardes qui ont dominé l'année 2015. Est-ce donc la fin du délire politique?